
A Sciences Po, Hubert Bonneau, un directeur général de la gendarmerie nationale face à de multiples défis
Ce 15 septembre 2025, Sciences Po Défense et Stratégie a accueilli le directeur général de la gendarmerie nationale, Hubert Bonneau. Ce dernier, fort de son expérience comme commandant territorial de brigades et à la tête du groupe d’intervention de la gendarmerie nationale, a esquissé un panorama des défis auxquels la gendarmerie nationale est confrontée et des réponses qu’elle peut apporter.
Auteur : Arthur Savoye
Crédit photo : Ministère de l’Intérieur.
L’amphithéâtre Eugène d’Eichthal est bien rempli, on y croise beaucoup d’étudiants de Sciences Po mais aussi de la Sorbonne et de l’Ecole militaire de Saint-Cyr, très bien habillés.
Hubert Bonneau, directeur général de la gendarmerie nationale depuis octobre 2024 et général d’armée, prend place. Pour son propos introductif, il a souligné plusieurs “marqueurs stratégiques” auxquels la France fait face. En premier lieu, l’aggravation des tensions internationales qui se caractérisent par une guerre hybride. Celle-ci, menée notamment par la Russie, est marquée par des actions de déstabilisation allant des cyberattaques aux tentatives de semer la discorde comme les têtes de cochon déposées devant des mosquées franciliennes. Face à cette situation, M. Bonneau recommande un renforcement du continuum sécurité défense.
En deuxième lieu, l’insécurité ressentie qui a selon lui “dépassé le stade du sentiment” avec une extension de la criminalité organisée, en particulier du narcotrafic. Le directeur de la gendarmerie a insisté sur un continuum croissant entre délinquance du quotidien et criminalité organisée, en prenant l’exemple de réseaux mafieux d’Europe de l’Est très structurés à l’origine de cambriolages en série. Une meilleure coordination entre gendarmerie et police est selon lui indispensable, “il faut que les maires et les gendarmes se parlent” nous dit-il. M. Bonneau préconise également un investissement plus important dans les maillons faibles de la gendarmerie comme les ports secondaires de la côte Atlantique vers lesquels se redéploie le narcotrafic, les grands ports étant davantage surveillés.
Par ailleurs, il note un durcissement des contestations sur le territoire national, marqué par la part croissante des mineurs dans les phénomènes de radicalisation islamiste, une “montée en miroir” de l’ultragauche et de l’ultradroite, et des violences en marge des manifestations. Le cyber représente également un enjeu majeur pour la gendarmerie, puisque davantage d’escroqueries sont aujourd’hui commises en ligne que dans le monde physique, et que les rançons lors d’enlèvements sont demandées en cryptomonnaies, moins aisément traçables par les forces de l’ordre.
Le général a en outre évoqué le besoin de reconnaissance des gendarmes, qui se traduit par une demande de compréhension des défis en matière de procédure auxquels ils sont confrontés dans leur travail de police judiciaire et sur l’état général dégradé des casernes.
Pour conclure, M. Bonneau a rappelé l’importance de l’engagement. Il se félicite de l’augmentation du nombre de réservistes, qui atteint 38 000 membres avec une forte majorité de jeunes issus d’horizons divers, qui ne comptent pas forcément de gendarmes dans leur entourage.
L’occasion pour lui de souligner l’importance de la cohésion nationale : face aux menaces sécuritaires, “il faut se battre” dit-il, tout en rappelant que l’action de la gendarmerie s’inscrit dans un cadre juridique strict et protecteur des libertés (y compris pour l’interception de données numériques). Un message porteur de sens qui résonne avec la devise de la gendarmerie nationale, “Pour la patrie, l’honneur et le droit”.
