10 Downing pigs

MERCREDI 7 AVRIL.  « Selon les médias britanniques, 17 députés conservateurs ont signé une lettre réclamant la démission de leur chef. »

Dans la plus secrète et protégée des fermes, 

Derrière une porte noire et des hauts remparts,

Un groupe de cochons tenu à l’abri des regards 

Autour d’un grand festin s’exprimait en ces termes : “

Que les temps sont durs” disait l’un d’entre eux. 

“Ça ne s’arrêtera donc jamais, c’est affreux” 

Et autour de lui tous semblaient d’accord.

“Notre espèce va mal !”, cria un autre porc.

“Oui, les cochons tombent comme des mouches”

Et ainsi de suite, chacun ouvrant sa bouche

Sur cette terrible et regrettable peste chinoise

Qui soudain effrayait tant ces âmes bourgeoises.

Au milieu du dîner, le roi des gorets prit la parole, 

Hideux, avec ses poils blonds mal tondus

Avec sa tête énorme, son ventre bien dodu

Et cet air abattu que donne l’excès d’alcool.

Il grognait peu distinctement, le gros porc,

Mais autour de lui tous semblaient d’accord :

“Mes chers chochoncitoyens, pas de panique !

Ne vous affolez pas et croyez en ma politique

Tous nos semblables sont en sécurité pour l’instant 

Bien au chaud dans leur ferme et à l’abri du variant 

Nos meilleurs cochons reçoivent les meilleurs soins

Et les autres peuvent toujours demander si besoin 

Pendant ce temps-là, nous qui avons du pouvoir

Nous qui avons subi tant de coups de boutoir

Nous qui avons travaillé dur et qui avons réussi 

Faisant parler nos talents et nos fines stratégies

Nous qui avons su convaincre nos compatriotes

Nous qui avons su être leur guide et leur pilote

Nous qui avons géré cette crise d’une main de maître 

Prenant les décisions les plus dures pour leur bien-être 

Nous avons, j’en suis convaincu, mérité notre repos. 

Qu’auraient fait de mieux tous ces salauds ?

Cessez de penser à ces cochons qui disparaissent, 

Cessez de pleurer chaque membre de notre espèce, 

Cette mystérieuse maladie dont vous causez tant, 

N’est pas du tout aussi grave qu’on le prétend. 

Célébrons ce qu’il reste et vidons-nous la tête, 

Célébrons ceux qui vivent et poursuivons la fête !” 

A ces mots, les cochons, se sentant beaucoup de joie, 

Grognèrent en chœur à la gloire de l’hideux roi.

Cette soirée-là, ils passèrent un excellent moment.

Tous pensaient, et c’est sur ces mots que nous trinquons : 

Qu’est-ce que c’est bon d’être vivant ! 

Qu’est-ce que c’est simple d’être si con ! 

Diego ANTONUTTI