Najat Vallaud-Belkacem à Sciences Po, l’égalité des conditions pour un monde plus juste
L’ancienne ministre de l’éducation Najat Vallaud-Belkacem était présente à Sciences Po la semaine dernière dans le cadre d’une conférence organisée par le Parti Socialiste-Sciences Po, et ayant pour thème l’égalité des chances dans le cadre scolaire. Cette dernière a pu revenir notamment sur la réforme du collège menée sous le quinquennat de François Hollande ainsi que s’exprimer sur la réforme du lycée menée par l’actuel ministre de l’éducation Jean-Michel Blanquer.
Organisée sous la forme d’un échange de question-réponse, la conférence s’est distinguée par la pertinence des problématiques soulevées et des débats engendrés.
Tout d’abord, Najat Vallaud-Belkacem a souhaité clarifier un enjeu majeur de la discussion : elle n’aime pas le terme « d’égalité des chances », qui nierait selon elle le contexte social dans lequel baignent les individus.
Si le mérite a pour elle son importance dans la réussite scolaire, il ne fait pas tout et ne suffit pas à balayer à lui tout seul les enjeux de réussite à l’école. Outre ces préoccupations sémantiques et théoriques, nous sommes rentrés directement dans le vif du sujet lorsque l’ancienne ministre a été prise à partie sur la réforme du lycée et la suppression des filières, ainsi que sur la présence d’un grand oral au baccalauréat. L’invitée du soir a souhaité réhabiliter l’utilité des filières au lycée, et mettre en garde contre la réforme actuelle, susceptible d’orienter trop tôt (dès la classe de seconde) les élèves. A 15 ans seulement, un âge où l’on manque potentiellement de maturité, des choix effectués trop tôt pourraient influencer le parcours professionnel post-bac de lycéens encore en plein questionnement. Elle juge aussi que le grand oral du baccalauréat est indéniablement discriminant car les élèves n’y sont pas préparés.
La conférence a été aussi l’occasion d’aborder des thèmes tels que la lutte contre les violences sexistes et sexuelles à l’école ou la réforme des programmes. Constatant l’échec des abécédaires de l’égalité sous François Hollande, accusés d’inculquer la « théorie du genre » à l’école, Najat Vallaud-Belkacem a pu ajouter que le mouvement #MeToo et les récentes affaires de La Ligue du LOL montrent une volonté d’afficher une totale intransigeance envers les violences faites aux femmes, intransigeance encore en bourgeonnement pendant le précédent quinquennat socialiste.
Il faut aussi selon elle réformer les programmes, même si ce sont des réformes passionnelles qui cristallisent les tensions, afin d’inclure plus de femmes et de personnes issues de l’immigration.
La seconde partie de la conférence a été l’occasion pour des associations de Sciences Po en lien avec l’éducation de prendre la parole et d’interroger l’ex-ministre.
Des membres Des Territoires aux Grandes Ecoles, Ariane, Ambition Campus et Prométhée Education se sont ainsi succédé sur la scène de l’amphithéâtre Emile Boutmy.
Ces échanges ont permis de mettre en lumière des problématiques telles que l’inégal accès aux grandes écoles dans les territoires ruraux isolés, l’importance du milieu social dans la réussite ou encore la définition même de la « réussite », se cantonnant trop souvent à des trajectoires scolaires rectilignes dans des prépas ou des grandes écoles, niant les filières d’études technologiques et le mérite qui pourrait y être associé.
En bref, la conférence a montré une ancienne ministre sans langue de bois, lucide et clairvoyante face aux problèmes d’égalité dans le milieu scolaire. Si Najat Vallaud-Belkacem a pu montrer que l’école ne peut pas tout résoudre en matière d’égalité des chances, elle réaffirme qu’elle n’en demeure pas moins un vecteur imparfait, certes, mais ô combien nécessaire de mobilité sociale.
Sabine Audelin