Devenir maître de conférences à Sciences Po ( 1/2 )
Si je vous demande de me dire comment intègre-t-on Sciences Po, vous allez sans doute me faire un monologue de 2h -minimum- sur la lettre de motivation, les écrits, l’oral, les admissions parallèles … Cependant, lors d’un TD, il y a devant vous une personne dans la salle qui n’a rien fait de tout cela pour arriver à Sciences Po. Cette personne, c’est le maître de conférences. Alors, curieux de connaître cette autre voie d’entrée réservée à quelques-uns ? Désireux de savoir comment obtient-on ce poste tant convoité ? La Péniche est partie recueillir le témoignage de deux maitres de conférences pour avoir la réponse.
Jean Michel Ollé : Un rhétoricien à l’école des sciences politiques
Depuis 2014, Jean-Michel Ollé dispense un cours de rhétorique à Sciences Po, destiné à des élèves de bi-cursus. Ces derniers tombent systématiquement sous le charme. Jonglant avec les figures de styles et les grands discours, il n’apprend pas à imiter les orateurs mais à devenir orateur. Pour ce faire, il transforme les faiblesses de chacun en une force à l’oral. Son entretien :
Thomas Hinzelin : Comment avez-vous été recruté ? Est-ce sciences po qui est venu à vous ou l’inverse ?
Jean Michel Ollé : Je faisais un cours de rhétorique à la Sorbonne, les professeurs responsables du bi-cursus Sorbonne-Sciences Po m’ont demandé de reprendre ce cours pour Sciences Po
T.H : Avez-vous eu quelque chose comme un « examen » d’entrée ?
Jean Michel Ollé : Non, puisque les enseignants qui m’ont recruté connaissaient mon travail à la Sorbonne. J’ai dû cependant m’entretenir avec une responsable pédagogique de Sciences Po pour lui expliquer mes méthodes et mes objectifs.
T.H : Est-ce cela vous plait toujours autant d’être professeur à sciences po ?
Jean Michel Ollé : Des conditions d’enseignement idéales, des effectifs réduits, des étudiants brillants et motivés : franchement, qui pourrait n’être pas content ?
François Duluc : Histoire et droit des états et histoire de Sciences Po
Avec 26 ans d’enseignement à Sciences Po, on peut dire que François Duluc est un vieux de la vieille (je sais qu’il me pardonnera cette familiarité car cette expression vient de l’Empire, période qui le passionne). À l’image de l’institution dans laquelle il dispense son savoir, il est pluridisciplinaire : droit public en Prep Ena, une conférence de culture générale, de questions européennes et enfin d’Histoire et droit des États. Son entretien :
T.H : Est-ce vous qui avez contacté Sciences Po pour devenir professeur, ou l’inverse ?
François Duluc : La première fois c’est moi qui ai contacté Sciences Po et j’ai rencontré le directeur, ensuite je suis parti plusieurs années à l’étranger et à mon retour j’ai été contacté par un collègue qui devait renoncer à sa conférence en raison de sa nomination dans un cabinet ministériel
T.H : Avez-vous passé un « examen d’entrée » ?
François Duluc : Non, ils demandent un CV et souvent c’est de la cooptation. L’administration de Sciences Po nous connait bien. Les jeunes maîtres de conférences étaient eux-mêmes élèves quelques années plus tôt. Quant à ceux qui continuent à enseigner après de nombreuses années, ce qui est mon cas, ils font l’objet d’une évaluation détaillée chaque année par leurs étudiants, qui vaut bien tous les examens.
T.H : Est-ce qu’enseigner à Sciences Po vous plaît toujours autant ?
François Duluc : Je ne serais pas là sans ça ! Quand on prend de l’âge, ça oblige à se remettre en cause en permanence et ça permet de conserver un lien avec les nouvelles générations. Je leur apprends quelque chose mais j’apprends aussi beaucoup moi-même à leur contact.
Merci encore à Monsieur Duluc et Monsieur Ollé pour les temps et leurs réponses. Dans quelques temps une suite de cet article – toujours dans la péniche bien sûr – avec le point de vue du recruteur : l’administration de Sciences Po !