« City Hall » de Frederick Wiseman : Boston, « le contraire de ce que représente Trump »

« J’ai réalisé City Hall afin de montrer en quoi un gouvernement est nécessaire à la réussite d’un mieux vivre ensemble » – Frederick Wiseman

Avant toute chose, il vous faudra vous armer de patience. Ce film, réalisé par Frederick Wiseman, dure en effet quatre heures et trente-deux minutes. Néanmoins, ce documentaire d’investigation offre au spectateur une vision différente et inédite de la politique. Filmé et tourné au cœur de la mairie de Boston, la caméra suit le maire, le démocrate Martin J. Walsh dans ses actions réformistes et engagées pour sa commune.

Pas de suspense, de musique, de mise en scène. Les scènes du film sont toutes authentiques, parlantes et criantes de vérité. Le spectateur assiste ainsi à la distribution d’un repas caritatif pour les plus démunis, à un plan d’inclusion mis en place par les employés de la mairie, et à une répétition d’échange de vœux de deux futures mariées. Il voit aussi un maire dévoué, impliqué dans la vie de ses concitoyens, et engagé pour mener des actions concrètes pour l’intégration et l’épanouissement de tous. Ainsi, il multiplie les interventions, insistant sur l’importance du vivre ensemble et de la tolérance. En effet, Martin J. Walsh descend d’une famille d’Irlandais, qui, il le souligne dans le film, ont été victimes d’un racisme dur et fort durant les siècles derniers. Le maire explique donc aujourd’hui que la différence est une richesse.

Même si Martin J. Walsh est la figure centrale de ce documentaire, il n’en est pas véritablement un héros. En effet, chaque groupe social est mis en visibilité, et possède un temps de parole égal. C’est le cas notamment dans une séquence particulièrement poignante qui met en scène des vétérans des guerres d’Irak et d’Afghanistan, où les dialogues ne sont pas coupés, et où les anciens soldats témoignent, avec leurs propres mots et leur propre ressenti, de leurs expériences et de l’importance de s’en souvenir et d’en parler. On voit également Martin J. Walsh expliquer aux citoyens de Boston leurs droits, qui sont souvent peu connus de ces derniers : ainsi, il va donner aux habitants souvent mal informés les démarches à suivre lors d’une arnaque téléphonique, ou d’un vol de carte bancaire…

Wiseman explique que le gouvernement de la ville de Boston « est le contraire de ce que représente Trump ». Il donne une image d’un pays unifié malgré ses différences, et montre que c’est cette union-là qui fait la force. C’est dans cette capitale et plus grande ville de l’État du Massachusetts que Martin J. Walsh, à son échelle, va proposer sa propre définition de la démocratie, dans un pays aussi multiculturel que les États-Unis. C’est donc un documentaire qui présente une politique innovante, participative et inclusive, qui donne une lueur d’espoir dans un pays où le repli démocratique monte en puissance de jour en jour. Un documentaire réussi donc, qui donne une représentation des États-Unis vraie et poignante.

Image : © Météore Films