Quand Leroy-Beaulieu se met au breakdance

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A grands renforts sonores de slap, de scratch et de diverses percussions, Street Up et Leroy-Beaulieu ont accueilli une troupe surprenante le 14 novembre : Sidi et sept de ses danseurs venus pour une « démo-conférence » de hip-hop, ou plus précisément de break.  Quittez votre costume d’économiste ou de politiste. Jogging, basket et casquette s’imposent ce soir.

 

 Hipopédia : un projet atypique qui a séduit Street Up

Une cinquantaine de curieux, néophytes et amateurs avertis confondus, est venue. Dounia Dolbec, étudiante en première année s’exclame « Une conférence sur le hip-hop, c’est marrant comme principe ! A Sciences Po en plus ! ».

Sidi, qui a créé le squat du Centquatre où s’entraînent des artistes de la rue, prend d’abord la parole pour expliquer le projet « Hipopédia » qu’il a imaginé il y a cinq ans. Tenez-vous bien, car cette intention est en réalité un « projet d’archiviste », qui, à la manière de Wikipédia, rassemble le plus de document possible sur la culture hip-hop. Il s’agit notamment de regrouper des ressources digitales sur le deejaying, la danse, le rap, et, dans une moindre mesure, le graffiti. Ils ensuite vocation à être mis à disposition du public, par l’intermédiaire de médiathèques, de centres hip-hop ou simplement sur Internet.

Sidi et ses danseurs se déplacent aussi parfois pour des « démo-conférences ». C’est la première cette année à Sciences Po. L’événement se partage en deux temps : une explication rapide du concept de battle en hip-hop, et le battle en lui-même.

 

Parlez-vous hip-hop et battle ?

Le hip-hop est un courant artistique né à New-York à la fin des années 1960. A l’origine, c’est une partie de la culture afro-américaine. En danse, les premiers pas sont ceux du « rock », des mouvements des jambes essentiellement, sans grande envergure. Puis, petit à petit, les techniques se multiplient : burn, powermoves, footwork… A chaque fois qu’un morceau sort, il est accompagné d’une danse. Ce que tout le monde a à l’esprit aujourd’hui quand on parle hip-hop, et qui reste la marque de tout breakdancer, c’est le freeze. Ce moment où le danseur arrête de raper et finalise son passage en restant quelques secondes sur une figure technique.

Lorsque Blame It on the Boggie de Michael Jackson sort, en 1978, les danseurs imaginent une autre façon de s’exprimer : le battle. Il s’agit en fait pour deux équipes de se mettre en opposition, face à un jury ou à un public, sur une même musique. Les danseurs se succèdent un à un, suivant une alternance entre les équipes. Ils improvisent pendant une trentaine de secondes. Chacun passe environ trois fois sur scène.

 

Street Up 1

 Personne n’ayant plus de 60 ans en hip-hop, il n’y a pas de référence. Les danseurs cherchent leur propre « style » lors d’entraînements exigeants. Leurs sources d’inspiration sont multiples.

Même si la culture hip-hop se retrouve aujourd’hui un peu partout, y compris au 27 rue Saint Guillaume, Sidi reste assez inquiet. En effet le hip-hop est un mouvement assez jeune, dont l’avenir est incertain. De surcroit, il regrette qu’« aujourd’hui, la plupart des battles sont devenues des machines à sous ».

 

 Des participants enthousiastes

Enthousiaste, le public applaudit chaleureusement les passages. Beaucoup restent fascinés quand à la dextérité des danseurs, qui arrivent à effectuer nombre d’acrobaties tout en gardant leur couvre-chef. Ils se toisent souvent, ça ressemble parfois à un combat de coqs. Mais l’ambiance reste conviviale, les danseurs sont respectueux les uns vis à vis des autres.

Vient ensuite le vote. Les participants attribuent une note de 1 à 5, à chacune des équipes, en fonction de trois critères distincts : musicality, technicality, style. A un point près, c’est finalement l’équipe de quatre danseurs qui gagne.

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 Ce qui plait aux danseurs en participant à une battle, c’est « le partage dans le sens créatif, la danse marche par communauté » comme souligne Kim, ou encore le « fait de venir à l’impro, à la cool », pour Djibril. Et puis, précise Rico, on arrive toujours à s’en sortir, on n’a jamais de trou noir au moment d’improviser : « C’est la musique qui t’emporte, un peu comme quand tu joues d’un instrument ! »

Gaëlle Pouliquen, étudiante en 2A ayant organisé l’événement, commente : « Je suis tout à fait satisfaite du nombre de personnes ! Assez pour mettre une bonne ambiance, pas trop pour que tout le monde puisse voir. Si c’était à refaire, il faudrait écourter les vidéos pour laisser plus de place à la danse. Ce qui est sympa, c’est de faire rencontrer deux mondes, de mettre en avant le temps d’une soirée cette culture qui n’a pas toujours la côte. »