Scoop : Kadhafi passe son chemin

Mouammar Kadhafi ne poussera pas plus loin la controverse soulevée par sa venue en France en faisant un détour par Sciences Po. L’Express nous apprend ce soir que des contacts avaient été pris avec l’administration de l’Institut dans l’optique d’une éventuelle visite, qui n’aura finalement pas lieu puisque le leader libyen refuse la forme du débat contradictoire (qui aurait permis à l’assistance de poser des questions). Le site du magazine soulève également la question délicate de l’atteinte au « politiquement correct » qu’aurait pu provoquer une telle visite…

17 Comments

  • marc

    Enfin, un petit dernier pour finir, écrit de la plume d’Amine Lotfi, pour le quotidien algérois El-Watan : "Tout près du chéquier libyen"

    "En accueillant le chef de l’Etat lybien, la France ne fait que profiter de son retour en grâce diplomatique…et de ses milliards de dollars. Le dirigeant lybien entame, à partir du 10 décembre, une visite officielle de cinq jours en France. Cette visite – dont Paris escompte de substantielles retombées financières – soulève une vague de violentes protestations de la part de l’opposition parlementaire et des organisations des droits de l’homme, qui jugent le colonel Kadhafi indésirable. Les autorités françaises ne semblent nullement embarrassées pour autant par ce vacarme politico-médiatique qui ne devrait pas compromettre la signature de gros contrats avec Tripoli. Le président français, Nicolas Sarkozy, s’est d’ailleurs montré pragmatique en assurant à son invité, lors du tout récent sommet Union européenne-Afrique à Lisbonne, qu’il était le bienvenu. Le colonel Kadhafi se rendra donc à Paris – selon une formule désormais consacrée – "en ami", c’est-à-dire en n’en pensant pas moins, car il est parfaitement informé des tirs croisés dont il fait l’objet.

    Pour lui aussi, le ton est au réalisme et à la conclusion de contrats qui amélioreront l’image de la Libye sur la scène internationale. Et, de fait, l’heure n’est plus où le colonel Kadhafi était voué aux gémonies tant par l’Europe que par l’Amérique, prêtes désormais à commercer avec une Libye revenue en grâce depuis qu’elle a affirmé qu’elle renonçait à développer des armes de destruction massive, en 2003, et qu’elle a dédommagé les victimes des attentats au-dessus du Niger, en 1989, et de Lockerbie (Ecosse), en 1998, qui avaient frappé des avions civils. Depuis cette date, le colonel Kadhafi a reçu la quasi-onction du président Bush lui-même et il est redevenu parfaitement fréquentable pour l’ensemble des capitales, dans un contexte où le réalisme économique prime sur bien d’autres considérations.

    Le président français avait d’ailleurs souligné, à Lisbonne, qu’il encouragerait "le retour à la respaectabilité internationale" du colonel Kadhafi. Le rapprochement entre Paris et Tripoli avait connu un temps fort, cet été, lors de l’épisode de la libération des infirmières bulgares détenues en Libye. En contrepartie du geste du colonel Kadhafi, Paris aurait pris un certain nombre d’engagements, en particulier dans le domaine du nucléaire civil. La France est désireuse d’exporter sa nouvelle génération de réacteurs et de vendre dans le monde ses nouvelles technologies. Mais l’un des objectifs de la visite du dirigeant libyen en France concernerait des contrats d’armement et plus particulièrement d’avions de chasse Rafale, que l’industrie aéronautique française peine à placer. La Libye serait l’un des rares pays, pour ne pas dire le seul, à acquérir ce matériel de combat, qui fera son apparition dans une région qui a bien d’autres priorités. A cet égard, la visite du colonel Kadhafi est déjà tout bénéfice pour la France et son industrie militaire. Même s’il est peu probable que le dirigeant libyen ait droit, en retour, à des bains de foule sur les Champs-Elysées."

  • BBT

    Les gens ont plébiscité la téléréalité, maintenant ils se laissent bercer par la realpolitik. Finalement, c’est comme de la TVréalité, mais dans un Palais…

    Où est passé l’opinion publique française d’habitude si prompte à la critique? Le président prend des airs colonialistes à Dakar. Moui, ça passe. Le président piétine la laïcité au Latran. Ca passe encore plus facilement. Je passe le discours de Constantine, les félicitations à Poutine, la visite de Kadhafi, c’est écrit au dessus.

    Hey ho! Réveil matin, c’est le visage de la France qu’on est entrain de lacérer à grands coups de machette!

    On espère que les français vont se réveiller un jour, et si possible avant dans cinq ans, pas que l’exploit se répète.

  • marc

    Et en voici un autre, un peu plus long, écrit par Joseph Hanimann pour le Frankfurter Allgemeine Zeitung : "Kadhafi scelle la fin des intellectuels"

    "On savait depuis longtemps que, même en France, les protestations d’intellectuels ont perdu de leur impact. On vient d’en avoir la confirmation. Au beau milieu du tollé suscité par la visite d’Etat de l’autocrate libyen Kadhafi, Bernard Kouchner a eu une phrase lourde de sens. Le temps est venu des négociations politiques, a-t-il déclaré, où les principes moraux n’incarnent qu’une demi-vérité. Realpolitik ? Non : pour le ministre que la politique étrangère sans scrupule de Sarkozy rend de plus en plus nerveux, l’autre demi-vérité est celle des résultats concrets – libération des infirmières bulgares en été, visite d’Etat en automne. Il faut regarder vers l’avant. Donc, oui, realpolitik.

    Avec cette visite de Kadhafi, Sarkozy met à rude épreuve la conscience et l’intégrité morale de ses partisans issus des rangs intellectuels. Des personnalités qui n’ont jamais penché en sa faveur et qui, face à ses réussites concrètes de ces dernières semaines, ne pipaient plus mot recommencent soudain à donner de la voix. "Dans le pays des droits de l’homme, il y a là quelque chose qui ne passe pas", déclare Bernard-Henri Lévy : "On n’invite pas en visite d’Etat un grand terroriste ou un preneur d’otages international."

    Ce n’est pas le fait que l’on reçoive un dictateur qui serait scandaleux, mais la manière de le faire, "avec la pompe protocolaire et de surcroît pour la journée internationale des droits de l’homme", s’insurge Pascal Bruckner. On ne trouverait là que peu de traces de la rupture annoncée avec l’ancien cynisme d’Etat. Faut-il donc reprendre les appels à la protestation ? "Plus que jamais", assure Bruckner, "plus on crie fort, plus on a de chance d’être entendu, y compris par Sarkozy."

    La pilule est dure à avaler pour ceux qui avaient soutenu le candidat Sarkozy, tel André Glucksmann. Jamais on ne les a aussi peu entendus. L’empressement du président français à féliciter Vladimir Poutine pour sa victoire aux élections parlementaires russes a déjà été une "déception" pour le philosophe. Aujourd’hui, il juge désastreux que Kadhafi se voie offrir une tribune politique à l’Elysée et à l’Assemblée nationale. Les intellectuels français tels Glucksmann étaient habitués à voir réagir les hommes politiques à leurs protestations. Le mépris et la suffisance de Sarkozy bousculent leurs vieux schémas.

    Toutefois, les protestations les plus violentes contre la visite d’Etat du dirigeant libyen ne sont pas venues des cercles d’intellectuels mais du gouvernement lui-même. Le commentaire sans ambiguïté de la secrétaire d’Etat aux droits de l’Homme, Rama Yade, pour qui la France "n’est pas un paillasson sur lequel un dirigeant, terroriste ou non, peut venir s’essuyer les pieds du sang et de ses forfaits", a largement été repris par les opposants à cette visite. C’est là qu’apparaît la véritable "rupture" du nouveau président. Son gouvernement ne détermine pas seulement la politique du pays, il fournit en prime la critique. La realpolitik à laquelle Sarkozy initie les vieux idéalistes et ses nouveaux alliés ne se déploie pas dans la discrétion feutrée des salons gouvernementaux mais dans les médias, où les intellectuels étaient autrefois chez eux. Le problème est que cette conduite nuit autant à la crédibilité des intellectuels qu’à celle du président."

  • marc porta

    En parlant de la visite de cinq jours du nouveau grand ami de la France, voici un court extrait d’un article signé Massimo Nava pour le Corriere della Sera :

    "Au lendemain de son élection, Nicolas Sarkozy avait promis que la France serait "du côté des opprimés du monde" ; or il a été le premier chef d’Etat à féliciter Vladimir Poutine pour la victoire de Russie unie aux législatives. En visite à Pékin, le président français, faisant allusion à Taïwan et au Tibet, a rappelé qu’"il n’y a qu’une seule Chine". Préoccupé, comme on peut le comprendre, par le sort d’Ingrid Betancourt, il a reçu avec les honneurs le président du Venezuela, Hugo Chavez. Reconnaissant pour la libération des infirmières bulgares, il a chaleureusement accueilli le leader lybien Muammar Kadhafi. Aux naïfs et aux idéalistes on répondra que cette logique de politique étrangère incarnée aujourd’hui par Nicolas Sarkozy a pour nom realpolitik. On peut protester haut et fort quant au sort fait à la Tchétchénie, mais c’est de Russie que proviennent gaz et pétrole. On peut être solidaire des moines birmans, mais leur avenir dépend de la Chine et de l’Inde, les nouveaux géants de la planète. C’est ce qu’a si bien compris Nicolas Sarkozy."

  • y'a personne pour le dire...

    Et oui Bono, y’a personne pour dire ça. Un gouvernement sans collégialité, et sans démission quand on se fait humiler en public comme Yade… Toujours plus douteux.
    Mugabe est sur la liste des prochains évités à l’Elysée?

  • bono

    Sarkozy est une lavette

    il fallait que cela soit dit tout de même. Ce gouvernement est un canular, et les français y adhèrent les yeux fermés. Bernard "sacderiz" Kouchner qui ne se manifeste même pas, Yade qui se fait jeter, SArkozy qui déroule le tapis rouge à ce psychopathe ( certes pas dénué d’humour), c’est à se demander où son passés les usages….

    Et le plus drôle ce sont ces "contrats", déja signés, ou alors pas négociés, qu’on nous brandit comme justification ultime de cette mascarade. Avant qu’on envoie un rafale à l’étranger, de l’eau aura coulé sous les ponts…

  • mouais

    c’est fou le moulage sciences po ! comble de la pensée unique, "vive sarko", attention au politiquemebt correct…,
    ouvrez les yeux, au lieu de sortir vos théories qui s’indigne devant une dictature mais pas devant un président dénué de conscience "éthique"….
    vivement que ça change à sciences po, pffff

  • Thomas

    Ca c’est certain. Je ne sais pas qui ose le faire d’ailleurs.

    Quoi qu’il en soit, cet homme n’avait pas à mettre les pieds à Sciences-Po, c’est bien ce qui s’est passé, l’honneur est donc sauf!

    PS: par contre si vous voyez un homme au visage un peu plastifié et avec de grosses lunettes de soleil en pleine péniche, sonnez le tocsin! S’il est accompagné de femmes en treillis, mettez vous à couvert aussi, c’est plus sûr ;-))

  • et les pétrodollars

    "affamer des millions de lybiens" serait le résultat des commandes passées, qu’il reste encore, soit dit en passant, à négocier?

    Et les pétrodollars?

    Vendre des armes à un tel régime n’est sans doute pas éthique, mais je ne suis pas sur du tout que de tels dépenses répande la famine.

    Si ces annonces peuvent être critiqué, c’est sur un plan éthique et non pas économique.
    La gestion du pays par un régime dictatorial est une autre affaire. Elle doit être dénoncée tout autant que les politiques du pouvoir en place.

    Quant à la venue du leader lybien, un débat contradictoire aurait pu avoir un intérêt-certes très limité pour Kadhafi qui se serait vu assailli des critiques qu’on doit lui faire. Mais tel que le concevait les proches du "guide", il n’en avait strictement aucun. Pour qu’il continue à vanter son régime, cela suffit bien de le voir à l’Elysée…

  • Pareil

    Ce serait tellement über-cool qu’il vienne. Il inaugure le concept de dictateur-rockstar, ce qui est un tour de force. Je VEUX ses lunettes de soleil et sa tente

  • Alexandre

    Dommage, même si je n’approuve pas du tout sa venue en France, je pense que ça aurait été mémorable (pas pour la qualité du débat évidemment!)

  • mouais

    Ce qui me choque le plus, à part la méthaphore du chocosuisse complétement débile en passant, c’est notre président qui a tout de même accueilli à bras ouverts cet adorable tyran… alors entre les deux je ne sais pas qui est le pire… de plus faut pas se plaindre sarko a affamé des millions de lybiens pour donner du travail au pauvre petit français, vive la république, vive la FRANCE !!! et vive les droits de l’homme biensûr ….

  • Les Chocosuisses contre Kadhafi

    Pour protester contre la venue du dictateur sanguinaire Mouammar Kadhafi à Paris, un grand rassemblement de chocosuisses est organisé en Péniche samedi 10h.

    Venez nombreux montrer au tyran que rien n’arrête le grand mouvement d’émancipation du chocosuisse, pas même son régime infâme, raciste et dégénéré: il entraîne dans sa folie meurtière et autodestructrice le peuple des viennoiseries, qu’il détourne de la voie démocratique et libérale du chocolat.

    En échange de quelque avantage, certains de nos chocosuisses les plus haut placés ont renié leur cause, notre cause. Ils se sont hypocritement cachés derrière leurs pépites de chocolat durant la campagne, avant de révéler leur compréhension des relations internationales au monde de la pâtisserie effaré, et ce en reniant la voie du chocosuisse…

    Car comme disait le poète, "le chocosuisse est l’avenir de l’homme"…