Paul : une rencontre du troisième type
Greg Mottola est un cinéaste discret, trop sûrement. Il faut avouer que les sociétés de distribution françaises ne l’aident pas à le rendre plus visible. Superbad avait été vendu comme un vulgaire ersatz d’American Pie, alors qu’il était, au contraire, un film tendre, drôle et juste. Adventureland, quant à lui, et malgré son casting trois étoiles (Jesse Eseinberg, Kirsten Stewart, Ryan Reynolds…), avait été sorti directement en dvd : manque de bol, c’est probablement son plus beau long-métrage à ce jour.
Car en effet, depuis quelques années maintenant, le réalisateur américain, issu de la grande et chaleureuse famille Apatow, se créé mine de rien une belle filmographie. Pour son dernier opus, Paul, en ce moment sur les écrans de plus de 300 salles en France, Mottola s’est entouré d’un duo star de l’autre côté de la Manche : Simon Pegg et Nick Frost, déjà auteurs du génial Shaun of The Dead et du bon, mais pas top, Hot Fuzz. Avec Paul on aurait d’ailleurs pu s’attendre à un film dans la lignée parodique de ces derniers. C’eut été oublié que Greg Mottola est un vrai cinéaste, et qu’un vrai cinéaste fait toujours le même film (en se renouvelant évidemment). Ainsi de Paul qui l’air de rien et sous des allures de films de geeks brasse des thèmes importants et chers au réalisateur de Superbad : l’amitié au-dessus de tout, le respect des différences, l’adolescence et surtout, ce difficile et redoutable passage à l’âge adulte.
Paul, c’est donc l’histoire de deux potes anglais (Simon Pegg et Nick Frost, aussi scénaristes en l’occurrence) débarqués aux Etats-Unis pour faire un tour en camping-car de tous les lieux où, par le passé, des témoins ont cru voir des ovnis ou autres événements surnaturels (Black Mailbox, Zone 51, Roswell…). Ainsi, comme dans Superbad, Mottola met au centre de son film un couple lié par une puissante et sincère amitié qui n’apparait ambiguë que pour ceux qui ne la comprennent ou ne la vivent pas : d’ailleurs, une blague récurrente consiste en ce qu’on n’arrêtera jamais de demander aux deux héros s’ils sont gays. Qu’ils le soient ou pas n’est évidemment pas la question. Ce qui intéresse Mottola, c’est de décrire avec tendresse et recul une relation particulière entre deux adulescents qui se sont créés un monde où ils se sentent bien mais qu’ils auront finalement à quitter.
Bref. Après un passage au fameux ComicCon, nos deux héros prennent la route en camping-car et finissent par tomber sur un alien, du nom de Paul et doublé par Seth Rogen, recherché par le gouvernement américain qui veut l’éliminer… Après un début un peu long, le film est lancé. Rapidement, les codes de la Science-Fiction sont joyeusement balancés aux orties : comme on se foutait dans Shaun of the Dead du pourquoi et du comment l’invasion de zombies avait commencé, on se fout éperdument de savoir d’où vient Paul, et de pourquoi il est là. Paul est un alien qui fume et qui boit. Mais paradoxalement, le côté référentiel (sont cités en vrac Star Wars, Alien¸ Star Trek…) qui marchait pourtant assez bien dans les précédents films de la bande à Simon Pegg plombe un peu le long-métrage, rapprochant parfois le tout d’une parodie jamais vraiment assumée. Ce qui n’empêche pas le film d’être doté de scènes mémorables comme celle où l’on apprend que Paul, retenu sur terre depuis 1947, est celui qui a conseillé Spielberg pour Rencontres du Troisième Type et qui est à l’origine de X-Files…
Paul est un film juste, dont le ton décalé et l’humour viennent toujours rassurer ceux qui auraient peur qu’il se prenne trop au sérieux. Surtout, c’est dans ses personnages qu’il devient le plus intéressant. Greg Mottola aime tous ses personnages, et, comme chez Judd Apatow, il n’y a, de la part du réalisateur, aucun jugement sur ces derniers. Au contraire, le film pourrait presque se voir comme un plaidoyer pour le respect des différences. Après tout, Paul ne sera jamais vu comme un alien par les héros du film, ni même, d’une certaine façon, par ceux qui le poursuivent. Le personnage le plus étonnant reste celui de cette bigote borgne qui découvre avec étonnement que Dieu n’existe pas vraiment et qu’elle peut donc dire toutes les insultes qui lui passent par la tête (elle ne s’en privera pas, ce qui permet des scènes vraiment très drôles). Ce personnage, pourtant secondaire, est finalement à l’image de tout le film : jamais moqué, ni caricaturé, son côté extrême qui pourrait n’en faire qu’un personnage de parodie sans consistance est toujours contrebalancé par le regard porté sur lui, profondément humain et juste. Ainsi donc de cette femme borgne qui apprend avec joyeuseté la vie réelle, de cet alien fumeur de joints bien plus intelligent et émouvant qu’il n’en a l’air, et surtout de Nick Frost et de Simon Pegg, décalés et attachants.
Paul n’est ni le meilleur film de son réalisateur, ni un chef d’œuvre. L’écriture y est moins fine que dans les réalisations précédentes de Mottola, et certaines choses sombrent parfois dans une sorte de caricature un peu lourdingue (notamment le personnage du père fou de Dieu). Il n’en reste pas moins qu’il est bien plus intelligent que ne le laissaient prévoir sa bande-annonce, ou même son synopsis. Comme ses personnages, Paul est un film surprenant, qui trouve parfois sa justesse dans sa maladresse. Drôle et divertissant, plein de vie et de chaleur humaine et mettant l’amitié au-dessus de tout, Paul est le film de potes par excellence. Voilà donc une sortie bienvenue dans un début d’année 2011 plutôt terne et sans surprise, qui mérite franchement qu’on aille y jeter un coup d’œil.
3 Comments
lifsdoi
Grave t’es trop un blaireau comme mec !!
Le Duke
« Paul brasse des thèmes importants et chers au réalisateur de Superbad : l’amitié au-dessus de tout, le respect des différences, l’adolescence et surtout, ce difficile et redoutable passage à l’âge adulte. » Lol j’crois qu’un moment faut arreter d’se prendre la tête et passer un bon d’vant un film sans réfléchir de trop! Paul est dans la lignée de Shaun of the Dead et de Hot Fuzz, qui au passage est terrible! Et puis ttes les références à Stars Wars, Retour vers le Futur et autres films de Sci-Fi sont géniaux! Enfin tout ca pour dire que c’est bcp de blabla… Viens dont boire une pinte au Winchester l’ami!
A.
Cette critique est un brillant arrachage