« On vit, et on vit même bien ! » : présentation du bicursus SCUBE
SCUBE. Après SPIV et SMASS, voilà encore un nouvel acronyme de bicursus sur lequel il convient de se pencher. Que signifie-t-il ? Nombreux sommes nous à avoir vainement cherché les noms de « sciences po » et « Pierre et Marie Curie » dans ces cinq initiales. Après quelques autres tentatives d’identification infructueuses (Science Camouflée Utilisée pour Berner les Elèves ?!?), on finit par demander à quelqu’un, vaincus. Tout simplement, c’est S au cube pour sciences et sciences sociales. S3, SCUBE. Évident non ? Pas pour tous. Zoom sur ce double diplôme qui consomme pour la neuvième année consécutive l’union entre sciences « dures » et sciences sociales.
Les moins scientifiques d’entre nous s’imaginent alors une armée d’élèves incompréhensiblement surdoués, aussi communément nommés « geeks » dans un souffle pouvant mêler à la fois terreur, dédain et respect. Mais que sait-on réellement de ce bicursus ? La double formation dure trois ans à l’issue desquels les élèves reçoivent la licence de Paris VI et le bachelor de Sciences Po. En plus de suivre les cours de Sciences Po, les élèves bénéficient de cours de mathématiques (analyse et algèbre), et de sciences (physique chimie et biologie) à l’Université Pierre et Marie Curie. Si les « scubes » doivent survivre aux inconvénients combinés des deux universités (emploi du temps chargé, double charge de travail), ils peuvent aussi profiter d’opportunités supplémentaires (3A à l’étranger, davantage de partenariats universitaires).
Les témoignages de deux 1A, Denia et Loïc, convergent pour parler de « nostalgie du lycée ». Choisir la SCUBE, c’est précisément choisir de ne pas choisir, c’est continuer l’enseignement scientifique en y ajoutant histoire, économie, droit et sociologie, c’est couper la poire en deux entre son pôle littéraire et son pôle scientifique.
Une famille soudée
Contrairement à ce que le niveau d’étude pourrait laisser envisager, l’ambiance est très bonne au sein du bicursus. On est loin de la compétition malsaine que l’on peut retrouver dans certaines prépas, au sein desquelles on a pu relever de fâcheuses tendances à la pyromanie sur les cours et les fiches de ses camarades/adversaires. En SCUBE, c’est tout le contraire : les cours s’échangent et les conseils pleuvent. « Il existe une véritable cohésion entre les 1A et les 2A », explique Denia. En effet, chaque 1A fraîchement arrivé est mis en relation avec un parrain et une marraine de 2A qui sont chargés de guider le jeune étudiant dans l’univers de la SCUBE en les intégrant dans leur communauté. Entre les générations, il règne une ambiance de solidarité et d’entraide rythmée par les petites attentions quotidiennes. Denia raconte : « La veille des galops, on a tous reçu un message d’encouragement de leur part. C’est vraiment bien de les avoir auprès de nous. On peut toujours compter sur eux pour répondre à nos questions ». Chaque promotion se voit progressivement intégrée au sein de ce que l’on pourrait appeler une véritable famille. Plus de 30h de cours, deux universités, deux apprentissages au sein d’un même groupe : celui-ci, d’abord cocon de travail, devient vite une communauté d’amis. Ensemble, cette trentaine d’étudiants doit affronter les contraintes du quotidien imposées par le double diplôme. « Il n’y a qu’en SCUBE que la veille du galop de microéconomie, tu cherches une calculatrice collège car les calculatrices lycées sont interdites lors du contrôle de chimie du soir même ». Forcément, cela rapproche. « Au début de l’année, prenant exemple sur les amphis de Sciences Po, nous avons applaudi à la fin d’un amphi à l’UMPC. Nous avons été les seuls à le faire, car ce n’est, paraît-il, pas dans la tradition de la fac. Ca a été un grand moment de solitude partagé à 35 », raconte Denia. À force de passer du temps ensemble, de partager difficultés et moments d’hilarité, la famille des SCUBE s’agrandit. Une famille hétérogène, composée d’élèves aux personnalités différentes, mais une famille quand même. Un voyage à Amsterdam est en train de s’organiser pour les vacances de décembre, et donne déjà lieu aux premiers désaccords…
Quelle vie pour les SCUBE ?
Pour le science piste « normal », l’étudiant en double diplôme n’a pas de vie, pas de temps, et, tenez-vous bien, pas ou peu de vacances. On a tous un ami en bicu qui ne peut pas rester déjeuner après un éprouvant amphi de microéconomie car il doit enchaîner avec un après-midi branché mathématiques. Pour celui-ci, les exposés d’institutions politiques et les chronologies d’histoire s’ajoutent à des interrogations de mathématiques hebdomadaires ou à l’analyse d’un article scientifique. Face à ce manque de temps apparent, la réaction est immédiate : horreur, pitié, compassion envers l’élève en question. Et pourtant ! Les SCUBES ne semblent pas voir leur vie de la même façon : « On vit, et on vit même bien ! Nous avons tout à fait le temps d’avoir un engagement associatif, de suivre un cours de sport ou d’aller aux soirées organisées par le BDE ! ». Et à Loïc d’ajouter : « Bien sur, nous avons le double de travail à fournir. Mais nous sommes donc obligés d’être doublement organisés ! Alors que les sciences pistes en cursus simple ont une fâcheuse tendance à la procrastination souvent permise par des journées de cours allégées, nous sommes obligés de travailler régulièrement, en temps et en heure, pour ne pas se retrouver débordés. Cela nous permet d’avoir un vrai rythme, partagé entre un travail fait à temps, et les loisirs ». Mais il ne faut surtout pas se méprendre. Surmontable, le bicursus n’en reste pas moins difficile et éprouvant. Il arrive que certains élèves perdent le fil dans une des deux branches étudiées. L’opportunité d’être titulaire de deux diplômes qui combinent les sciences « dures » et les sciences sociales est unique : si l’année universitaire n’est pas validée, l’élève ne peut continuer le double diplôme et se voit contraint de poursuivre sa formation en cursus simple. Loïc le dit lui-même : « On a pas le droit à l’erreur ».
Et après ?
Ce double diplôme au nom farfelu se heurte à une attitude parfois sceptique. Comment couvrir tant de domaines et de matières différentes sans les traiter chacune de manière superficielle ? En réalité, bien que le champ d’études de première année soit large et général, l’élève se spécialise en avançant dans sa scolarité, dès le second semestre de la 1A. Mais ensuite, quels débouchés pour un bicu SCUBE ? Celles-ci dépendent essentiellement du choix de master à l’issue du double cursus. L’intérêt de l’enseignement est de comprendre les enjeux du monde contemporain en combinant diverses approches, scientifiques, sociologiques ou historiques. Les débouchés sont donc nécessairement multiples, tant à Sciences Po qu’à l’UMPC. Cependant, pour continuer l’aspect scientifique, certains s’avancent dans le domaine de la santé publique et d’autres prolongent l’expérience duale par un double master en sciences politiques de l’environnement. La SCUBE prépare au monde de demain et se crée peu à peu une visibilité. De plus en plus nombreux sont ceux qui, attirés par la multidisciplinarité du double diplôme, le préfère à une prépa scientifique.
La SCUBE, c’est un pari risqué. Il faut sans doutes du courage, de la persévérance, et ne pas avoir peur de souffrir d’une double identité, tiraillée entre l’amour des sciences dures et les ambitions sociopolitiques. Mais c’est avant tout une expérience unique, un niveau académicien d’excellence, de l’interactivité, de la curiosité, réunis au sein d’une famille aux visages multiples, unique et solidaire.
5 Comments
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Pierre
Ils ont raison de pas applaudir à chaque fin de cours à l’UMPC. Cette coutume sciencepiste est totalement ridicule.
Alex
Dans la section « Et après », il serait dommage de ne pas mentionner les nombreux Scubes qui ont fait autre chose que ScPo, comme des admissions à l’X, Agro, ENSCP etc et pour qui cette formation très complète leur a été d’une grande aide.
Come Maxime
Je corrige : nous n’avons pas seulement « plus de trente heures par semaine » mais plutôt quasiment quarante… Le plus amusant étant les semaines où on a une soirée du BDE le jeudi soir, amphi de bio à 9h le lendemain matin, un partiel de maths le vendredi soir et un galop le samedi matin !
Mais bon : imaginez 60-70h de travail hebdo, une moyenne variant de 5 (pour moi !) à 8 heures (pour les marmottes !) de sommeil par nuit et 10 matières différentes à travailler, tout ça au sein d’un groupe vraiment extra et solidaire dans la difficulté où vous rencontrerez des gens incroyables, et vous obtenez la scube !
Certes exigeant en temps et en qualité de travail, ce double-cursus est une véritable école de vie, tant du point de vue de l’ouverture d’esprit à des connaissances multiples que pour l’aspect humain, et c’est un bonheur pour moi d’y participer !
Je le conseille vivement à tout lycéen scientifique qui veut faire de sa formation une excellence mais ayant un certain recul sur elle-même (je sais c’est profond ce que je dis) puisque la fac nous fait relativiser sciences-po et réciproquement, tout en évitant de se fermer des portes ni d’être un simple *numéro* noyé dans une promo de 1000 étudiants. Intégrer un double cursus c’est intégrer une communauté et conserver une logique collective d’entraide et non un individualisme type prépa… (formation que la plupart d’entre nous avaient choisi sur APB au cas où ils n’auraient pas été pris)
En un mot : Osez la Scube ! Vous ne le regretterez pas !
PS : Et puis honnêtement, entendre les sciences pistes qui se plaignent d’avoir trop de boulot vous fera bien rire au bout d’1 mois 😉
SCUBE AU POUVOIR ! (But where is Charlie ?)
Valérie
Très intéressant et dynamique. Cela donne envie d’être scube au pays des scubes!