Stéphane Le Foll était l’invité du Grand Oral : retour en 5 points

 

Pour sa rentrée, le Grand Oral recevait hier soir Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture et porte-parole du Gouvernement. En cette semaine de primaires de la gauche, l’allié de François Hollande n’a pas quitté son poste et a déroulé une soirée tout en contrôle. Retour en 5 points sur sa prestation !

Un fidèle provincial

Elu un peu « par hasard » conseiller municipal à 23 ans, fils d’instituteur et petit-fils d’agriculteurs, il pense d’abord à replanter des arbres plutôt que de parler ou d’écrire. Stéphane Le Foll devient directeur de cabinet lorsque François Hollande est nommé premier secrétaire du Parti Socialiste en 1997. Directeur de campagne jusqu’en juin 2011, il se définit comme l’un des principaux architectes de la victoire de la gauche aux présidentielles de 2012.

Il a fait « tout ce qu’[il] a pensé devoir faire » au premier poste du ministère de l’agriculture, sans fléchir devant les crises agricoles. « J’ai essayé de faire comprendre que la question écologique n’est plus une contrainte, mais un atout qu’il faut combiner à l’économie ».

Lorsque l’intervieweur de La Péniche Loris Boichot souligne sa grande fidélité, notamment en remarquant sa place dans les records de longévité en tant que ministre de l’agriculture, il répond à demi-sourire : « Notez-le bien, car vous n’êtes pas sûr d’en trouver un autre comme moi. »

L’humanité se nourrit de viande depuis bien longtemps… « C’est un peu l’histoire de la vie, il y a toujours eu des herbivores et des carnivores. »

Les animaux sont-ils doués de sensibilité ? C’est à partir de cette question que Stéphane Le Foll a été amené à s’exprimer sur sa conception de l’animal.

« Mon grand-père avait cinq vaches et un hectare. On tuait le cochon dans le jardin, ça faisait parfois du bruit… je ne parle pas des poules ! ». Ainsi, il estime qu’il est dans l’ordre des choses d’intégrer la viande dans notre alimentation. Il est cependant nécessaire de remettre de l’ordre dans ce système de production, selon lui. Par exemple, les animaux de pâturage ne peuvent pas devenir des animaux qu’on enferme. De son point de vue, il faut aussi renforcer le cadre législatif pour davantage surveiller les différentes étapes de production jusqu’à l’abattage et ainsi éviter la souffrance des animaux.

La précaution de la langue de bois

On ne va pas se mentir, à quelques jours du second tour des primaires, la langue de bois était de sortie et bien annoncée : « En politique, il y a deux positions : celle du commentateur et celle de l’acteur. Je n’ai pas l’intention d’être acteur dans cette primaire. » lance-t-il d’entrée de jeu. Constamment réticent à discuter des présidentielles et à donner des nouvelles du vote du Président, il ajoute : « J’ai pris la décision de prendre du recul, de ne pas m’engager dans la campagne. » Interrogé sur les journalistes, il leur reproche d’enchaîner des questions à un rythme toujours accéléré qui en fait perdre leur sens, tout comme le sens de la réponse : « Il faut essayer de ralentir le système. » Ainsi, il n’hésite pas à reprendre l’interlocuteur Benjamin Duhamel en faisant sourire la salle lorsque celui-ci ne lui laisse pas le temps de finir. De même, lorsque Hugo Travers évoque les « fake news » notamment relayées par Donald Trump : « On balance de l’info, personne ne vérifie, et on passe à la question suivante. On a l’impression que prendre le temps devient insupportable. Il faut garder le temps du recul pour analyser les rumeurs. »

 

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Stéphane Le Foll interviewé par Loris Boichot lors du Grand Oral

 

Une primaire aux deux gauches irréconciliables ?

Stéphane Le Foll n’a pas échappé aux questions d’intention de vote et de pronostics. A demi-mot, il a ainsi écarté Benoît Hamon, tout comme il avait écarté Arnaud Montebourg « pour avoir porté la fronde pendant cinq ans. » Au fil de son intervention, on comprend que sa préférence se tourne bien vers Manuel Valls, avec lequel il entretient une relation cordiale mais de confiance, ternie par certains « coups tordus » que l’ancien premier ministre lui aurait portés. « J’ai toujours été correct, donc je reste correct et le resterai toujours ».

Stéphane Le Foll n’a jamais clairement énoncé sa position vis-à-vis des différents candidats à la présidentielle, se justifiant par sa stature de porte-parole du Gouvernement. Lorsqu’il lui est demandé son avis au sujet des deux projets de gauche portés par Manuel Valls et Benoît Hamon, il ne se délie la langue que pour mettre en doute la stature de Benoît Hamon. « S’il s’est présenté, c’est qu’il pense avoir la stature. Mais la stature, ça s’acquiert ». Au sujet des électeurs de Manuel Valls qui s’apprêtent à soutenir Emmanuel Macron dans le cas d’une victoire de Benoît Hamon, il réaffirme sa position d’indifférence à l’égard de ces deux derniers : « Il ne faut jamais être trop pressé, et toujours réfléchir ».

Un débat paisible sur l’Europe menacée de dislocation

Stéphane Le Foll gagne en enthousiasme à l’heure du débat face à Henri Guaino. Ce dernier, bien présent, fait son possible pour tenter quelques confrontations dans ce qui ressemble davantage à une interview en duo. Le sujet de l’Europe a été notamment discuté.

Interrogés par Benjamin Duhamel, les deux hommes politiques partagent une même inquiétude au sujet de l’état du monde.

« Si chaque pays s’estime plus important que l’autre dans un même temps, les seules issues sont le nationalisme et la guerre. Si personne n’est prêt à céder, qui traitera le réchauffement climatique à l’échelle de la planète ? Qui prendra en compte l’intérêt général ? » demande Stéphane Le Foll. L’essence de l’Europe fait aussi plutôt consensus : selon les débatteurs, elle se trouve dans la défense des intérêts des européens au milieu des conflits commerciaux et de la nouvelle économie toujours plus mondialisée, dans le respect des libertés et des droits fondamentaux.

C’est à ce stade que leurs opinions divergent : pour Henri Guaino, il faudrait continuer le projet européen en prenant davantage en compte les particularités de chaque pays : « Il faut que chacun mène la politique de sa société, de sa démographie. C’est la coopération qui compte, il faut jouer sur la complémentarité. » Stéphane Le Foll, quant à lui, souhaite aller plus loin dans l’intégration européenne : « Quels sont les moyens donnés à l’Europe ? On verse le moins possible pour recevoir le plus possible. Certains Etats refusent de céder pour leur souveraineté. Il faudrait davantage s’engager, et sur d’autres sujets ».

Pour qualifier un bon porte-parole du Gouvernement, Stéphane Le Foll choisit la simplicité et la cohérence : « Ce n’est pas une liberté qui m’a été donnée. On m’a plutôt assigné la contrainte de faire passer des messages qui étaient ceux du Gouvernement. Ainsi, j’ai répondu à toutes les questions en essayant de garder la cohérence gouvernementale ». C’est ainsi qu’il se place : coincé dans les sillons du Gouvernement qu’il représente.

Nous vous donnons rendez-vous pour le prochain Grand Oral !

Pour revoir l’intégralité du Grand Oral de Stéphane Le Foll