Parcours de militant.e.s / Épisode 1 : Cassandre
Ils sont étudiant.e.s et militant.e.s. Alternant les papers et le tractage, ils sont soumis au rythme effréné de la campagne, portés par leur attachement à un candidat, à un programme, à des idées. À trois semaines du premier tour de l’élection présidentielle, nous sommes allés à la rencontre de plusieurs élèves de Sciences Po qui ont choisi de s’engager au sein de partis ou mouvements politiques. Et pour ce premier portrait de militant.e, La Péniche a choisi d’interviewer Cassandre, étudiant.e en 2ème année à Sciences Po, président.e de l’association Equal et militant.e pour La France Insoumise, le mouvement de Jean-Luc Mélenchon. Portait d’une étudiant.e qui a choisi de » ne pas se laisser porter par la vague « .
L’interview a été réalisée le 15 mars dernier, trois jours avant le rassemblement de la France Insoumise place de la République.
La Péniche : Pourquoi avoir choisi Jean-Luc Mélenchon et la France Insoumise ?
Cassandre : J’ai surtout choisi son programme ! C’était dans le contexte des mouvements contre la loi Travail. Jean-Luc Mélenchon était le seul qui allait souvent en manif ( coucou Hamon ). Mais surtout, c’était celui qui, d’après les lignes directrices de son programme, était le plus en accord avec ce que je pensais.
LPN : Et selon toi, qu’est-ce qu’il a de fondamentalement différent par rapport aux autres candidats ?
C : C’est clairement l’homme politique qui est resté le plus droit dans ses bottes de toute sa carrière politique. Il a été le premier à porter le projet de la VIème République, pour laquelle nous défilons samedi, en 1995. Il était là dès le début, et n’a jamais dérogé à ses principes. Mais il sait aussi apprendre de son entourage ! Par exemple, il a été le plus rapide à se former sur le sujet de l’écologie et à l’intégrer entièrement à son programme. Pareil pour les droits LGBT, il est parti de rien a su écouter les personnes autour de lui et modifier son point de vue tout en gardant son éthique. C’est toujours en gardant son éthique et sa morale qu’il parvient à ajuster son opinion. Pour moi, c’est quelqu’un de fondamentalement moral.
LPN : On voit que certains thèmes comme la laïcité ou l’immigration reviennent fréquemment dans cette campagne. Mais est-ce qu’il y a un sujet qui n’est pas assez abordé ?
C : Justement, il n’aborde pas tous ces sujets comme le font les médias. Dans le cas de la laïcité et de l’immigration, par exemple, ce sont des sujets que l’on placarde en demandant aux gens ce qu’ils pensent dessus. Jean-Luc Mélenchon a une approche beaucoup plus transversale, considérant que c’est une question de système, de globalité. Il considère qu’on ne peut pas résoudre ces questions juste en les prenant par le petit bout de la lorgnette, et qu’il y a d’autres problèmes à prendre en compte.
Mais ce qui m’a vraiment convaincu.e dans son programme, c’est la question écologique. Cette question est liée à la VIème République, puisque Jean-Luc Mélenchon veut inscrire la règle verte dans la nouvelle Constitution. La règle verte consiste à ne pas prendre à la planète plus que ce qu’elle ne peut produire. C’est normalement une règle de bon sens, mais dans les faits, ce n’est pas ce qui se passe ! L’écologie n’est pas une simple mesure, c’est le fil directeur de son programme.
LPN : À quand remonte ton engagement personnel ?
C : Mon premier engagement, c’était dans les mouvements LGBT. Forcément, j’ai eu un gros moment de politisation en 2012-2013 ! Mais cet engagement restait plutôt associatif. J’avais une peur bleue des partis politiques qui, selon moi, font plus de mal que de bien à la vie politique. C’est pourquoi j’ai rejoint la France Insoumise, qui n’est pas un parti mais un mouvement. À mon arrivée à Sciences Po, je suis au départ resté.e éloigné.e de la vie politique, mais les mouvements contre la loi Travail ont représenté une période de politisation intense et de meilleure définition de mon positionnement politique, qui est plus à gauche que le PS. Je commençais à me demander pour qui j’allais voter, comme c’est ma première élection présidentielle. Me retrouvant face à cette angoisse – angoisse qui est assez partagée – je me suis dit qu’il fallait s’engager pour des idées qui nous tiennent à cœur plutôt que de se laisser porter par la vague.
LPN : Comment s’engage-t-on à Sciences Po lorsqu’on est jeune ?
C : À Sciences Po, le seul fait d’être visible est un acte militant ! Il faut donc faire des tablages, tracter… Pour moi, le premier enjeu, c’est de montrer qu’on est présents, ce qu’on a plutôt bien réussi à faire puisqu’on est considérés comme la première force militante à Sciences Po. Mais c’est aussi donner un peu de lien social à la politique, réhumaniser un peu le tout. C’est pourquoi nous avions organisé pas mal de soirées, d’apéros et de départs communs au premier semestre. On veut essayer de discuter de façon un peu plus horizontale. Le mouvement de la France Insoumise s’organise autour de groupes d’appui locaux. N’importe qui peut créer son groupe d’appui sur le site https://jlm2017.fr ! Cela permet de rencontrer, à l’échelle locale, des groupes de personnes qui ont à peu près la même opinion et qui, peut-être, ont davantage d’expérience. Mais il n’y a pas de parcours-type. Les cartes sont tant rebattues en ce moment que c’est difficile de dire « il faut rentrer dans tel mouvement de jeunesse, puis dans tel parti… » Pour moi, cette voie royale, ça ne marche plus.
LPN : Être insoumis, qu’est-ce que ça signifie pour toi ?
C : Être insoumis, pour moi, c’est transformer son indignation en action. On vit dans un monde avec des personnes de plus en plus précarisées, un écosystème complètement foutu en l’air par des multinationales qui s’en foutent complètement. Être insoumis, c’est ne pas rester frustré dans son coin, mais décider que cette indignation va se transformeren action politique.
LPN : Pas d’union de la gauche, donc ?
C : Le problème est : que signifierait l’union de la gauche ? C’est quoi la gauche ? C’est pour ça que le mouvement s’appelle la France Insoumise. Il ne s’agit pas de faire une union de la gauche qui ferait gagner la gauche, pour créer une majorité de gauche qui embêterait la droite. Ce n’est pas le but. Le but est véritablement de créer une France insoumise. On ne souhaite pas dépasser le clivage droite/gauche, puisqu’il existe à la fois historiquement et idéologiquement, mais réussir à fédérer au-delà de la gauche. Je dirais même que la gauche est un frein, parce qu’il y a des partis qui ont pour intérêt leur propre survie, et ce n’est pas notre intérêt.
L’article a été rédigé en écriture neutre conformément à la volonté de l’intéressé.e, mais ne témoigne aucunement d’un changement de Charte de la part de La Péniche.