Interview de François Asselineau “La France est en déclin accéléré”

Aux côtés d’autres associations de Sciences Po, La Péniche reçoit les candidats à l’élection présidentielle. Ce lundi 25 octobre, notre rédactrice s’est entretenue avec François Asselineau, candidat de l’Union Populaire Républicaine (UPR), parti qu’il a créé en 2007. 

Q : J’aimerais revenir sur votre parcours. Qu’estce qui vous a amené à entrer en politique ?

R : Vous l’aurez remarqué, si vous avez étudié mon curriculum, je suis entré en politique très tardivement. Je ne suis pas né dans une famille qui faisait de la politique ni n’était dans la haute administration. Mon père était cadre supérieur à EDF-GDF, ma mère était mère au foyer. Donc j’étais très ignorant, en fait. Et quand j’ai préparé le concours de l’ENA, après mon service national que j’avais effectué au Japon, mon rêve était de sortir de l’ENA au Quai d’Orsay pour devenir un jour ambassadeur au Japon. Quand j’avais votre âge, quand je lisais le journal Le Monde, je ne lisais jamais les pages politiques, ça ne m’intéressait pas tellement. Ce qui m’intéressait, c’était, et ça m’intéresse toujours, la géopolitique, les cultures, les civilisations étrangères. Mais la politique politicienne, non. 

Si j’ai fait ce que j’ai fait, il me semble que même mes adversaires doivent le reconnaître, c’est au détriment de mon intérêt personnel.  Étant sorti vice-major de l’ENA, à l’Inspection générale des finances, mon parcours était tout tracé. Je devrais aujourd’hui présider une grande banque commerciale et gagner comme mon camarade Frédéric Oudéa, qui est le PDG de la Société Générale, 280 000 euros par mois. Et moi, si je vous disais mon salaire, vous en ririez de pitié. Donc, je n’ai pas fait ça pour l’argent. Je n’ai pas fait ça non plus pour les honneurs, puisque j’aurais été en position à de nombreuses reprises de proclamer mon enthousiasme à des gens qui sont devenus président de la République, je pense à Nicolas Sarkozy que j’ai bien connu. Donc je ne l’ai pas fait non plus pour une vaine carrière. 

Je l’ai fait pour des idées, et je sais que ça paraît un peu saugrenu, mais il y a ce beau proverbe chinois qui dit « c’est lorsqu’un pays est en proie au chaos qu’apparaissent des responsables intègres. » Lorsque j’ai accompagné les plus hauts responsables français, y compris François Mitterrand sous la cohabitation, en Corée et au Kazakhstan, y compris Jacques Chirac que j’ai accompagné en Chine, au Japon, en Asie du Sud-Est, et dans plusieurs pays d’Amérique latine, j’ai constaté que notre pays était dirigé par des responsables qui n’avaient plus les manettes, qui étaient dirigés eux-mêmes. Et je découvrais un tel gouffre entre l’image que mes amis, ma famille, des gens comme les Français moyens, se font des pouvoirs du président de la République ou du Premier ministre, et la réalité : ils sont totalement contraints par des quantités de contraintes énormes. Comme on me prête souvent depuis que je suis petit une certaine prémonition, une capacité à voir loin, j’aivraiment vu dans les années 1990, à quel point tout ceci ne pouvait pas ne pas conduire un jour à une explosion générale. Le drame de la France, c’est qu’elle continue à s’enfoncer dans cette situation. C’est pour cela que j’ai fait de la politique

Si je peux me permettre, je ne sais pas où j’aboutirais, mais je pense que j’ai déjà contribué par mon action depuis quatorze ans, à faire évoluer la pensée, parce qu’il y a quand même beaucoup de gens maintenant qui me suivent, y compris beaucoup de journalistes, qui ne parlent jamais de moi, mais qui me suivent sur Twitter, y compris beaucoup de responsables politiques. Une fois, j’avais vu Éric Zemmour, je le connais un petit peu. C’était en 2018 ou 2019. On avait pris un verre au bar de l’hôtel place de la République, et je me rappelle encore qu’il me disait qu’il écoutait tout ce que je disais, qu’il s’en inspirait pour les billets qu’il faisait à l’époque sur RTL, je crois. En fait, je suis suivi par beaucoup de gens qui s’inspirent de moi. Je ne dis pas que je suis le seul, mais j’ai quand même largement contribué, à mon avis, à développer ces idées. En fait, je fais de la politique pour ce que tout le monde devrait faire, c’est-à-dire pour défendre des idées, une vision du monde, une vision de la France.

J’ai présenté ma vision du monde, ce pour quoi je me bats, c’est-à-dire rendre aux Français leur droit inaliénable à disposer d’eux-mêmes. Pour paraphraser la Charte des Nations Unies, je me bats pour que les Français retrouvent un droit inaliénable à disposer de leur propre avenir, que ce soient eux qui décident, et c’est de là que découle tout un programme, avec 27+1 propositions. Je ne veux pas être méchant, mais on a l’impression que les autres candidats, de Mme Hidalgo à Mme Pécresse en passant par M. Bertrand, M. Jadot, etc., disent d’abord qu’ils veulent être candidat, et après, une fois qu’ils sont candidats, qu’il va falloir trouver le programme. Alors, tous les jours, c’est un poème à la Prévert. Un jour, vous avez M. Zemmour, qui d’ailleurs n’est toujours pas candidat, qui annonce qu’il veut supprimer le permis à points, comme si c’était du niveau d’un Président de la République. Le lendemain, vous avez Mme Hidalgo qui veut baisser à 40 km/h la circulation sur le périphérique parisien. Où est la réflexion ? Où est l’ambition pour la France ? Où est le programme pour la France ? Quelle est la stratégie ? 

Regardez M. Édouard Philippe, qui crée un parti qui s’appelle Horizons et qui dit « la situation est catastrophique », je crois que c’est le seul pays au monde où ça peut arriver, un ancien Premier Ministre, qui était le responsable numéro deux pendant trois ans. Donc il crée un mouvement politique parce qu’il faut avoir une stratégie, voir loin, l’horizon 2050. M. Macron trois jours après, fait la même chose, lui, c’est horizon 2030. Mais Mr. Macron et Mr. Philippe ont une stratégie. Il y a une stratégie en France. Elle a été fixée en 1957. Ça s’appelle le traité de Rome, et tous les traités ultérieurs. La stratégie, c’est que la France doit progressivement s’effacer dans un État-continent qui s’appelle les États-Unis d’Europe. Ça a été confirmé par le traité de Maastricht qui a transformé le marché commun en une Union européenne à vocation fédérale. Il n’y a pas plus grande stratégie pour un pays que de se faire hara-kiri dans une structure fédérale ! Mais c’est ça, la stratégie, ce n’est pas autre chose et tout en découle. Toutes les grandes politiques en découlent. Donc le fait que le chef de l’État et le Premier Ministre nous disent ça, les bras m’en tombent. Et je citerai encore, un proverbe chinois qui dit « avoir toujours la même stratégie, c’est ne pas avoir de stratégie. »

Q : Et donc vous, c’est pour défendre ce « droit inaliénable des Français à disposer d’eux-mêmes », comme vous dites,que vous êtes candidat à la présidence de la France ?

R : Oui, c’est pour essayer d’abord de faire en sorte que les Français réfléchissent. Je suis comme beaucoup de Français qui commencent à comprendre que la France va de mal en pis, dans tous les domaines. Que ce soit l’activité, le nombre de grands groupes industriels qui sont rachetés par l’étranger, les usines qui filent à l’autre bout du monde, le niveau de vie qui stagne ou qui baisse, la langue française qui est battue en brèche, l’enseignement qui est dans l’état que je décrivais tout à l’heure (ndlr : on vous renvoie à l’interview de radio Germaine ;)) la recherche… On n’a pas été fichu de faire un vaccin contre la Covid-19 ! Le bilan diplomatique de Macron, c’est le pire bilan de tous les présidents de la Cinquième République. La France est ridiculisée dans le monde entier, en Australie, on l’appelle Pepe le putois depuis qu’il est passé. On a au niveau géopolitique une domination outrancière de l’Allemagne qui maintenant est devenue la véritable maîtresse de l’Union européenne. Il faut vraiment avoir des œillères pour ne pas voir que la France est en déclin accéléré. Il y a beaucoup de Français qui le mesurent. 

Maintenant, il faut savoir ce que l’on fait. Et il ne suffit pas de tenir des propos de comptoir et de dénoncer une situation pour être élu. Je pense que les Français doivent non pas élire quelqu’un qui est un bonimenteur ou un beau parleur, comme ça a été le cas en 2017, mais quelqu’un qui a un programme très compréhensible et compatible avec les engagements internationaux auxquels il se soumet ou auquel il ne se soumet pas.

Q : Vous êtes un fervent partisan du FrexitEst-ce que vous ne pensez pas que c’est une idée un peu tombée en désuétude depuis que l’Union européenne a adopté un plan de relance commun de 750 milliards d’euros, ce qui est quand même une somme considérableet qu’à la sortie de l’hiver, 51% des Français sont prêts à lui faire confiance ?

R : Vous me demandez de réagir à partir d’éléments conjoncturels sur une situation structurelle. L’affaire de ce plan de relance est à mon avis largement surévaluée. Il s’agit de faire du chiffre. Si on regarde cela de façon minutieuse, c’est une catastrophe pour la France, puisque l’on va bénéficier d’un montant venant de Bruxelles très inférieur à ce que cela va nous coûter. C’est bénéficiaire pour les pays qui sont bénéficiaires nets mais pour les pays comme la France qui sont contributeurs nets c’est un véritable scandale financier

La popularité de l’Union européenne, moi j’y croirais quand on aura fait des référendums. La popularité de l’Union européenne, même si il était vrai qu’elle était de 51%, ce dont je doute, est quand même très faible quand vous songez que toute opposition structurée et essentielle, au sens de l’essence même, de l’idée même, de construire l’Europe, cette pensée est interdite. Quand vous avez en France des partis dits « d’opposition », comme le Rassemblement national, la France insoumise, Debout la France, LR, ou même comme Zemmour, comme Montebourg, pour la présidentielle. Tous ces gens sont pour l’Europe. Moi j’ai très peu accès aux grands médias, heureusement qu’il y a Internet. Donc comment voulez-vous que les Français qui ne sont pas le nez sur les dossiers, qui font confiance au Parti communiste, à la France insoumise, au Front national… ne suivent pas les conseils des gens qui dirigent ces partis ? 

Lors du référendum de 2005, il y avait le oui et le non. Et donc les partis politiques disparaissaient un peu. Et donc on a eu 55% de non. La construction européenne a été refusée par les Français. Or comme c’était la concaténation de tous les traités européens antérieurs, on peut dire que depuis 2005, la Construction européenne a un véritable problème de légitimité en France. Alors certes, on va me dire que le traité de Lisbonne était la mise en œuvre d’un engagement de Nicolas Sarkozy dans son programme de 2007. Mais c’était écrit en tout petit. Et les Français au deuxième tour de 2007, ils ont voté pour Sarkozy contre Ségolène Royal, ils n’ont pas voté pour l’adoption d’un traité qui était le même que celui qu’ils avaient rejeté. Il y a eu un tour de passe-passe. C’est pour ça que je pense que si les Français bénéficiaient d’un véritable débat approfondi, où tout le monde puisse exposer ses points de vue, la situation serait extrêmement tangente.

Je rappellerais qu’en janvier 2018, Emmanuel Macron, nouvellement président de la République, s’est rendu en Angleterre pour signer un traité avec Mme Theresa May, Première Ministre, dans lequel il était question de régler le problème de Sangatte et des migrants. À l’issue de cet entretien, il a été interviewé par la BBC, qui lui a demandé, s’il y avait un référendum sur le Frexit, quel en serait le résultat. Et Emmanuel Macron président de la République, a répondu « très probablement, le Frexit l’emporterait ». Je vous rappelle d’ailleurs que c’est très difficile de retrouver cette interview sur Internet, ça a été assez nettoyé, on l’a mise de côté. Cela veut dire qu’au plus haut niveau de l’État, on sait bien qu’il y a un problème, qui se répand dans toute l’Europe, en Grèce, en Hongrie, en Pologne, en République tchèque, en Allemagne. Sans compter les pays qui ont refusé d’entrer dans l’Union européenne. Je pense à l’Islande, à la Norvège, à la Suisse. Donc je pense qu’au contraire, sur moyen terme, le mouvement général est plutôt à la dislocation.

Q : En ce qui concerne la politique nationalevous vous êtes exprimé à la fois contre le vaccin et contre le passe sanitaire, il me sembleJ’aimerais savoir, comment vous comptez lutter contre la crise sanitaire si vous êtes élu président

Je n’ai pas eu la même position, que je juge excessive, que Florian Philippot ou Nicolas Dupont-Aignan. Je n’ai d’ailleurs jamais manifesté avec eux. Je suis contre le passe sanitaire parce que c’est inefficace, d’ailleurs il y a très peu de pays du monde qui font ça, et les résultats en France sont tout sauf convaincants, puisque vous savez que quelqu’un peut très bien avoir été vacciné et être porteur du virus et contaminer autour de soi. Donc je suis contre ça parce que par ailleurs, ce qui se profile derrière, c’est une société de contrôle qui pourrait aller jusqu’au contrôle à la Chinoise.

Sur le vaccin en revanche, je n’ai jamais été contre le vaccin. J’ai été toujours pour la liberté vaccinale. Je dis d’ailleurs ce que disent beaucoup de professeurs, les médecins raisonnables, c’est-à-dire que pour les personnes à risque ou les personnes âgées au-dessus de soixante-cinq ans, le bénéfice risque va dans le sens du vaccin. Donc, il faut que les gens se fassent vacciner. Ce que je souhaite, en revanche, c’est que les gens aient la liberté du vaccin à choisir. En France, en réalité, c’est quasiment le vaccinARNm obligatoire, et plus particulièrement le vaccin de Pfizer. Il y a quand même d’autres vaccins dans le monde, le vaccin russe, le vaccin chinois, le vaccin cubain, peut être le vaccin Valneva, l’entreprise française, qui, semble-t-il, vient de franchir avec succès le stade trois de l’expérimentation. Voilà, ce que je souhaite, c’est que les gens puissent avoir la liberté vaccinale et la liberté de choix de leur vaccin. 

Maintenant, je suis contre la vaccination obligatoire, notamment pour les enfants. Parce que pour les vaccins, là je suis d’accord avec ceux qui les critiquent, il n’y a encore pas de mise sur le marché définitive. L’accord définitif de l’ANSM (ndlr : Agence Nationale de sécurité du médicament) est prévu pour 2022 ou 2023. Donc je trouve quand même extraordinairement dangereux, et un pari extrêmement choquant, que de forcer les gens à être vaccinés avec un vaccin qui en est, qu’on le veuille ou non, encore au stade expérimental. D’ailleurs, on découvre, même si ça reste des cas très marginaux, des cas du myocardite, de maladies à prions… Or toute l’histoire du vaccin a montré qu’il fallait quand même souvent avoir plusieurs années de recul pour voir quels étaient tous les effets. Je pense par exemple aux vaccins H1N1, on a découvert au bout d’un an ou deux que ça provoquait chez un certain nombre de gens la maladie du sommeil. 

Q : Et donc quelle serait votre politique sanitaire si vous étiez élu président ? 

R : Déjà, il faut là aussi remettre du budget. C’est absolument scandaleux qu’en pleine pandémie, on ait fermé cinq mille sept cents lits au cours de l’année 2020. C’est incroyable quand on y réfléchit. Je pense qu’il faut prendre toute une série de mesures qui redonnent aux Français confiance dans la médecine. Déjà, arrêter de démolir les hôpitaux publics. Deuxièmement, éclaircir tous les problèmes de conflits d’intérêts. Cela veut dire notamment l’interdiction absolue pour des gens qui travaillent dans un l’hôpital public, professeur ou médecin, de recevoir quelques fonds que ce soient de grands laboratoires pharmaceutiques. Cela veut dire également favoriser la recherche française. Cela veut dire également introduire de la transparence dans les choix qui ont été faits. C’est quand même incroyable que les grandes décisions aient été prises par Macron dans un conseil de défense, alors même qu’on ne sait pas quel a été le verbatim. Et que si j’ai bien compris, ça va être protégé pendant cinquante ans. C’est absolument incroyable, sur un tel sujet il faut être d’autant plus transparent. 

Il faut également favoriser une renaissance d’une industrie pharmaceutique nationale favorisant une certaine éthique. Caron voit bien qu’il y a une tendance maintenant, en Occident en général, en France en particulier, pour pousser systématiquement à l’adoption des médicaments les plus chers qui soient. Il faut vraiment redonner aux Français confiance dans la médecine.