Finale des Triplétades d’art oratoire 2018 – Un concours qui fera Histoire

« Le mois d’octobre est, à Sciences Po, synonyme d’éloquence ». C’est ainsi que la talentueuse et non moins élégante Emma Bouvier, secrétaire générale de Sciences Polémiques, a inauguré la soirée de finale des triplétades d’art oratoire mercredi dernier. Face à elle, un amphithéâtre bondé, rempli de regards brillants et impatients, prêt à s’extasier de la moindre fanfaronnade des quatre triplettes qui, pour ramener la coupe à la maison, s’emploient à divertir, mais aussi à faire réfléchir leur auditoire.Alors que nous rongions notre frein avec plus ou moins de nervosité, le jury fit une entrée digne des César en Boutmy, récoltant du même coup une salve d’applaudissements des plus fournies. En ce qui concerne sa composition, nous ne pourrions, pour commencer, que citer Jules Saunier, qui annonça « qu’on commence avec du lourd : Frédéric Gros ». S’ensuivirent les présentations des autres membres du jury : Bénédicte Durand, Naïma Moutchou (députée LREM), Andréas Rossner, Bertrand Perrier (avocat), Gabriel Calvet (Président du BDE), Lola Elbaz (ancienne Présidente de Sciences Polémiques), et enfin Salomé Lecroc (Présidente de Sciences Polémiques). Frédéric Mion, directeur de Sciences Po, monta sur l’estrade quelques instants, afin d’annoncer qu’il ne siègerait pas dans le jury. Stupeur générale et soupir déçu (« oooooooh ») collectif accueillirent cette nouvelle. Malgré tout, M. Mion refidélisa son aura de popularité auprès de tous en déclarant que « chacun est également cher à [son] cœur», avant de drop the mic.

Crédits : Katell Coueraud

Après ces considérations bercées sur un fond d’ACDC quelque peu mal calibré – mais somme toute à la limite du «clin d’œil nostalgique » pour le jury – la première triplette monta sur scène. Si6 l’impératrice, représentée par Tristan, Noé, Emma, et Alexandre, était prête à briller. Entre « références grivoises », jeux de mots littéraires (n’oublions pas la référence de Noé à Dino Buzzati et son « désert des tartares ») et phrases accrocheuses telles que « la vie n’est qu’un Tinder match raté », Tristan et Noé s’employèrent fidèlement à l’exercice du discours. Emma et Alexandre préférèrent successivement reformuler plusieurs fois de suite le sujet (« Tout est perdu fors l’honneur ») en « il y a des hauts et des bas », ou se comparer à un flacon de parfum Chanel, référence au fameux clash Booba-Kaaris à l’aéroport d’Orly. Leur succéda la triplette Al Cap’1 qui, malgré son nom des plus chaotiques, nous délivra en les personnes d’Hicham et Aïda de beaux discours. A la fois taquins et sérieux, ils surent mener une réflexion joueuse et profonde sur le sujet : « soyons terribles, pour dispenser le peuple de l’être ». Les questions furent appréhendées, que disons-nous, attaquées, déchirées, dévorées, par Marguerite et Lucas. Non contents de s’être fait un nom dans le milieu de la « réponse-du-tac-au-tac », ils surent nous étonner en mobilisant des notions de géographie qui nous permirent de nous rappeler qu’un IEP de province n’est pas Sciences Po. Nous ne citerons pas ici ce qui fut dit.

 

Puis vint le tour de Madame de Pompa12 : si Aurore mania la blague politique avec brio, Tim n’hésita pas à nous confier ses penchants sadomasochistes, à travers cris et coups sur le pupitre. Océane et Thomas, eux, ne se départirent pas de leur calme, et malgré un écart de voix de Thomas (écho d’une mue vocale pas si lointaine) au moment de saluer le jury, ils lui présentèrent des réponses bien largement à la hauteur de nos attentes, sur le sujet « il ne suffit pas d’être des héros, nous voulons être des vainqueurs ». En ce qui concerne les ambassadeurs du 13or de Toutankhamion, les deux discoureurs nous offrir de quoi rivaliser avec le reste des triplettes concurrentes : Apolline et son débit de parole plus rapide que l’éclair su rendre enfantin son timbre de voix, tentant ainsi de nous amadouer, mais n’étant clairement pas nés de la dernière pluie, ce n’est que grâce à ses superbes jeux de mots et autres calembours qu’elle et Dimitri nous séduisirent. Edgar et Aurélien nous servirent des réponses de qualité, convoquant avec humour (trop ?) des sujets comme la pédophilie ou la guerre en Syrie, d’aussi loin que le sujet « condamnez moi, peu importe, l’Histoire m’absoudra » puisse être concerné.

Crédits : Katell Coueraud

C’est après une longue délibération, et face à un public trépignant d’impatience, que le jury revint en Boutmy pour annoncer les prix. Le verdict tombe : la première place revint à Al Cap’1, la seconde à Si6, la troisième au 13or, et la quatrième à Madame de Pompa12. Mais qu’importe le classement, chacune des quatre triplettes a pu, à sa manière, éblouir le public et surtout, a su oser. Pour tout cela, pour leur audace, leur talent, et pour leur don de faire rire la salle, on ne peut que féliciter les dix-huit talents de la soirée. En définitive, la soirée fut à l’image de l’atmosphère de la salle : rouge, chaude, effervescente (et même incandescente ?). On ne répétera jamais assez que l’éloquence est l’art de l’insolence, merci à vous de nous l’avoir démontré.

Sabine Audelin et Etienne de Metz