Gagner une élection BDE : mode d’emploi
La campagne « physique » BDE a commencé en grande fanfare ce mardi, l’occasion pour lapéniche.net de s’intéresser aux dessous d’une élection et de faire le point sur les éléments qui feront la différence entre Air 27 et Van 7.
« Il y a un vrai problème de monétarisation de la campagne BDE : on est dans la surenchère permanente » confie Jordan Eustache, membre de l’équipe sortante, alias Checkpoint Boutmy. Toujours donner plus que l’autre, tel était le credo d’une liste BDE jusqu’à cette année 2014 où un plafonnement des dépenses a été fixé par l’administration de Sciences Po. Celles-ci ne peuvent désormais excéder 12 000 euros, un budget déjà conséquent quand on considère que la campagne dure seulement quelques jours. Pourtant, à entendre les différentes listes, ce n’est pas tant. Comment se l’expliquer ?
« L’argent est un besoin face à la réalité parisienne et au coût important de la soirée » justifie Jordan. La privatisation d’une boîte est en effet très chère dans la capitale et il n’est pas question pour une liste BDE de faire dans le cheap. Les attentes des sciences pistes concernant cette soirée sont extrêmement hautes et ne font que s’accroître : « ça en devient vraiment prise de tête » avoue Jordan. D’autant plus qu’une soirée d’un BDE en campagne doit se démarquer en proposant des innovations par rapport aux soirées des autres listes et par rapport aux soirées du BDE en temps normal. Il faut donc dépenser sans trop compter et surprendre, se différencier des concurrents.
Mais ce qui coûte très cher, hormis la soirée, c’est aussi et surtout la nourriture. Quand les sciences pistes se préparent à festoyer gratuitement dans le jardin du 27, les listes candidates contemplent maussades le fond du porte-monnaie. La gestion du budget est d’ailleurs primordiale. Alexandre Bensimhon, malheureux candidat aux dernières élections BDE, assure qu’il faut « toujours surestimer les dépenses et viser large financièrement car une campagne comporte forcément de l’imprévu. » Ce plafonnement des dépenses ne peut donc qu’être une motivation supplémentaire pour bien gérer son budget. « C’est une bonne décision. Beaucoup de critiques avaient été faites l’année dernière sur les sommes dépensées relativement importantes » raconte Alexandre. Il ajoute que toutes les associations, de toute façon, dépensent beaucoup. Seulement, le but visé par le BDE apparaît plus futile et moins noble que celui d’une association à vocation humanitaire.
TOUS ENSEMBLE !
« La contribution personnelle au budget du BDE de chaque membre est limitée à 50 euros » affirme Jordan, voulant faire taire les rumeurs selon lesquelles le recrutement d’une liste se fait en fonction de la fortune personnelle – ou du moins familiale. La sélection des candidats se base bien sur la richesse individuelle, mais pas la richesse pécuniaire : une liste BDE, devant représenter théoriquement l’ensemble des étudiants, se doit donc de rassembler des profils variés (des Eurafs, des bicus, des CEP…). « Le recrutement se construit surtout sur l’éclectisme » résume Alexandre avant de préciser : « les différents membres des listes candidates doivent déjà détenir une certaine présence dans la vie associative, être visibles à travers les Triplétades ou l’organisation d’évènements ». Selon Alexandre, il ne faut pas s’y tromper, une liste BDE mélange des gens qui, à la base, ne se connaissent presque pas et viennent de milieux variés.
L’ambiance d’une liste, ses membres doivent donc la créer en travaillant ensemble et en apprenant à se connaître. « C’est mieux que l’inverse » affirme Alexandre sachant que cela permet de donner une meilleure image de la liste brillant dès lors par son éclectisme et sa diversité. Par ailleurs, la cohésion et les bonnes relations entre les différents membres d’une liste BDE sont primordiales. « Cette campagne est une épreuve physique et psychologique. On peut facilement choper des coups de blues et le plus grand réconfort que l’on peut alors trouver, ce sont les autres membres de la liste » révèle Jordan.
L’argent, quant à lui, vient surtout des partenariats et des réseaux que chaque membre de la liste fait jouer dans le cadre de la campagne BDE. Devons-nous en déduire que les « listes bourgeoises » sont un mythe ? « Il y a toujours une liste accusée de réunir toutes les personnes un peu bourgeoises » assure Jordan mais selon lui, ces critiques ne proviennent que des rumeurs et du bouche-à-oreille dont les sciences pistes sont tellement friands. C’est aussi ça une campagne BDE, il faut supporter tous les dires et digérer la critique « avant, pendant et même après la campagne. »
Le moteur d’une liste BDE n’est donc pas la fortune personnelle, mais plutôt sa capacité à se serrer les coudes. Une campagne BDE n’est d’ailleurs absolument pas faite pour diviser puisque le Bureau des Elèves se doit de rassembler tous les étudiants, qu’ils soient aisés ou moins riches, qu’ils étudient à Paris ou à Poitiers, qu’ils soient en 1A ou en 3A. C’est pourquoi ce week-end, tout le monde va voter y compris les campus délocalisés et les étudiants en 3A qui, mis tous ensembles, peuvent être déterminants dans le choix du vainqueur à l’issue de cette semaine de campagne. Ne pas se focaliser sur les seuls étudiants parisiens, c’est donc tout le challenge d’une liste BDE.
Mais la campagne BDE, outre l’argent et une équipe shootée au Guronsan ou au Red Bull, ce sont aussi des animations, qui vont de la structure gonflable au surf mécanique en passant par un dromadaire dans le jardin du 27. Très logiquement, puisqu’une liste BDE se caractérise par sa diversité, le choix des animations se fait en fonction de ce qui plaît à la majorité des membres de la liste. « Ce qui nous éclate va éclater les gens » confirme Alexandre. Ce foisonnement d’activités rend d’ailleurs ces quelques jours particulièrement intenses et stressants pour les listes candidates. Ainsi, Jordan nous raconte que l’an passé, sa liste Checkpoint Boutmy avait prévu d’installer une gyrofolie mais lorsqu’elle fut livrée, elle ne passait pas les portes du 27. C’est là que doit s’exprimer la principale qualité d’une liste BDE selon Jordan : la réactivité. Tout problème peut être contourné et ensuite, analysé. « Tous les soirs, on préparait la journée du lendemain et surtout, on débriefait la journée passée pour faire mieux durant la suite de la campagne. Il faut toujours se remettre en question, particulièrement sur l’image que l’on veut donner de notre liste. »
Pas question donc d’afficher des mines fatiguées ou de passer sa journée sur une chaise, un BDE doit être dynamique pour mettre en avant un programme innovant. La nouveauté est en effet primordiale pour se démarquer de l’équipe BDE sortante. Ainsi, les propositions et promesses d’une liste pour l’année suivante, sans être aussi influentes que la distribution de nourriture, peuvent imprimer une nouvelle tendance et qui sait, amener à la victoire.
Divertir les gens, c’est quand même bien le principal. Mais qu’en est-il d’éclater l’adversaire ? La concurrence entre les listes BDE est souvent exagérée et amplifiée par nous, étudiants avides de combats dans les larmes et le sang. « Les gens veulent du clash et lancent ainsi beaucoup de rumeurs pour venir nous perturber. En réalité, la concurrence n’est pas très violente et on n’a observé aucun véritable conflit ouvert l’an passé » rappelle Alexandre.
En somme, si on renverse la question, comment peut-on perdre une élection BDE ? « Tout simplement en ayant moins de voix que l’adversaire » glisse finalement Jordan en souriant.