La naissance des « Collégiades de l’Eloquence »

La rubrique « Champagne en Boutmy » regroupe les articles de notre partenariat avec The Sundial, le journal étudiant du campus de Reims. 

By Marion Lefèvre

Nommé en hommage à feu son illustre – et fantasque – directeur, le Prix Richard Descoings a inauguré sa toute première édition à l’Hôtel de Ville de Reims, le 26 mars dernier. Rendue possible par le colossal travail de l’antenne rémoise de Sciences Polémiques dont Gwendoline Houette et Alexis Baujat étaient les principaux organisateurs, cette après-midi d’éloquence fut en tous points une réussite.

© The Sundial Press

Frédéric Mion, le directeur de Sciences Po jouant les absentéistes à cette occasion, a tout de même tenu à adresser à ses étudiants un message vidéo, retransmis au public présent après les nombreux discours d’introduction – du maire de Reims Arnaud Robinet à l’un des responsables de la maison de champagne Castelnau -. En quelques paragraphes brefs mais percutants, Frédéric Mion rappelle, à l’instar de la plupart des femmes et hommes ayant pris la parole, que ce prix  est « l’une des plus belles manières de rendre hommage à Richard Descoings, de partager son irrévérence » et de se rapprocher du « tumulte du monde ». « Le prix Richard Descoings est en quelque sorte le début des Collégiades de l’éloquence, » conclut-il habilement. Complément idéal au Minicrit où l’éloquence s’est toujours faite plus discrète, ce prix a en effet deux particularités ; celle de rassembler des étudiants de tous les campus, de Poitiers au Havre en passant par Menton et Paris ; et celle, plus exceptionnelle encore, d’être un prix bilingue. Deux symboles, en somme, qui ont guidé les mandats de Richard Descoings à la tête de l’institution et résument judicieusement son héritage – la création et l’agrandissement des campus délocalisés et l’établissement des quelques centaines de partenariats que Sciences Po entretient aujourd’hui avec le réseau universitaire mondial.

Deux langues, donc deux jurys ;

  • Le jury francophone, composé de Arnaud Robinet, député-maire de Reims ; Bénédicte Durand, doyenne du Collège Universitaire de Sciences Po ; Nathalie Jacquet, directrice du campus de Sciences Po à Reims ; Frédéric Monlouis-Félicité, délégué général de l’institut de l’Entreprise ; Anass Mourjane, adjoint de direction à la Banque de France et Finaliste du tournoi de la « French Debating Association » et Jean d’Andlau, doctorant, professeur agrégé d’histoire au Centre d’Histoire de Sciences Po.
  • Le jury anglophone, composé de Peter Owusu Manu, diplomate ghanéen ; Josef Knovitz, historien et ancien diplomate ; Felicia Henderson, leadership consultant et professeur à Sciences Po : Michael Ryan, directeur du US European Command Interagency Partnering Dicterorate; Mona El Khoury, doctorante à Harvard et assistante-professeure à Sciences Po ; Estelle Bougna Fomeju, Alumni du campus de Reims et ancienne présidente du Bureau des Arts et Louis-Charles Pluot, directeur du market et de la communication de la maison de champagne Castelnau.

…De même, un candidat pour la langue de Shakespeare et un autre pour celle de Molière.

  • Rachel York (EN) et Théophile Clément (FR), du campus de Dijon
  • Laurent Weil (EN) et Thibault Courgeon (FR), du campus de Poitiers
  • Baptiste Gosson (EN) et Barbara Degoul (FR), du campus de Nancy
  • Dongsinne Sohnn (EN) et Vincent Mingarelli (FR), du programme Europe-Afrique
  • Jeremy NG (EN) et Paul Louédin (FR), du campus du Havre
  • Lyndsay Morrow (EN) et Raphaël Joron (FR), du programme Europe-Amérique
  • Benjamin Music (EN) et Amine Hafidi (FR), du campus de Menton
  • Arsh Haque (EN) et Eve Albergel (FR), du campus de Paris

C’est d’abord celle du dramaturge britannique qui est mise à l’honneur. D’Arsh Haque, du campus de Paris, qui éblouit l’assistance sans même une feuille de notes aux piques acides de Dongsinne Sohnn à propos de son enrichissante expérience professionnelle au Mc Donald’s, la barre est placée haute dès le début. On s’esclaffe au rap de Jérémy NG (“Definition belongs to the definer, not the defined”), on apprécie les sujets proposés, des citations de Tolkien (“Not all those who wander are lost”) à celles d’Harry Potter (“It takes a great deal fo bravery to stand up to our enemies, but just as much to stand up to our friends”). Suivent les candidats francophones, également brillants malgré quelques couacs sans gravité bien qu’un peu graveleux – lorsque l’un des candidats, peu subtilement, avoue espérer provoquer l’amitié et plus si affinité des Rémoises… On notera la performance de Raphaël Joron (“L’avenir n’est-il qu’une suite de quotidiens ?”) qui a tout de même débité à toute vitesse un pot-pourri de Jean Ferrat pour justifier à l’une des jurés de son attachement à l’artiste, ainsi que celle de Thibault Courgeon, dont les jeux de mots habiles (“je suis Charlie et, dans le cas belge, je suis même la Chocolaterie”) lui vaudront une salve d’applaudissements admirative.

Installés dans la salle depuis 14h30, il aurait été difficile de s’ennuyer. Quelques entractes avaient été ménagés pour permettre à l’audience de se dégourdir les jambes ; la délibération du jury fut rapide et efficace, couronnant Dongsinne Sohnn et Vincent Mingarelli, deux étudiants du programme Europe-Afrique, ce qui ne manqua pas de provoquer l’euphorie – et une standing ovation – des élèves du même programme présents dans la salle.

La conclusion du prix fut plus brève, plus émouvante aussi. Si Bénédicte Durand, la doyenne du Collège Universitaire, a dû s’éclipser une heure avant la fin de l’évènement, Nadia Marik-Descoings, la veuve de l’ancien directeur, exprima en quelques minutes sa fierté et son émotion que la mémoire de son mari soit entretenue de si belle manière. Suite à la remise des prix et des inévitables bouteilles de champagne, les étudiants se dispersèrent peu à peu, les uns vaquant à leurs occupations pascales, les autres se donnant rendez-vous à la soirée organisée par une des listes BDA le soir même.

Pour paraphraser Nadia Marik-Descoings, nous avons été éblouis. Comblés. L’éloquence est un art majeur, auquel cette première édition du Prix Richard Descoings a donné ses lettres de noblesses non pas à l’échelle rémoise, mais entre les différents campus de Sciences Po. On espère avoir trinqué non seulement à un premier succès, mais également à de futures réussites.