Tribune : l’intégrité, portée disparue ?
La Péniche donne la parole aux syndicats étudiants et aux sections des partis politiques. Nos colonnes leur sont ouvertes pour publier tribunes et droits de réponse dans notre rubrique « Tribunes« .
Aujourd’hui, Solidaires SciencesPo signe un droit de réponse suite à la publication de notre article « Solidaires, portés disparus ? » dans le cadre de la campagne des élections syndicales.
A propos de « Solidaires, portés disparus ? »
Erratums et droits de réponses fleurissent sur La Péniche ! En attendant (désespérément) que cette floraison fasse comprendre aux marins d’eau douce que leur pratique du journalisme pose un chouia problème, nous souhaitons exercer le nôtre, de droit de réponse. Autant prendre l’exercice de bon cœur : l’an dernier, vos bêtises nous avaient donné l’occasion de publier un petit tutoriel sur les thèmes de l’autogestion et de l’autodéfense.
Visiblement, tout n’a pas été compris par la nouvelle génération de « journalistes », aussi nous vous encourageons chaleureusement à vous y reporter – on oublie si vite, en un an. Vous y trouverez une petite clarification sur les accusations de violence et l’amalgame au syndicat de Nanterre (salut, chefs !) qui sont ressassés dans l’article version 2015, mais avaient déjà cours en 2014 – c’est que ça radote, moussaillon.
Pour tout vous avouer, nous en avons un petit peu marre de nous voir toujours contraint-es de nous expliquer sur notre supposée violence. Non pas que tout ceci soit inintéressant ou so 2014, mais, voyez-vous, nous cultivons la prétention d’avoir des choses à dire sur différents sujets.
Cette année, donc, renouvelant nos gentils efforts de pédagogie, notre traditionnel droit de réponse aborde une autre des thèses de La Péniche que nous jugeons lunaire et diffamatoire : cette curieuse obstination à nous associer à tous les groupes antifascistes de la terre. La Péniche écrit ainsi : « Le syndicat entretient au fond moins de liens avec l’UNEF qu’avec le CAPAB, un groupe violent d’”action anti-fasciste” (…)Interviewé par les Inrocks, un militant de l’Union Antifasciste toulousaine affirmait ainsi que les antifas « ne rejetaient pas totalement la violence physique, au nom d’une démarche d’autodéfense. ». Sur la Horde, le site des antifascistes, le même discours est tenu : « la violence est un mal nécessaire dans le cadre d’une lutte qui se veut autonome ». » Cela appelle, si vous nous le permettez, une petite mise concernant l’indépendance syndicale, pour les nuls.
De l’importance journalistique d’interroger le lien entre organisations politiques et organisations syndicales
Commençons par vous accorder une chose : le lien entre les organisations politiques et les organisations syndicales est un sujet non seulement fascinant, mais crucial d’un point de vue démocratique. C’est pour le moins notre avis. Le saviez-vous ? Il a le malheur d’être plutôt peu partagé par les deux autres principaux syndicats, l’UNI et l’UNEF. Leurs directions sont en effet inféodées, respectivement, à l’UMP et au PS. On précisera que, en ce qui concerne les militant-es « de base », cette inféodation n’est pas aussi monolithique (au moins en ce qui concerne l’UNEF, mais nous ne sommes pas certain-es de l’existence même de tel-les militant-es à l’UNI…).
L’UNEF se trouve en effet être le théâtre de conflits politiques et politiciens entre ses différentes tendances, qui ne sont autres que ses différentes composantes partisanes : en gros, le PS (lui-même divisé entre sa tendance « droite » et sa tendance « gauche ») s’oppose au PC (ou au Front de Gauche si l’on veut) qui s’oppose au NPA, et tout réciproquement dans l’autre sens.
« A l’UNEF, pour peser dans les rapports de force internes, les partis se prêtent alors au jeu des fausses cartes, ce qui leur permet de lever des contingents d’adhérent-es fantômes »
Pour peser dans les rapports de force internes, les partis se prêtent alors au jeu des fausses cartes, ce qui leur permet de lever des contingents d’adhérent-es fantômes votant les décisions d’orientation. Les échanges financiers peuvent par ailleurs être beaucoup plus officiels, ou à peine dissimulés (comme dans le cas du financement par la réserve parlementaire). Ils peuvent aussi prendre une forme plus indirecte : c’est le cas où le militantisme étudiant est contrôlé et contenu par la promesse de tel ou tel poste dans tel parti, pour telle personne, dans tel cabinet.
Notre conception de l’indépendance syndicale
Ces tractations posent la question de l’intégrité morale des personnes qui s’y engagent, ce qui est une chose. Mais surtout, elles posent la question de l’intégrité spécifiquement syndicale de ces organisations, dans la mesure où elles empêchent fonctionnellement UNI et UNEF de jouer le rôle que nous reconnaissons à un syndicat : celui d’un contre-pouvoir, pas d’une courroie de transmission des politiques gouvernementales.
Comme le dit la belle charte piquée à notre grande sœur SUD PTT : « Là où la vocation d’un parti politique est d’accéder au pouvoir, et donc, nécessairement, d’y effectuer des arbitrages entre les différentes composantes de la société, [nous entendons] être en toutes circonstances un outil des [étudiant-es] au service des [étudiant-es], une organisation syndicale pluraliste se donnant comme objectif de construire avec elles et eux un véritable contre-pouvoir face aux gouvernements et aux partis politiques, quels qu’ils soient. »
Chère Péniche, nous sommes indépendant-es, et c’est une des choses qui nous distinguent le plus nettement de l’UNI et de l’UNEF. Nous ne sommes le jouet d’aucun groupe politique, et nous en sommes assez fièr-es
Chère Péniche, nous sommes indépendant-es, et c’est une des choses qui nous distinguent le plus nettement de l’UNI et de l’UNEF. Nous ne sommes le jouet d’aucun groupe politique, et nous en sommes assez fièr-es – des partis, donc, mais aussi des groupes antifascistes qui semblent n’avoir cessé de vous obséder depuis belle lurette. Nous pensons que notre indépendance est une des garanties de notre intégrité : celle-là même qui nous pousse à reconnaître nos erreurs, à ne pas prétendre que nous faisons plus que ce que nous pouvons…
Celle-là même qui a des hauts-le-cœur lorsque vous présentez négligemment un meurtre politique, dont vous savez qu’il nous a personnellement touché-es, comme une « rixe ». Car il semble bien que, de votre côté, l’intégrité ait été passée par dessus bord.
Dans la même catégorie : « Comprendre enfin les élections syndicales en 4 points » Ce jour dans l’année qu’évoque Victor Hugo est, à Sciences Po Paris, celui des élections syndicales. Mieux, il ne s’agit pas seulement d’un jour, mais de deux jours – les mardi 10 et mercredi 11 février – durant lesquels le peuple estudiantin de Sciences Po, dans tous les campus, par-delà les mers et les continents, se déplacera tout entier vers l’isoloir pour désigner ses représentants. . Lire la suite.
One Comment
Anonyme
Hihi, le CAPAB, mais où ils sont allés chercher ça ?