À Sciences Po, le CEO de Google annonce l’accélération de l’internet mobile

Lors de son premier événement public en Europe en tant que CEO de Google, Sundar Pichai a défendu Apple dans sa défense du chiffrage de mobiles, et annoncé une aide de 27 millions d’euros pour des projets média innovants en Europe.

Des cubes multicolores sur la scène de l’amphithéâtre Boutmy, un prompteur, un système vidéo spécial : pour la première visite en Europe et en France du nouveau CEO de Google, Sundar Pichai, Google et Sciences Po ont mis les gros moyens. Au bout des 40 minutes de conférence – dont 20 de discours et 20 de débat avec le public – trois annonces majeures sont faites. Google veut accélérer, crypter et innover.

© Yann Schreiber

Sundar Pichai a annoncé mercredi à Sciences Po le lancement mondial du format « AMP »(« Accelerated Mobile Pages »), qui devrait permettre en chargement d’articles sur mobile quatre fois plus rapide, en utilisant dix fois moins de données. Le format, lancé avec des éditeurs partenairs dans six pays européens, dont la France, l’Allemagne, le Royaume Uni, et la Russie, est une réponse aux « Instant Articles » de Facebook, qui permettent un chargement quasi-instantané de contenus depuis l’application.

« Je suis ravi que des partenaires français rejoignent AMP aujourd’hui – parmi eux TF1, Les Échos, Ouest France, 20 Minutes et des centaines de partenaires dans le monde. Il s’agit d’un projet prioritaire pour Google. »

Les contenus AMP seront aussi mis en avant dans la recherche Google via un « carrousel » de contenus – une innovation qui plaira forcément aux éditeurs associés au nouveau format.

 

Google se range du côté d’Apple contre le FBI

Le chef de Google a aussi défendu son concurrent Apple dans une bataille juridique outre-Atlantique. Un juge fédéral a demandé à Apple d’aider le FBI à accéder le téléphone portable d’un des tireurs des attentats de San Bernardino. Apple a refusé de se plier à cette demande.

« La confidentialité des données est au coeur de ce que nous faisons »

© Yann Schreiber

Même si Google a collaboré et continuera de collaborer avec les autorités pour des « demandes valides légalement », Pichai s’est opposé à la création de « portes dérobées » dans les produits de Google, dont Android.

La création d’accès spécifiques inclus dans les systèmes d’exploitation faciliterait, selon certains experts, les activités des hackers ou des services de renseignement, sans que ceci soit nécessairement contrôlé par un juge. D’autres argumentent que de telles « portes dérobées » seraient nécessaires dans la lutte contre le terrorisme. Dans la soirée, le New York Times a d’ailleurs révélé qu’Apple travaillerait déjà sur un système de cryptage encore plus performant.

 

27 millions d’euros pour l’innovation journalistique européenne

La première visite en Europe de Sundar Pichai s’accompagne aussi d’investissements pour l’innovation dans les médias, via la « Digital News Initiative », un nouveau fond Google présenté en octobre dernier. Doté de 150 millions d’euros, il vise à financer des projets numériques innovants dans le journalisme. 128 idées innovantes dans 23 pays en Europe recevront au total 27 millions d’euros.

Google essaye ainsi de se positionner comme collaborateur par rapport aux éditeurs, pour changer son image de géant arrogant, puissant et imposant. Le nouveau format pourra par exemple s’adapter à certaines demandes spécifiques d’un média, notamment autour d’une « paywall » (contenus réservés aux abonnés).

Pichai a aussi annoncé la mise à disposition gratuite par Google d’un système de protection contre les cyber-attaques à « tous les éditeurs indépendants du monde ». L’outil, appelé « Project Shield », permettra à des sites de se protéger contre les attaques par déni de service (DDoS) en ayant recours à la technologie Google. « Google est ciblé tous les jours », indique Pichai. L’entreprise a donc développé des capacités uniques pour se protéger contre de telles attaques, explique son PDG.

Sundar, qui doit se rendre à Bruxelles aujourd’hui, est par contre resté flou sur la situation fiscale de Google, affirmant que Google respectait les lois dans tous les pays dans lesquels l’entreprise opère. Sundar a cependant plaidé pour une simplification du système fiscal mondial. Peu après la conférence, l’AFP a cependant révélé que la France réclamait à Google une somme 1,6 milliards d’euros d’arriérés d’impôts.

© Yann Schreiber

Dans le cadre de sa tournée européenne, Sundar sera jeudi à la Commission Européenne à Bruxelles pour une réunion avec la commissaire de la concurrence, Margrethe Vestager. Les services européens enquêtent depuis plusieurs années contre Google pour abus de position dominante sur le marché de la recherche en ligne.

Le jeune Sundar, qui était à la tête du développement de Google Chrome et d’Android avant de devenir PDG de Google en août lors de la restructuration de l’entreprise, devra donc lutter contre amendes, sanctions, et enquêtes européennes, qui pourraient bien mettre à mal le géant d’internet dans sa course au marché mobile.