Walk this way

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Oubliés, vos premiers jours à Sciences Po ? Diantre non ! Ces moments magiques, fabuleux, (regrettables ?), sont gravés dans la mémoire d’une majorité d’entre vous… Et pour toutes les exceptions, laissez-moi vous resituer le contexte.

On en apprend tous les jours à Sciences Po. Surtout au début. Evidemment, en conférences de microéconomie ; mais plus généralement, je suis amenée bien malgré moi à mener une étude socio-anthropologique sur le comportement du sciences-piste hors de son habitat naturel. Car non, inutile d’aborder l’analyse de ses agissements en Péniche, errant du stand UMP à celui du BDE-LCL d’un air hagard, luttant vaillamment contre une queue de trente huit personnes aux toilettes, ou même franchement ébaubi devant l’agression de vingt-huit flyers à la minute. Inutile, donc.

Néanmoins, j’entretiens une prodigieuse fascination pour l’examen incontournable de la conduite du sciences-piste sur le boulevard Saint Germain. Ne disposant pas d’assez de connaissances pour nourrir un plan en 2 parties 2 sous parties (I. la foulée du sciences-piste entre la rue du Bac et la rue Saint Guillaume, II. Ses agissements de Saint Germain-Des-Près à la rue Saint Guillaume), je ne suis en mesure que de traiter la deuxième partie du sujet, en présumant en outre que les deux parties s’affronteraient dans une redondance ignominieuse.

A l’étude, plusieurs conduites foisonnant de détails. Il y a d’abord le sciences-piste léthargique (phénomène appréciable par sa rareté) : trainant les pieds à grand renfort de raclements de converses sur le bitume, apathique et lent, celui-ci s’apparente de dos à un touriste japonais ayant égaré son Paris Pratique (côté pile, le sciences-piste peine à garder les yeux ouverts, mais n’entrons pas dans des détails scabreux). De retour d’une soirée BDE, ou tout simplement dans l’expectative d’un cours magistral d’histoire contemporaine, le sciences-piste léthargique n’a aucune conscience de la file de sciences-piste non-léthargiques qui s’évertue depuis huit minutes à le doubler par la gauche, ah non par la droite, et merde bon bah par la gauche, bordel mais avance ducon.

Entre également en considération le sciences-piste faussement indifférent. Celui-ci adopte l’équivalent du comportement du sciences-piste léthargique sans en pousser les attributs à l’extrême. Certes il flâne, mais ne titube point. Certes il sifflote, mais tous ses sens sont en alerte. Entérinant un air dégagé, il observe, l’air de rien, la collection automne-hiver Ralf Lauren à 3 loyers mensuels la chemise, tout en poursuivant son objectif premier : atteindre le 27 coûte que coûte. Le sciences-piste faussement indifférent ne répudierait pour rien au monde sa double mission initiale, à savoir paraître décontracté tout en chourant la meilleure place en Boutmy, vous savez, celle que vous n’arrivez jamais à avoir parce que son postérieur y trône déjà alors que vous en êtes encore à écraser votre cigarette sur le parvis.

Pendant ce temps, à Saint Germain...Enfin il y a les plus nombreux, mes préférés et ceux auxquels j’appartiens raisonnablement : les sprinters. Le sciences-piste sprinter se repère à son inimitable capacité à élastifier son pas le long du boulevard saint germain. Non, il ne s’est pas réveillé en retard. Oui, son cours ne commence que dans 25 minutes. Qu’importe. Vif et nerveux, il slalome avec habileté entre les groupes de vacanciers chinois ou rosbeef. Tout en lui n’est que fougue et impétuosité ; monté sur ressort, sa foulée s’amplifie à mesure qu’il se rapproche de son but. Sur le qui-vive, il double, dribble. Ses concurrents sont loin devant mais il remonte le trottoir en quelques minutes d’un pas souple et maîtrisé. Ils sont désormais semés, affaiblis par crampes, points de côté, et autres tribulations insoutenables. L’issu est proche mais il ne lâche rien, courir révélerait imprudemment ses aspirations alors il maintient sa vitesse de croisière, traverse au rouge rue de Rennes, putaindebordeldemerde tu vois pas l’piéton connard ?? Soudain non, un groupe de vacanciers en tongs bloquent l’intégralité du trottoir mais que nenni, il s’enfonce dans le tas, bousculant vaillamment le SDF en stationnement depuis 3 mois au milieu du passage et oui, enfin, le coin de la rue apparait !

Devant le niveau du sprinter, l’on déclare forfait à tout va. Des larmes, des cris, de la dope, mais quelques irréductibles maintiennent notre compatriote en joue. Un coureur tourne au coin des Saints-Pères, il s’en trouve disqualifié sur le champ. Et cependant quatre autres outsiders restent dans la course, machiavélisme, roublardises et fourberies de rigueur : l’une secoue sa chevelure L’Oréal et déconcentre ainsi l’adversaire, tandis que d’autres balancent négligemment leurs cendres dans la gueule du challenger. Mais notre sprinter n’est plus qu’à quelques mètres, il tourne au coin et c’est la dernière ligne droite, il ne lâche rien, pas même son pavé de droit constit’ et institutions politiques. Quelques prétendants tentent un croche-pied désespéré mais c’est trop tard, oui, il s’enfonce dans la foule et passe, en sueur, la ligne d’arrivée.

Rogue, il parade quelques secondes en Péniche, traverse les derniers mètres restant. Et constate, hors d’haleine, que des dizaines de sciences-pistes faussement indifférents trônent déjà aux meilleures places en Boutmy.

14 Comments

  • grain de sel

    @Shade: tu sais les gens s’en foutent de ce que tu fais sur ton poste en bibli. Ne pas être le centre du monde semble être difficilement acceptable decidement

  • Shade

    Moi j’ai fait plus qu’ébaucher un sourire en lisant ça. Je me suis mis à rire toute seule en bibli du 27, alors que mes compatriotes sciences-pistes me toisaient l’air de dire « Elle accapare un ordi et en plus elle fout que dalle, la conne! ». Bref je suppose qu’il faut avoir un peu d’humour et apprécier les vérités toutes simples pour savourer cet article. Pour ma part j’aime!! A quand un article sur l’espionnage du glandage incognito sur ordi en bibli?

  • cclol

    +1 Rafoufou
    C’est dommage, mais il semblerait que ce style pompeux soit un fléau plutôt répandu par ici.

    Bon courage à la rédactrice ceci dit.

  • Caro Wizzi

    Article enjoué et drôle. C’est prometteur !
    Quant au premier commentaire, il semble avoir été écrit pour l’un des personnages de la chanson ô combien percutante d’Helmutz Fritz. Mmh, ça m’énerve.

  • Victoire Dupont-Aignan, lq vrqie

    @ « VDA » non mais il va falloir se calmer là. je sais pas si ça te fait bander d’utiliser mon nom en pseudo pour dire de la grosse merde (qui plus est avec un style pourri), si tu trouves ça super drôle ou quoi que ce soit mais moi tu me fais surtout de la peine, parce que bon, si tu n’as rien d’autre à faire, c’est vraiment triste. Et chier accessoirement. Alors si tu as un problème, tu prends tes couilles et éventuellement on peut en parler. SInon tu peux juste aller t’étouffer avec.

  • VDA

    Oulaaa steuplé meuf réveille-toi.
    Il manque une catégorie là : ceux qui s’imposent d’eux-même, dont le simple nom impose respect et soumission. Encore un qui veut me draguer ou une qui veut me ressembler ou me cotoyer ? Il y a toujours des places qui se libèrent. Tant pis pour les places réservées par mes Bestah. Oui chérie, pendant que tu attends debout en Chapsal, moi il y a souvent 3 ou 4 places qui m’attendent. VDM pour toi.