Elections syndicales 2007 : Six questions à… l’UNEF et Nouvelle Donne (I)
Séance de rattrapage pour toutes celles et tous ceux qui n’ont pas eu le temps (ou l’envie, ne nous mentons pas) de :
- lire tous les tracts généreusement offerts actuellement en Péniche ;
- prêter un peu d’attention à la cacophonie virtuelle forumique ;
- participer au débat intersyndical d’hier (mais pour ça, vous avez l’excellent compte rendu de David)
Pour vous inciter à voter demain et après-demain lors des élections syndicales et faire en sorte que votre vote soit le plus éclairé possible, LaPeniche.net a interrogé les six syndicats qui s’apprêtent à solliciter vos suffrages sur six points bien précis :
- Quelle est votre position sur la nouvelle politique des langues ?
- Quel est votre avis sur la procédure d’admission actuelle ? Faut-il la réformer ?
- Que pensez-vous de la récente réforme des troncs communs ?
- Quel est votre avis sur le calendrier universitaire ?
- Quelles réformes voudriez-vous apporter à l’aspect financier de Sciences Po (frais et bourses) ?
- Quelles réformes voudriez-vous apporter aux conditions de travail des étudiants ?
Dans ce premier billet (en principe) d’une série de trois, l’UNEF et Nouvelle Donne nous répondent.
Gwénolé BUCK (4A, Affaires Publiques) pour l´UNEF, propos recueillis par Gaëtan.
- Quelle est votre position sur la nouvelle politique des langues ?
Nous avons été les premiers à la dénoncer, et d’ailleurs même avant qu’elle se mette en place, puisque nous avons dès 2005 affirmé notre engagement pour que tous les étudiants en bi-classe puissent choisir une deuxième langue vivante, engagement réaffirmé en Commission Paritaire en mai 2006. De manière générale, il faut permettre plus de souplesse et de choix pour l’étudiant : nous proposons que chacun puisse choisir deux langues, qu’il soit en bi-classe ou non, et que les conditions d’accès à une troisième langue soient assouplies. D’autre part, nous ne sommes pas opposés au maintien des bi-classes, mais il serait plus judicieux que l’étudiant choisisse sa langue de bi-classe, par exemple en cohérence avec son choix probable de troisième année à l’étranger. Les enseignements en langue doivent être mieux concertés avec la DAIE, pour qu’ils préparent vraiment à cette troisième année. Ensuite, nous proposons une refonte plus globale de la pédagogie des langues : les heures sont mal réparties (on ne pratique une langue qu’une fois par semaine !), le labo de langues est sous-utilisé, le contact avec des native speakers devrait être étendu… Finalement, j’ajoute que nous avons déjà oeuvré en ce sens, et que la pétition que nous avons fait signer a recueilli plus de 800 signatures, qui sont à l’origine d’un groupe de travail qui enverra un questionnaire, déjà prêt, à tous les étudiants, sur la question. Le département des langues a également déjà fait preuve de plus de souplesse dans l’attribution des niveaux, et nettement moins d’étudiants sont pénalisés au second semestre qu’au premier.
- Quel est votre avis sur la procédure d’admission actuelle ? Faut-il la réformer ?
Oui, évidemment ! De toute manière, la mise en place des Conventions ZEP a bien prouvé qu’il existe un problème : le concours tel qu’il est aujourd’hui ne donne pas à tous les mêmes chances de réussir. Si des lycéens ZEP, qui réussissent par la suite très bien leur scolarité à Sciences Po, échouent généralement à l’examen, c’est bien que le concours ne sélectionne pas en fonction de ce « mérite » dont on nous rabâche les oreilles. La réforme du concours que nous proposons aujourd’hui est dans la suite logique des Conventions ZEP, dont elle tire toutes les conclusions. Elle s’inspire également fortement de l’étude du CEVIPOF qui démontre qu’à niveau égal au bac, un étudiant issu d’un milieu défavorisé a deux fois moins de chances de réussir qu’un étudiant issu d’un milieu favorisé. C’est pourquoi nous proposons de déplacer le concours à Juin, pour contourner l’effet prépa d’été qui ne se reportera que très partiellement sur les prépas à l’année, et d’approcher la méthodologie des épreuves de celles du bac, pour que, si prépas à l’année ou à Pâques il y a, elles apportent le moins possible de valeur ajoutée. Cette réforme ne fera aucunement baisser le niveau, puisque le niveau d’un concours dépend du ratio candidats/admis, et pas du contenu de ses épreuves. En revanche, ça le rendra plus juste et moins discriminant.
- Que pensez-vous de la récente réforme des troncs communs ?
Même si nous regrettons la plus faible place accordée aux troncs communs du fait de cette réforme, elle représente sans doute un bon compromis entre le maintien de la pluridisciplinarité et la maîtrise de la charge de travail. La pluridisciplinarité est indispensable, car elle permet l’ouverture intellectuelle et une insertion professionnelle durable (en donnant aux étudiants les moyens de la polyvalence, c’est à dire la possibilité de se reconvertir plus tard). En revanche, nous plaidons là encore pour plus de souplesse et plus de liberté de choix des étudiants. S’il n’est pas possible de laisser des étudiants multiplier les cours à crédits, car ce serait une rupture d’égalité que certains tentent 800 crédits pour obtenir les 60 règlementaires, on devrait ouvrir la possibilité d’assister aux cours de troncs communs (et d’autres masters, d’ailleurs), en qualité d’auditeur libre. Ces cours pourraient même être mentionnés sur le diplôme ou plutôt les relevés de notes.
- Quel est votre avis sur le calendrier universitaire ?
Le calendrier universitaire est un problème difficile et récurrent. Entre les impondérables dont personne n’est responsable, comme la découverte d’amiante en Chapsal et Leroy-Beaulieu, et les manifestations inutiles comme le soixantenaire de Sciences Po, il y a tous les ans des problèmes. C’est aussi pour cela que nous avons proposé de déplacer le concours à Juin, car cela permettrait d’avancer la rentrée à la mi-Septembre, et donc de gagner deux semaines sur le calendrier, et de pouvoir mieux le calquer sur le calendrier scolaire et universitaire général. C’est la seule mesure qui permettrait une gestion intelligente et durable du calendrier.
- Quelles réformes voudriez-vous apporter à l’aspect financier de Sciences Po (frais et bourses) ?
Nous avons toujours été opposés aux droits de scolarité dits « progressifs », car c’est une fausse bonne idée qui met en péril la démocratisation et le financement de Sciences Po. Premièrement, ces frais ne sont pas réellement progressifs, car pour les étudiants vraiment riches, 5 000 pèsent beaucoup moins que pour les fils de profs qui se retrouvent à 2 500 , mais passons. Le vrai problème est que cette réforme fait dépendre le financement de l’IEP de sa composition sociologique. En clair : pour avoir de l’argent, Sciences Po doit continuer à accueillir une proportion anormale d’étudiants dont les familles sont très aisées, ce qui va à l’encontre de toute démocratisation. La réforme va aussi dans le sens d’une plus grande inégalité entre établissement : imaginez qu’on applique le système à Villetaneuse ! D’autre part, cette réforme ne prend pas en compte les situations possibles d’autonomie de l’étudiant. Elle rattache d’office chacun à sa famille, ce qui ne pose pas problème pour tous, mais peut en soumettre certains à des pressions (du style : « tu fais Finance et Stratégie ou je te coupe les vivres »). Ces cas, sans doute minoritaires, doivent néanmoins être pris en compte. Finalement, nous pensons que l’enseignement supérieur est un bien public, qui doit être financé par la collectivité. Prétendre le faire financer par 2 200 000 étudiants plutôt que par 60 000 000 de Français conduira mécaniquement à de fortes augmentations, comme Sciences Po a commencé à le démontrer entre 2004 et 2005. En ce qui concerne les bourses, nous proposons leur attribution sur critères sociaux aux étudiants étrangers, selon les mêmes critères qu’aux étudiants français, leur maintien en cas de redoublement (notamment pour les bourses de mérite), et leur versement à temps (certains n’ont reçu leur première bourse qu’en Décembre, et encore, suite à une pétition de l’Unef qui a obtenu du ministère le déblocage de 55 millions d’euros…).
- Quelles réformes voudriez-vous apporter aux conditions de travail des étudiants ?
Nous nous engageons pour faire de Sciences Po des campus solidaires, vivants et éco-responsables. En priorité, il faut je crois augmenter les espaces de travail disponibles pour les étudiants, en aménageant par exemple de telles salles au 13, rue de l’Université. Cette réforme, contrairement à une extension des horaires d’ouverture de la bibliothèque, permettrait d’avoir des salles ouvertes jusqu’à 21h moyens constants. Nous proposons également l’électrification de tous les amphithéâtres, pour qu’on prenne enfin en compte les étudiants dont les batteries de portable ne tiennent pas deux heures. Plutôt que de proposer la multiplication des salles informatiques, il serait plus judicieux de faciliter l’accès au prêt d’ordinateurs portables, comme cela se fait pour certain boursiers, et d’installer dans Sciences Po des imprimantes wifi qui permettent d’imprimer depuis son portable. Finalement, car ça aussi ce sont les conditions de travail des étudiants, nous nous engageons pour l’accès aux soins, à la santé, et à un mode de vie équilibré. Nous avons obtenu cette année la mise en place d’une cellule d’écoute psychologique, et nous sommes en train d’étudier, avec le CROUS de Paris, la possibilité d’installer au 13, rue de l’Université, une cafétéria CROUS servant des plats chauds et équilibrés à prix modiques.
Savina BLOT-DOLLFUS (5A, Affaires Publiques) pour Nouvelle Donne, propos recueillis par David.
- Quelle est votre position sur la nouvelle politique des langues ?
Les étudiant de Bi-Classe qui le souhaitent doivent pouvoir étudier une seconde langue. Il faut revoir et de préciser les critères de sortie de ce niveau récemment introduit car ils sont jugés à la fois trop sévères, et souvent aléatoires en fonction de la conférence. Il faut aussi aller outre le tabou d’une troisième langue pour ceux qui désirent en étudier une (une fois une langue maîtrisée au niveau 4 par exemple). Des partenariats doivent être pris avec les centres d?examen TOEFL et IELTS pour faciliter le passage de ces tests incontournables: une préparation à ces tests plus précoce et plus soutenue que celle actuelle doit être envisagée: plusieurs séances de préparation, et plus en amont des échéances. Enfin, il est urgent de la rénover le laboratoire de langue, vieillissant, et trop peu actualisé et divers dans son contenu multimédia. Il faut dynamiser ce qui peut devenir un outil de travail et de progrès formidable.
- Quel est votre avis sur la procédure d’admission actuelle ? Faut-il la réformer ?
Nouvelle Donne s’oppose fermement à la dénaturation des sélections d’entrée, comme prônée par certains : nous rappelons que seuls des étudiants qui ont démontré leurs capacités de travail et leur réelle motivation méritent de rentrer à Sciences Po. Certains aménagements sont possibles, mais aucune révolution n’est souhaitée. « Démocratiser » : oui ; mais pas au prix d?une baisse générale de niveau. Il faut conserver en l’état le calendrier des sélections d’entrée à Bac 0 et Bac +1.
Toutefois, la sélection sur concours pose un problème : le « court-circuitage » des préparations d’été. C’est pour cela qu’il faudrait envisager de rendre plus accessible et encore moins chère la préparation en ligne organisée par Sciences Po. Afin que tous puissent préparer au mieux le concours de manière autonome, pourquoi ne pas éditer un livre d?annales corrigées, étayées de cours en fonction des matières programmées et de conseils de méthode. Il serait envoyé gratuitement lors de l’inscription au concours, vu son prix. Il faudrait aussi réfléchir à l’instauration d’un oral de sélection pour les recrutement sur Mention, puisque les seuls à ne pas avoir à motiver leurs candidatures sont ces derniers, les autres passant des oraux (CEP) ou un concours. L’objectif de cet oral serait porté sur la motivation du candidat, et non sur son niveau scolaire, déjà prouvé par son dossier et sa mention. On éviterait ainsi le dépôt automatique d’un dossier une fois la mention obtenue. Un effort facile est à porter aux modalités pratiques du concours : qu’il puisse se dérouler ailleurs en France, notamment au sein des campus délocalisés, afin d?éviter des déplacements longs et onéreux.
- Que pensez-vous de la récente réforme des troncs communs ?
Que Sciences Po reste ce qui explique en partie son succès ! La réforme des Masters de 2006 visait à supprimer le tronc commun dans sa quasi intégralité pour installer un système qui segmentait strictement les Masters entre eux. Nous formulons certaines critiques. Nous proposons, dans une version assouplie et adaptée au nouveau Sciences Po, un système remplaçant dignement l’ancien tronc commun. Il en va de l’unité de notre établissement et de la sauvegarde de son identité, qui, sans ce socle, pourrait passer pour une juxtaposition incohérente de Masters et d’écoles spécialisées sans rapport entre eux. Nouvelle Donne propose de revenir en partie vers le système initial du Tronc Commun, qui imposait à tous les étudiants de Masters d’étudier au cours de leurs trois semestres de présence à Sciences Po les trois matières communes à tous (une par semestre), à savoir « Macroéconomie », « Enjeux politiques » et « Espace Mondial » ainsi qu’une sciences sociale. Cette solution pourrait être assouplie en permettant aux étudiants du premier cycle de valider l’un de ces enseignements dès la deuxième année.
- Quel est votre avis sur le calendrier universitaire ?
Nouvelle Donne s’oppose à ce que le concours d’entrée ait lieu en juin. Cela nuit à une bonne préparation par les étudiants du baccalauréat et favorise les étudiants qui ont les moyens financiers de se préparer au concours par le biais notamment de prépa durant les vacances scolaires ou de cours à domicile. Deux mois d’été permettent à chacun d’aborder plus sereinement le concours et de s’y préparer au mieux. Le concours passé en juin risquerait enfin de voir baisser le niveau général du recrutement par un manque de préparation à celui-ci.
- Quelles réformes voudriez-vous apporter à l’aspect financier de Sciences Po (frais et bourses) ?
Sciences Po doit revoir la façon dont il calcule les frais de scolarité en comptant une part entière (et non une demie actuellement) par enfant du domicile fiscal à partir du troisième, comme cela est le cas lors du calcul des impôts. Nouvelle Donne souhaite également que les étudiants hors zone Europe voient leurs frais de scolarité calculés selon le même principe que les autres.
- Quelles réformes voudriez-vous apporter aux conditions de travail des étudiants ?
Nouvelle Donne se veut être un syndicat de proximité : renouveler le parc informatique et généraliser le wifi, élargir les horaires de la bibliothèque et favoriser les prêts, ouvrir des salles pour les travaux de groupes, réduire les coûts des recueils de textes et les rendre gratuits pour les boursiers, mener une véritable politique sociale du logement sont autant de réformes que Nouvelle Donne propose de mettre en oeuvre.