Blogbusters #1 : Les 3A, naufragés ou conquérants ?

Tarzan dans son platane, Robinson dans sa cabane… De l’expérimentation de l’habitat pas très français.

En cette froide rentrée de septembre, un vent de nostalgie et de mélancolie glace les couloirs de Sciences Po, les rues de Saint-Germain, les yeux implorants de Barbara… Les 3A nous ont quitté et on les sent déjà vides, ces charmants quartiers parisiens autrefois agités par la chaleur hormonale des « kings ». Immeubles haussmanniens en pleurs, cité universitaire désemparée, lofts abandonnés… Et, pendant que Paris pleut, les étudiants espiègles partent à l’aventure ! Et quelle aventure ! Fini le logement propret, le Petit Marseillais spécial peaux sensibles, la lessive senteur Maman, coucou la vie, la vraie. On fera attention aux tuyauteries de plomb, aux araignées mortelles, aux colocataires déviants (NB : la liste énumérée ici se lit par ordre croissant de dangerosité). Aussi, pendant qu’Alexandre s’adapte tant bien que mal au concept de multiculturalisme, Marianne jongle avec les dangers du YOLO (You only live once) et du BOBO (bourgeois-bohême) et Pierre-Yves s’aventure dans la jungle américaine.

 

Alexandre veut être Romain Duris (cf l’Auberge espagnole) mais il est aux Etats-Unis :

Progressivement l’aventure commence. Mon premier colocataire est arrivé – un brésilien arrivé mercredi 28 – et mon premier colocataire américain est arrivé jeudi 29. J’avais un peu peur, du choc culturel. Mais  c’est un être de pure tolérance, et très curieux. Sa mère m’a immédiatement posé des questions sur la France, ma vie, ma famille. J’ai découvert la fameuse gentillesse américaine. Après avoir aidé au transport des affaires. Car qui dit famille américaine, dit famille nombreuse (9 ENFANTS !), dit pick-up, dit une malle très grande pour transporter toute une vie. (…)

USABrendan est le parfait petit américain, bon presque parfait parce qu’il mesure 1m65. Mais il fait du sport, possède une mâchoire puissante, dans le Style Schwarz #Schwarzenegger. Il a une copine depuis 3 ans, de confession catholique tout comme lui. Monsieur fait  donc du sport, et pas un sport de tapette comme les français, un vrai sport, un sport d’homme. De la lutte gréco-romaine… En fait non des mecs en leggins qui passent leur temps à faire du corps à corps font bien un sport de tapette #blaguehomophobe. Eh pour terminer il va faire des études de commerce. (…)

Philes, brésilien de 21 ans. Il est notre ticket d’or vers l’ivresse. Vénéré tel un dieu – malgré un anglais approximatif – celui-ci est capable de dire ” Alcohol – 21 – Thank’s”. Mise à part ça on ne le voit pas beaucoup car monsieur est occupé à travailler secrètement comme un chinois pour envoyer de l’argent à sa famille #blaguetiersmondiste. En réalité on ne sait pas trop ce qu’il fait mais il est nice.

Nous nous retrouvons à parler de nous en 3 langues avec comme lien google traduction. J’ai beau vomir sur ce pays, par un vague humour ironique – parce que je suis rebelle mais trop – moi aussi je suis en train de vivre mon American dream.

 

Marianne expérimente la vie chilienne

 

Il faut savoir que je vis actuellement dans la ville la plus «appropriée» d’Amérique Latine pour les étudiants étrangers: Fêtes et ferias à foison, ville de touristes avec accès au confort occidental mais cadre dépaysant latino. Evidemment, ceci entraine cela, et les premières recommandations qu’on te donne en arrivant se rapportent à la sécurité: Ce n’est pas tant que la ville soit plus que Barbès à 2h du matin, mais ta personne représente une cible privilégiée du gamin souhaitant manger à sa faim ce soir: Un bon gringo potentiellement candide et blindé de thunes. Preuve à l’appui, il m’a fallu moins de 4h sur le Chiliterritoire Chilien pour me faire pick-pocketer ma carte bleue par un fourbe d’ado dans un car, alors que je m’étais endormie comme une masse. Tout ça pour vous dire qu’ici, un gringo reste un gringo, et ce dernier, généralement plein d’aspirations «locales», remet très rapidement les pieds sur terre lorsqu’il se retrouve à poil dans la rue.

Mais bon, comme nous sommes de bons étudiants étrangers -européens (je ne parle pas des barbares de ricains)-, ce n’est pas un peu de danger qui va nous arrêter et nous faire vivre dans une  gated community de la ville voisine, Viña del Mar (pour le coup vitrine de la réussite économique du Chili, une grosse station balnéaire à l’américaine. Graou.) Par conséquent, il faut trouver une alternative sécuritaire-mais-un-peu-typique-quand-même. La maison dans laquelle je vis remplit parfaitement ces critères. Placée dans les hauts quartiers de la ville, c’est le genre de baraque qui ressemble de l’extérieur à un tas de bois recouvert de tôle pas très accueillant: Mais en bonne bobo, j’entre derrière mon proprio, un vieux ricain réac et chill, à la mine sympathique.  Et là, oh miracle: La maison représente tout ce dont un étudiant étranger peut rêver: Des peintures sur les murs et les portes, des affiches de concerts partout, quelques tracts communo-anarchistes, des canapés dégueulasses-mais-vintage, des bobines de cable reconverties en tables basses, une vue imprenable sur la ville, une vitrine de brocante hipster, quoi.  Je vis dans le cliché de la «magie de Valpo» (sans chauffage).

 

Et Pierre-Yves a déjà conquis le campus, que dis-je, Boston

Me voilà arrivé sur le campus américain, le vrai, celui qui sent la sauce barbecue. Quand j’ai vu les haies de ballons multicolores et les « Welcome huskies » (husky =chien / c’est aussi la mascotte de l’université) j’étais franchement dubitatif. Quand j’ai vu mon appartement et trois lits dans la même chambre j’étais franchement en dépression

Je me suis pourtant laissé enthousiasmer par la visite du campus (qui reste totalement intégré à la ville). C’est un lieu assez singulier où tout est pensé pour devenir obèse dans les meilleurs délais (même si une immense salle de sport et une piscine trônent au centre) : il y a un restaurant tous les trois mètres, des salles de concert, de cours et les dorms à moins de dix minutes de marche ! Les installations sont remarquables et l’efficacité américaine vérifiable (durée d’obtention d’une carte étudiante en Sorbonne = 2 ans, durée d’obtention de cette carte à NEU = 4 minutes).

Nous avons fait un tour au centre commercial le plus proche (l’université affrète des bus hum hum) pour meubler nos chambres. Alors que chacun s’arrachait les cheveux pour deviner la dimension de son lit, les rencontres se faisaient entre deux packs de jus d’orange de 9 litres (strictement rien n’est petit ici). Nous avons participé à des réunions et “jeux de piste” dans Boston (très embarrassant) pour rencontrer les étudiants internationaux. Il y avait aussi cette réception de bienvenu assez fastueuse (avec de la nourriture du monde entier cuisinée avec bon-sens, sans des litres de graisse liquide I mean). Je parle à tout le monde ici, en espagnol, français, anglais, et j’apprends des insultes en allemand. Toutes les nationalités sont représentés, les amitiés se nouent gentiment, les corps se rapprochent (non je plaisante, not yet).