Pour bien commencer 2009… La chronique des Gentils Gens du Louvre (GGDL)
Le Sarcophage des Epoux , ou le couple étrusque comme modèle conjugal. Département des Antiquités Grecques, Etrusques et Romaines.
Article écrit par Clara Pelet
Chers lecteurs, lors de nos dernières chroniques GGDLiennes, vous avez souvent découvert des oeuvres présentées désepérément seules derrière leurs vitrines, sortes de « single-oeuvre d’art »… Bref, dans le monde du Louvre, il semblait que le célibat soit tristement de mise…! Or, en ce début d’année, je veux donner une note d’espoir pour tous les chefs d’oeuvre esseulés, leur rappeler que l’amour existe dans les vitrines des musées ! Allez, vous aussi, prendre la température de la première salle des antiquités étrusques, vous y verrez le couple le plus touchant de l’histoire de l’art funéraire, réuni à la vie à la mort: le couple du Sarcophage des Epoux !!
Devant vos yeux, un magnifique sarcophage de terre cuite rouge, de ceux que l’on trouve dans cette région du centre de l’Italie, près de l’antique Cerveteri, le plus vaste cimetière de la civilisation étrusque du VII ème au V ème siècle avant JC. Cette brillante civilisation précède de quelques siècles la célèbre civilisation romaine, elle est pétrie de culture grecque (alors à son apogée) et de culture orientale. Ce sarcophage est le résultat d’une commande passée par un riche couple, il contient simplement les deux urnes funéraires des époux, ce qui explique sa taille peu impressionante… (bien évidement, à moins d’être dans une position pas très avouable, tout visiteur remarquera que deux corps ne peuvent tenir dans cette boîte originale).
La partie de droite est constituée par les coussins du lit à baldaquin typiquement grec (kliné), ce dernier affichant même un chapiteau à volute de type ionique. Le matelas moelleux accueille le haut du corps des époux, accoudés sur de confortables coussins, en réalité des urnes formées par les estomacs d’animaux retournés, porte bonheur dans l’au delà…
Charmant n’est-ce pas? La femme et l’homme sont disposés l’un derrière l’autre, le haut du corps apparaît en ronde bosse pendant que le bas du corps s’amenuit pour ne laisser apparaître que les pieds.
Madame et Monsieur Sarcophage exécutent des gestes ancestraux, ils devaient porter un vase à libations, afin d’accomplir les derniers rituels. Ils sont vêtus de longues tuniques, portent des tresses typiquement étrusques qui tombent le long de leurs épaules.
On remarque la polychromie donnée à la terre cuite, certaines parties sont peintes en noir (les cheveux), d’autres en rouge, notamment pour déterminer les chairs de Madame, traditionnellement plus foncées que celles de l’homme.
Les différentes parties de ce chef d’oeuvre du VI ème siècle ont été assemblées au moyen de la technique grecque des tenons et des mortaises, sortes de méga puzzle en 3D…
Pour finir, attardons-nous sur les visages lumineux de ces époux. Lisses, les joues pleines et tendues, les yeux en amande effilées très étrusques, le nez droit et épais, la bouche petite, fine et ourlée… il faut remarquer ici le travail très délicat de l’argile qui parvient même à leur faire esquisser un demi sourire, figé pour l’éternité.
Alors, ce couple épanoui depuis plus de deux mille ans ne fait-il pas rêver dans les chaumières ? Chers lecteurs, pour vous inspirer le chapitre « Fidélité » de votre histoire d’amour, vous savez maintenant vers quelle salle vous diriger ! Pour le chapitre « Rupture », c’est une autre histoire (de l’art!) …!