Sciences Po Monde Arabe, une association qui voit les choses en grand !

Capturer_SPMA1.JPGInterview de son président : Sélim Ben Hassen.

A Sciences Po, Sciences Po Monde Arabe (SPMA) est presque devenue une institution. Fondée en 2006, SPMA cherche à réfléchir et faire réfléchir les étudiants sur les enjeux du monde arabe sur tous les plans : politique, économique et social – un thème très dense et souvent méconnu ou mal connu au sein de l’école. Forte d’une certaine notoriété à Sciences Po, SPMA a su se développer et gagner en légitimité par une ligne claire et une organisation bien rodée. Retour sur les raisons de ce succès avec son président, Sélim Ben Hassen.

Une association politique, mais pas partisane

SPMA, à l’inverse des associations relatives au monde arabe qui ont existé à Sciences Po avant elle, s’est dès le début positionnée en tant qu’association politique, de fond, avec la ferme volonté d’éviter de devenir une association communautaire ou de réseau. La communication a donc d’emblée été organisée pour « ne pas rassembler les gens autour d’une identité ou d’intérêts particuliers, mais autour d’idées ». On trouve ainsi parmi la quinzaine de membres actifs de SPMA des gens de différentes origines : des marocains, des libanais, des juifs, des tunisiens…

De ce positionnement découle le programme de l’association, avec des conférences favorisant l’échange d’opinions différentes et la volonté explicite de ne pas inviter seulement des gens avec lesquels les membres de l’association adhèrent idéologiquement. Sélim revendique le parti pris de l’association de faire parler ceux qui n’ont pas de tribune, tel cet opposant tunisien poursuivi dans son pays (Moncef Marzouki), et d’évoquer des sujets peu connus du grand public, comme le féminisme islamique lors de la conférence qui a eu lieu le 30 avril dernier.

C’est cette diversité des membres et des invités qui fait la force de l’association : le choix des invités et des thèmes des conférences est soumis au vote des membres de l’association, sans qu’aucun membre n’ait de droit de véto, « pas même le président », insiste Sélim. Cette année, SPMA est en passe d’atteindre son objectif fixé en début d’année à une dizaine de conférences, un record à Sciences Po dont son président se dit « plutôt satisfait ».

Une organisation bien rodée

Dès lors que l’on favorise la diversité se pose la question de l’organisation. Afin de composer de manière efficace avec des personnes aux opinions divergentes, les membres de SPMA se réunissent une fois par semaine – le dimanche – afin de débriefer sur les dernières conférences et voter le thème des conférences futures ainsi que leurs intervenants.

Ce dernier point est crucial pour assurer la qualité des débats. Grâce à son expérience acquise après 3 ans à la tête de l’association (après réélection « purement démocratique » nous rappelle-t-il en souriant), Sélim a compris l’intérêt de diversifier les statuts des intervenants : s’il semble prestigieux d’inviter un ambassadeur, ce dernier n’est en effet bien souvent qu’un « VRP de son gouvernement » et n’apporte pas réellement une position d’analyste sur le sujet traité. Entre notoriété et compétence, il faut parfois choisir. SPMA affirme privilégier le deuxième critère, en considérant le premier comme un plus mais pas une réelle condition de sélection.

L’égalité des membres est elle-aussi respectée au sein de l’association. A SPMA, point de favoritisme ni de passe-droits : tout le monde tracte, pour le bien de la  «cohésion du groupe », à laquelle Sélim est très attaché. Mais l’enjeu à venir sera véritablement celui de son départ l’année prochaine.

Capturer_SPMA2.JPG« Défendre ses idées quoi qu’il en coûte »

Etre à la tête d’une association comme SPMA, politique et de plus en plus reconnue, pourrait facilement amener à faire passer des intérêts personnels avant tout. C’est en effet gagner en influence, se faire connaître et développer un réseau de personnalités de plus en plus prestigieux au fil du temps (Badinter, Védrine, Arkoun, Ben Achour, ambassadeurs et autres ministres). Conscient de ce risque, Sélim attache une importance à défendre l’intérêt et le positionnement de l’association avant tout, malgré des invitations et des offres politiques nombreuses. «La politique, ce sont des convictions, les plans de carrière sont un non sens dans ce domaine» déclare-t-il fermement.

Côté financement, SPMA a choisi de dépendre en grande partie du fond associatif afin de conserver son indépendance, bien qu’elle dispose aussi de deux partenariats formels avec l’Institut du Monde Arabe et de RMC Moyen-Orient par le biais d’une publicité mutuelle. Récemment, l’association est parvenue à nouer un partenariat avec la BRED Grandes Zé pour accorder des prêts sans caution parentale aux étudiants de Sciences Po « qui en ont le plus besoin ».

Retrouvez des compléments d’information dans les précédentes interviews :

Les premiers pas de SPMA, le 20 avril 2006

Interview de Sélim, le 16 mai 2008

Les conférences à venir porteront sur les thèmes suivants :

Jeudi 7 mai, à 18h30 : La peine de mort dans l’Islam et dans le monde arabe

Avec Florence Bellevier (secrétaire générale et spécialiste de la question de la peine de mort auprès de la FIDH), Robert Badinter, Yadh Ben Achour (professeur de droit musulman), Mohammed Arkoun (professeur émérite de la pensée islamique à la Sorbonne), Youssef Seddik (islamologue, anthropologue de l’islam et écrivain).

Inscription obligatoire auprès de: mondearabe@sciences-po.org

14 mai : La liberté de la presse dans le monde arabe

28 mai : L’éducation et le renouvellement des élites