Le Grand Oral de Michel Sapin : de la numismatique à Bercy

Pas de doute, Michel Sapin est bien Ministre des Finances. C’est un passionné de numismatique, cette « science qui traite de la description et de l’histoire des monnaies », qui a clos le dernier Grand Oral de l’année. Avant d’être ministre, notre invité voulait d’ailleurs faire l’École française de Rome – en archéologie – mais s’est finalement tourné vers Normal Sup, Sciences Po et puis l’ENA (pour « trouver du travail », dit-il). Devant un amphithéâtre presque complet, Michel Sapin s’est livré sans détour. Retour.

© Yann Schreiber

Un ministre optimiste

Le discours devant les étudiants de Sciences Po se veut positif. « Hollande [avant la primaire de 2011], c’était Monsieur 3 % :  on avait une marge de progression », rappelle-t-il avec humour quand est envisagée la candidature de François Hollande pour 2017. « C’est le meilleur de gauche », considère celui qui a passé ses 6 mois de service militaire aux côtés du président de la République. De même pour le chômage, s’il refuse de faire « la même erreur », celle de se prononcer sur la fameuse inversion de la courbe du chômage, le ministre n’hésite pas à indiquer que « toutes les conditions pour que le chômage baisse dans l’année 2016 ».

Dans un parallèle avec le mouvement Nuit Debout, il raconte comment il a vécu M68, au lycée Henri IV, son « envie que ça change ». « J’ai passé mes nuits à discuter et à débattre » car « ça fait partie de l’apprentissage ». S’il aurait fallu accueillir Alain Finkielkraut, « on était pas obligé de le laisser parler trop longtemps », ironise-t-il.

© Yann Schreiber

 

Emmanuel Macron, le mouton noir ?

Face à la déferlante Macron, Michel Sapin est manifestement gêné. S’il reconnaît qu’il a « plutôt une belle gueule », il observe le « buzz » autour de son collègue à Bercy. « Un ministre doit se consacrer entièrement à sa tache », n’hésite-t-il pas à rappeler à l’ordre. « C’est bien quand on est ministre de faire de la politique, mais il faut d’abord faire son travail de ministre », assène le ministre. Voilà un message pour le moins clair. Surtout qu’à l’en croire, « le clivage droite/gauche reste un bon clivage aujourd’hui », même s’il reconnaît que sur certains sujets comme le terrorisme « il n’a aucune raison d’être ». Nier ce clivage « c’est être ailleurs« . Bref, vous l’aurez compris, Emmanuel Macron n’a qu’à bien se tenir…

 

Petit panorama économique

C’est un débat économique précis et chiffré que lance le journaliste François Lenglet. Le Ministre des Finances met sur le même plan la Californie, Israël et l’Île de France s’agissant des start-up et justifie ainsi les grandes différences de résultats économiques des grandes régions françaises. Pour Michel Sapin, les entreprises ont longtemps été oubliées du coté de leurs marges. L’occasion, pour lui, de promouvoir le CICE mis en place par le gouvernement début 2013.

© Yann Schreiber

Vient alors la situation économique de la Grèce. M. Sapin prend la défense de Alexi Tsipras. Selon le Ministre, le Premier Ministre grec est le seul qui puisse faire les réformes pour redresser l’administration grecque, d’une « extrême faiblesse ». Il nous rapporte les propos de M. Tsipras, qui affirmait qu’il pouvais faire ces réformes « parce qu'[il n’]est pas encore corrompu », contrairement aux autres partis politiques. François Lenglet prend alors appui sur le récent scandale des Panama Papers pour poser la question de la liberté de circulation des capitaux. Michel Sapin s’y dit favorable, mais prévient qu’il n’y a pas de liberté sans régulation. « L’argent qui corrompt, il faut le combattre », mais il y a aussi « l’argent qui permet de créer, de récompenser le talents ». Il y a donc pour l’énarque une « bonne » et une « mauvaise » finance.

Enfin, face à une question d’un étudiant sur ses différences économiques avec la droite, le Ministre exprime un long silence puis un soufflement. Il reste un an pour expliquer la différence aux électeurs.