Antoine Petat, responsable du recrutement chez BNP Paribas

M. Antoine Petat est responsable recrutement pour la Banque de Détail en France de BNP Paribas et ancien diplômé de Sciences Po (2001). Nous l’avons interrogé sur la politique de recrutement de BNP Paribas, notamment à l’égard des étudiants de Sciences Po.

Pouvez-vous nous présenter rapidement les activités de BNP dans le domaine de la banque de détail?

‘Le pôle Banque de Détail de BNP Paribas a pour objectif de proposer à ses clients une large gamme de produits et services, de la tenue du compte courant jusqu’aux montages complexes en matière de financement des entreprises ou de gestion patrimoniale. Notre objectif est de servir au mieux le client, en lui donnant la possibilité de rencontrer des spécialistes de sa problématique. Nous offrons ainsi des conseils financiers de qualité aux particuliers et accompagnons les entreprises__ dans le développement de leurs projets.’

Comment recrutez-vous en général, quels sont vos critères de recrutement ? qu’est ce qui est « rédhibitoire » à la lecture d’une candidature ? qu’est ce qui est apprécié/valorisé ?

‘Le plus important pour nous est de déceler un fort « sens du client » et un bon tempérament commercial chez les personnes dont nous retenons la candidature. Nous veillons ainsi à recruter des professionnels capables de comprendre nos clients et de leur proposer les produits correspondant précisément à leurs attentes. Nous recevons la majorité des candidatures par internet mais organisons également des procédures originales permettant d’aller au delà d’une simple analyse de candidature par CV (Opérations Entretiens Immédiats; recrutement sur Second Life).

Même si la première étape du processus de recrutement consiste à étudier le CV des candidats, nous recherchons avant tout des personnes ayant des qualités commerciales. Il n’est pas nécessaire d’avoir fait des études de finance, sauf pour des postes qui comportent une forte dimension technique et ce d’autant plus que nous avons une école de formation interne appelée « Ecole du Commerce » qui permet d’intégrer en formant au mieux des personnes aux backgrounds très différents de la banque.

Nos critères de recrutement permettent donc à des personnes qui ont un parcours « atypique » de tenter leur chance. Plus que le parcours des candidats, ce sont leurs aptitudes commerciales ainsi que des dynamiques professionnelles fondées sur des qualités précises -réactivité, créativité, engagement et ambition- qui sont prises en compte durant le processus de recrutement. ‘

Quelle image avez-vous de SciencesPo et de ses étudiants ? de l’étudiant de SciencesPo ?

‘Les étudiants de Sciences Po sont des personnes d’un très bon niveau, mais qui manquent souvent de spécialisation. Il nous arrive néanmoins de recruter des jeunes diplômés de Sciences Po au sein de la Banque de Détail en France même si la plupart intègrent la Banque de Financement et d’Investissement. Il est à noter que des parcours professionnels riches à fortes perspectives d’évolutions existent pour les Sciences Po en Banque de Détail. Ainsi le poste de Directeur d’agence permet-il de concilier des responsabilités managériales ainsi que la gestion des enjeux patrimoniaux ou corporate des principaux clients d’une agence. ‘

Avez-vous des préjugés –positifs ou négatifs- sur les SciencesPo ?

‘Même si je n’adhère pas à la notion de ‘préjugés’- c’est le coeur du métier de recruteur d’aller au delà de cette barrière nuisant à un bon recrutement- et que toute généralisation est évidemment abusive, on peut noter deux perceptions, l’une négative et l’autre positive au sujet des étudiants de Sciences Po.

On peut a priori dire des étudiants de Sciences-Po qu’ils sont parfois trop généralistes et théoriques et manquent de connaissances concrètes directement utiles en entreprises. Mais d’un autre côté, ils ont des capacités d’écoute, d’analyse et de synthèse certaines, une rigueur intellectuelle porteuse également. Ils sont de fait capables de comprendre rapidement un problème dans sa globalité. Je tiens à dire que la récente réorganisation de Sciences Po impulsée par Richard Descoings contribue de plus en plus largement à gommer cette ancienne image du Sciences Po loin de l’entreprise même si des efforts restent à fournir. ‘

Êtes-vous familier des différents masters de Sciences Po ? Quels masters connaissez-vous le plus/le moins ? Pourquoi ?

‘Nous ne connaissons pas forcément les spécificités de tous les masters professionnels de Sciences Po, mais la formation dispensée étant de qualité, c’est toujours le diplôme de l’école qui nous intéresse beaucoup. Toutefois la spécialisation fait de plus en plus la véritable différence, entre les Sciences Po notamment. ‘

Vous êtes plutôt « Sciences Po » ou « École de commerce » ? Pourquoi ? Quelles qualités recherchez-vous chez un Sciences Po?

‘La valeur ajoutée des étudiants de Sciences Po par rapport aux Grandes Écoles de Commerce, c’est leur culture générale due notamment aux premières années d’étude mais encore aux troncs communs en années de master qui permettent constamment de mettre en perspective les compétences techniques par ailleurs à acquérir. Même si les étudiants issus des Écoles de Commerce ont généralement une formation plus technique, ceux de Sciences Po ont des qualités spécifiques qui proviennent du fait qu’ils reçoivent des enseignements en sciences humaines en plus de ceux plus tournés vers le monde professionnel. ‘

Est-ce que vous recevez beaucoup de candidature de notre école? Si oui, pour quel type de poste?

‘Nous recevons malheureusement peu de candidatures de Sciences Po en Banque de détail en France. Le plus souvent, les étudiants qui postulent à BNP Paribas le font en Ressources Humaines, Fonctions Centrales, Fusion Acquisition ou Financement Structuré. Les étudiants de Sciences Po sont peu attirés par les postes proposés en banque de détail. C’est dommage. Cette situation s’explique par de nombreux a priori quant aux métiers que nous proposons et aux perspectives de carrières… Mais l’enjeu essentiel pour un étudiant est de s’orienter au mieux. ‘

Quand vous recrutez un Sciences Po, qu’est-ce qui compte le plus?

‘Quelle que soit la personne dont nous étudions la candidature, l’essentiel demeure que le futur salarié puisse répondre aux attentes de l’entreprise, à celle de ses clients et qu’il puisse trouver une perspective de carrière également source d’épanouissement pour lui. Les personnes retenues doivent donc être réactives, créatives, ambitieuses, engagées, savoir être à l’écoute des clients (internes ou externes) et s’adapter aux situations professionnelles qu’ils rencontrent d’une part. D’autre part, ces personnes recrutées, doivent pouvoir s’identifier aux projets professionnels que nous proposons afin de s’épanouir dans leur carrière. Or c’est au candidat qu’il appartient de bien choisir l’entreprise dans laquelle il postule. ‘

Dans la plupart des banques, il existe un barème de salaire en fonction de la formation dont est issue la personne concernée. Quel salaire pour un SciencesPo ? Comment nous situons-nous par rapport aux autres formations ?

‘Les salaires auxquels peuvent prétendre les Sciences Po se situent dans le haut de la fourchette des rémunérations que nous proposons. Leur niveau de rémunération est globalement équivalent à celui des diplômés des meilleures Écoles de commerce. Par ailleurs et au-delà des diplômes, la grille de rémunération chez BNP Paribas tient compte d’autres éléments (stages, alternance…).’

Si vous deviez donner un conseil à un étudiant de SciencesPo pour maximiser ses chances d’être retenu dans votre banque et/ou pour optimiser sa carrière professionnelle en banque, quel serait-il?

‘Je pense que les étudiants de Sciences Po devraient miser sur trois choses. D’une part développer leur culture générale et leur ouverture aux autres et au monde; d’autre part acquérir des compétences métier spécifiques grâce à une expérience en entreprise (type année de césure) et des cours de spécialisation. Les tâches accomplies au cours de cette expérience doivent bien sûr être en lien avec le poste pour lequel ils entendent postuler.

D’une manière plus large, je pense que Sciences Po doit continuer à cultiver l’ouverture d’esprit de ses étudiants, leur curiosité intellectuelle également. L’école doit conserver sa spécificité tout en devenant plus professionnalisant sur certains aspects.

Finalement, les étudiants de Sciences Po, doivent accorder une place importante à une réflexion autour de leur orientation professionnelle, se poser les bonnes questions afin de pouvoir choisir la carrière leur offrant les meilleures chances de se réaliser et de ne pas être contraint de faire des non-choix, faute d’avoir anticipé leur sortie sur le marché du travail.’

4 Comments

  • Cécile

    Ah mais ça nous va très bien… je pense que Sophie a surtout voulu dire que les RH étaient de plus en plus une voie royale pour un Sciences Po en entreprise (et même en institution, cf. l’interview du mec d’AP). Tout compte fait, c’est un peu l’homme politique de l’entreprise…

  • Paméla

    C’est un choix délibéré: un ancien étudiant de l’école qui travaille en RH peut davantage nous en apprendre sur la perception de l’Ecole dans la monde professionnel, d’une part, parce qu’il a été confronté à la nécessité de vendre le label Sciences Po au sortir de l’Ecole, d’autre part, parce qu’il connait les critères de recrutement de son entreprise et peut nous donner un point de vue éclairé sur les forces et faiblesses de notre diplôme et la perception qu’en ont les recruteurs. Mais rassure toi, de nombreux interviews seront bientôt postés sur le site et il y en aura pour tous les goûts 🙂

  • Sophie

    Wahou! Que des DRH passés par Sciences Po dans les gens que vous interviewez! A croire que Sciences Po ne forme plus que cela…