Les Républicains dans une Bruxelles européenne

Le voyage organisé par Les Républicains de Sciences Po a été intégralement financé par le Parlement Européen à travers le parrainage d’un député européen. À travers ce récit de voyage, je tiens à saluer l’association qui a organisé ce voyage et remercier les institutions européennes pour leurs politiques d’incitations à la découverte.

Banlieue de Paris, 4h30.

Alors que la nuit s’éternise et que la ville dort encore, j’attends le Noctilien chargé de me mener aux portes de Paris desquelles je récupère le premier tramway pour parvenir – après une course avec le RER – à la Gare du Nord. Il n’est pas encore cinq heures, Paris ne s’éveille pas davantage, les inscriptions pédagogiques sont fraîchement terminées, et ce matin, je suis de la France qui se lève tôt. Celle des 3-8, des mines endormies, où les cadres et les ouvrières et ouvriers sont toutes et tous soumises et soumis à la même oppression, drôle de convergence des luttes contre la fatigue par le miracle de la caféine.

Toutefois, ce n’est pas à cette lutte hélas quotidienne que je participe. Le quai numéro huit de gare du Nord accueille en cette matinée de janvier le train Thalys 9303 à destination de Bruxelles. Devant cette prouesse d’ingénierie patientent vingt-quatre étudiantes et étudiants de Sciences Po Paris. Toutes et tous semblent partager les valeurs de la droite et du centre. Leur enthousiasme vis-à-vis desdites valeurs est, cependant, fort hétérogène. Si beaucoup sont des militants de la première heure, d’autres ont simplement voulu saisir l’opportunité d’un tel voyage à la découverte des institutions européennes, sans pour autant adhérer pleinement aux idées du parti de Laurent Wauquiez. Néanmoins, il résonne étrangement dans ce groupe une communion, une célébration nouvelle de valeurs communes. L’Europe, la Paix.

L’aventure commence à l’aurore

Pourquoi organiser un voyage à Bruxelles ? « C’est une promesse de campagne », me confie Omar Ben Abderahmen, le président de la section des Républicains à Sciences Po. Il me fait remarquer qu’à sa connaissance, et au moment où il avait pris la décision, aucune association de Sciences Po n’a mis sur pied une visite du Parlement Européen ou de la Commission, à sa grande déception (NDLR : les Jeunes Européens de Dijon organise chaque année un voyage à Bruxelles en février). Chaque député européen pouvant subventionner un voyage regroupant une centaine de personnes par année, la prise en charge des frais peut être assurée et seule une participation symbolique a alors été demandée. Une réelle opportunité pour beaucoup qui souhaitaient se familiariser avec les institutions européennes alors méconnues pour beaucoup, y compris pour moi.

J’ai ainsi suspendu un temps mes préjugés et la vision bien réduite et souvent contradictoire que j’avais de la droite, pour suivre une aventure humaine, consacrée – au sens presque religieux comme au sens commun – aux institutions européennes de la capitale belge. Deux jours de rencontres, découvertes et discussions autour de l’Idée européenne, de la responsabilité de la jeunesse et de son avenir. Accompagné du talentueux Jacques Brel dans les oreilles, je me suis laissé prendre au jeu et parti à la rencontre des femmes et des hommes qui font les Républicains de Sciences Po Paris.

Une île au large de l’espoir

Alors que le petit matin se dessine et que nous arrivons dans la capitale belge, nous voyons soudain l’Europe se matérialiser devant nos yeux. Dans le quartier européen, une véritable ville dans la ville, les rues sont bordées de nombreux drapeaux nationaux et internationaux qui témoignent des délégations nationales, bureaux de cabinets de conseils et de groupes d’influence qui ont pignons sur rue (les fameux « lobbys » représentent la moitié des travailleurs du quartier) et bien entendu les institutions européennes qui symbolisent le centre névralgique du quartier avec la Commission et le Parlement. Car si ce dernier siège à Strasbourg en séance plénière, la majorité du travail des députés se fait à Bruxelles.

C’est d’ailleurs le parrain du groupe, Jérôme Lavrilleux, élu européen au PPE – le Parti Populaire Européen réunissant les mouvements de centre-droit –, qui nous fait la visite des lieux. L’ancien directeur de cabinet de la présidence de l’UMP et directeur adjoint de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2012 se charge de la présentation du Parlement et de son travail, tout en évoquant une culture du compromis propre au Parlement Européen, où n’existe aucune majorité. Les discussions avec les étudiants sont riches, et témoignent d’une rencontre privilégiée. Sont abordés des sujets tels que la défense du marché unique, la question de l’harmonisation des normes, échanges sur sa vision de la politique nationale, mais aussi l’« affaire Bygmalion » qu’il a lui-même tenu d’aborder.

L’après-midi laisse place à une rencontre avec des assistants parlementaires. Durant plusieurs heures, nous constatons l’impressionnante technicité des sujets et l’approche très concrète du travail parlementaire. Le principe de réciprocité dans le commerce international, la réforme de la Politique Agricole Commune, celle du statut lié aux travailleurs détachés… Autant de sujets appelant à un travail très précis pour aider les parlementaires à prendre la décision qu’ils et elles estiment la meilleure. Parmi l’assemblée passionnée et réunie autour de la table de réunion, on sent émerger de nouvelles vocations, alors que d’autres se confirment.

Avec des cathédrales pour uniques montagnes

Après une courte nuit, le groupe se rend au siège du PPE, toujours dans le quartier des institutions européennes pour une rencontre que beaucoup qualifient d’« unique » et d’« impressionnante » : Joseph Daul, le président du PPE. L’un des hommes les plus influents du parlement européen nous accorde une heure d’échanges enthousiastes sur les visions défendues par le PPE. Avenir de la droite avec Macron, réfugiés, engagement militant, nombreux sont les sujets abordés.

« Il y a un fossé qui s’est creusé entre les élites et le peuple. Faites des études, mais soyez toujours à l’écoute. » Joseph Daul, président du Parti Populaire Européen

S’en suit alors une discussion plus politique avec Andrianos Giannou, président des jeunes du PPE, en vue des élections européennes de 2019. L’anglais ayant remplacé la langue de Molière, nos compères se font plus timides, mais le personnage au parcours plus qu’européen – d’origine roumaine, ayant étudié en Grande-Bretagne puis milité sans relâche dans les mouvements européens – parvient largement à retenir les attentions. Après un rapide tour à la Commission Européenne, où découvrons l’architecture imposante de l’organe exécutif de l’institution, il est temps de revenir à Paris, moins de quarante-huit heure après l’avoir quittée. Une divagation européenne, qui habitera l’esprit de nombreux d’entre nous.

On n’était pas du même chemin mais on cherchait le même port

Que retenir de ce voyage ? D’abord, son intensité. Le sommeil était clairement l’une des choses ayant fait le plus défaut, mais ce n’était qu’un prix à payer pour bénéficier d’un tel programme. Un programme qui fait d’ailleurs très souvent écho aux LR à travers les différentes rencontres, la teinte partisane infusait ainsi l’ambiance de ces deux jours, ce qui n’est au demeurant pas une surprise ni un sentiment négatif. Si la dimension partisane éclairait ce voyage, c’est bien la dimension humaine qui s’avèrera être la plus marquante. Les multiples rencontres, discussions et échanges menées avec des militantes et militants, sympathisantes et sympathisants ou simples curieuses et curieux apportent un esprit d’émulation stimulant et passionnant. Les discordances conjuguent l’humilité intellectuelle à l’exploration des idées. Elles rassemblent autour d’un seul caractère, celui de l’humanisme respectueux et curieux de l’autre.

Un premier voyage des LR Sciences Po visiblement réussi qui annonce la suite : d’autres projets sont déjà sur les rails pour le second semestre à venir. Reste à savoir si l’auto-revendiquée « première association politique de Sciences Po » saura pérenniser une telle dynamique face aux futurs élections et formations politiques du 27 rue Saint Guillaume.