Initiatives étudiantes : rencontre avec Souffle Républicain

Cette semaine, nous sommes allé.es à la rencontre des créateur.ices de l’initiative étudiante Souffle Républicain. Les trois étudiant.es nous ont parlé de leur projet, de leurs attentes et de leurs passions. Partons donc à la découverte d’une association qui pourrait voir le jour sous peu.

NDLR : cette interview, qui intervient à l’approche du vote pour les initiatives étudiantes, est réalisée et publiée à titre informatif et ne constitue pas une incitation à choisir le projet présenté.

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots, nous parler un peu de vous ?

Hadrien Brachet : Je m’appelle Hadrien Brachet, j’ai 21 ans, je suis actuellement étudiant en Master 1 de journalisme et viens du campus de Reims. J’ai déjà fait pas mal de radio, mais je me concentre un peu plus sur la presse écrite aujourd’hui. Je suis aussi passionné de théâtre, une activité que je pratique à Sciences Po. J’ai d’ailleurs eu la chance de pouvoir faire la co-mise en scène d’une pièce de théâtre. Bien sûr, je suis aussi passionné de débats, notamment sur les questions que l’on peut qualifier de « républicaines ».

Antoine Chapel : Pour ma part, je m’appelle Antoine Chapel, j’ai 19 ans, et suis en première année du double master Sciences Po/Paris 1. Je viens également du campus de Reims, au sein duquel j’étais membre de Génération.s, qui malheureusement ne convient plus à mes attentes. C’est en partie pour cette raison que je lance aujourd’hui une initiative étudiante avec Hadrien et Marie.

Marie Royal : Je m’appelle Marie Royal, je suis actuellement en Master 1 à l’École doctorale de Sciences Po et suis en parallèle un Master à l’université de Londres sur les droits de l’Homme, domaine dans lequel j’aimerais bien travailler. C’est sur le campus de Reims que j’ai rencontré mes deux amis, avec qui je développe aujourd’hui ce projet. Mon point de vue est un peu différent des leurs, moins « républicain », et c’est ce qui m’a donné envie de faire du débat.

Pouvez-vous nous donner un peu plus de détails sur le principe de Souffle Républicain ?

Souffle Républicain :  Souffle Républicain cherche à aborder des sujets de sociétés présents en France, difficiles car très conflictuels. Les sujets sont qualifiés de « républicains » mais cela regroupe par exemple la laïcité, la place des communautés dans la République, la notion de république, le racisme… Ce sont des sujets qui touchent vraiment à nos vies quotidiennes, dont il est important de débattre car ils ont des conséquences concrètes. Notre idée est de recréer un espace apaisé pour aborder ces questions, c’est d’ailleurs le cœur de notre projet. Nous voulons nous concentrer en particulier sur le fond des questions républicaines pour revenir sur les arguments, invoquer des faits, retrouver un débat d’opinion argumenté.

Notre but est de recréer le dialogue au sujet des questions de société, car le débat a tendance à s’hystériser très vite, il part rapidement en clash et beaucoup refusent le dialogue. On peut aussi parler des débats qui tournent à la violence, et d’une polarisation, c’est-à-dire que les membres de différents bords politiques se regroupent et se referment sur eux-mêmes. La liberté d’expression, dans le cadre de la loi bien entendu, occupe une place importante pour nous, notamment avec l’idée de débat au sein duquel il existe une pluralité d’opinions. Ces débats peuvent prendre la forme de conférences, de soirées, de podcasts. Le plus important est de permettre à chacun de nuancer ses opinions, de développer des points de vue complexes, sans se rallier à un pôle ou un autre. Pour conclure, il est important de garder en tête que l’association n’a aucun agenda politique autre que de défendre la liberté de débattre des sujets républicains.

De quel constat cette initiative est-elle née ?

L’idée du projet commence à germer dans nos esprits pendant notre troisième année à l’étranger, Antoine d’un côté de l’Atlantique en Écosse, Hadrien de l’autre, au Canada. Nous avons commencé à constater que les questions sur la laïcité revenaient beaucoup dans l’actualité, mais clivaient également énormément. Nous avons donc commencé à en débattre beaucoup et petit à petit à se passionner pour ses thématiques. Naturellement, nous en sommes venus à développer cette initiative étudiante.

Pourquoi avoir choisi ce nom pour l’association ?

C’est une idée d’Antoine, qui regroupe deux idées. Le terme « républicain » évoque un régime qui ne sacralise pas les idées politiques, un régime qui permet de se questionner. Et derrière le mot « souffle » se cache plusieurs idées : la parole, le dialogue, mais aussi l’idée de reprendre son souffle par contraste avec les débats où les participants s’énervent.

Pour la petite histoire, précisons qu’au départ Marie n’était pas d’accord avec nos idées, alors en opposition, elle nous menaçait de créer son association nommée « inspiration démocrate ». Mais nous avons finalement réussi à nous entendre, et le nom est resté.  

Quelle est votre vision du débat ? Pourquoi est-ce si important de débattre au sein de notre société ?

Le débat est à la base de notre modèle de société. Dans une démocratie, le fait que l’on puisse confronter des opinions est l’idéal qui nous rassemble. Une démocratie sans débat n’est plus que de la procédure, c’est une démocratie vide. Sans débat, il n’y a pas de démocratie. Pour nous, ce dernier permet de se remettre en question, et de ne pas se renfermer sur ses opinions en rejetant tous les autres points de vue sans même les écouter. Cela peut malheureusement nous mener à l’intolérance. Le débat dans notre société en mouvement permet d’actualiser notre regard et de nous ouvrir au monde. Le débat démocratique peut être accessible à tous, pas seulement aux experts. Il s’agit de revenir sur ce que l’on croit savoir, afin de construire une opinion, ce qui est capital de nos jours, car une radicalisation pourrait ainsi être évitée.

Comment parvenir à apaiser les débats qui opposent les français depuis longtemps dans la pratique ? De nombreuses tentatives ont déjà vu le jour avec avec cet objectif, que souhaitez-vous faire de plus ?

Tout d’abord, nous souhaitons inviter des personnes extérieures, sélectionnées pour leur capacité à réaliser des débats de fond, habituées aux débats en public, que nous aurons briefées pour qu’elles comprennent le cadre dans lequel elles vont échanger. Cela montrera que le débat est possible, même entre deux personnes de bord opposé.

Nous cherchons également à mettre en place des éléments très concrets et très pratiques, pour faire face à différentes situations. Pour cela, une petite charte a été écrite que les invités (étudiants, professionnels…) doivent signer. On peut lire que le débat doit se faire dans le respect mutuel, des pauses seront mises en œuvre s’il y a un emportement… À notre avis, le contexte, le cadre de l’association, le fait que tous les membres n’aient pas le même avis, que ce ne soit pas sur les réseaux sociaux mais en conférence, sont [des éléments] favorables aux débats apaisés.

Faudra-t-il être membre pour participer aux débats, aux événements ?

Non, les débats et les événements sont ouverts à tous sans exception. L’idée est de faire participer un maximum les étudiants en organisant des sessions d’échanges avec les personnalités pour qu’ils posent leurs questions, qu’ils fassent des remarques, de développer une interaction pour impliquer les étudiants, les invités… Il n’est pas utile d’être des spécialistes des sujets proposés, ni même d’avoir déjà sa propre opinion bien définie, inutile de s’inquiéter !

Quel est le premier événement que vous espérez pouvoir proposer ?

Nous ne voulons pas vous donner plus de détails à propos de notre premier événement, mais nous avons tout de même déjà une idée concrète qu’il nous faut encore peaufiner un peu avant de pouvoir la dévoiler, probablement dans le cadre de la campagne pour l’initiative étudiante.  Tout ce que nous pouvons vous apprendre est que quelques invités avaient déjà donné leur accord pour participer à une conférence.

Des mesures, des textes, des articles seront-ils mis en place à l’issue des débats ?

Oui, le projet est aussi de développer des comptes rendus critiques des débats reprenant les arguments, les évaluant puis proposant des pistes pour réfléchir. Des podcasts seront aussi disponibles, ainsi que des posts thématiques qui prennent la forme de dialogues entre auteurs par citations, pour revenir sur les sujets essentiels à notre société.

En France, pensez-vous qu’apaiser les débats permettrait une avancée politique et sociale ?

Pour mieux comprendre notre point de vue, nous pouvons développer un exemple : les partis qui assument de défendre un idéal de justice sociale en France aujourd’hui sont divisés et polarisés autour de ces questions républicaines. On voit clairement une polarisation au sein de ces partis qui s’opposent vivement. Il semble absolument nécessaire de parvenir à faire dialoguer des gens qui viennent de différentes origines politiques. Notre société est de plus en plus fracturée, polarisée. On parle souvent seulement avec des gens qui nous ressemblent, avec qui nous sommes d’accord. Alors recréer un débat national est un moyen de recréer de la cohésion dans la société. Si nous n’avons plus de valeurs communes, nous ne faisons plus société et cela représente une porte ouverte à la guerre civile et au fascisme. Ainsi, un débat apaisé aujourd’hui est une des clés pour continuer à faire société.