Une nouvelle AG, brumeuse

IMG_3897.JPGMoins nombreux, tendus suite à l’occupation de mardi, les étudiants mobilisés se sont réunis en amphi Eichtal ce midi. Une suite constructive du mouvement semble toutefois avoir été dégagée.

Deux points « chauds » occupaient le début de l’ordre du jour. En premier lieu, le compte rendu de la Coordination Nationale des Etudiants réunie à Strasbourg le week-end dernier. Arnaud, délégué de l’AG et membre de SUD Etudiant, en vient rapidement aux faits : l’UNEF a boycotté la Coordination. Si la section locale n’est pas en cause, une consigne semble avoir émané du bureau national, comme le suggèrent les propos du président de l’UNEF Jean-Baptiste Prevost dans Libération, selon lesquels les assemblées générales universitaires « n’ont pas autant de légitimité que des syndicats pour négocier ». Proposition est faite – et adoptée – de réaffirmer la seule légitimité de la Coordination Nationale des Etudiants (composée de délégués de toutes les AG) dans le mouvement.

Si les membres de l’UNEF acceptent cette concession, ils ne manquent pas dans la foulée de renvoyer la balle à SUD : alors que le comité de mobilisation avait décidé de prévenir l’administration de l’occupation nocturne de mardi, d’organiser des conférences, ou encore de mettre en place un service d’ordre, le programme aurait été court-circuité par une réunion informelle de quelques personnes. Une motion appelant au « respect des décisions des AG et comités de mobilisation » permet une nouvelle fois de calmer le jeu.

Sans occulter pour autant le débat sur l’occupation. Manon, de l’UNEF, n’hésite pas à interpeller l’assemblée : « dites-vous pourquoi le nombre d’étudiants en AG a tellement diminué ! » Devant la cinquantaine de présents, elle crie au scandale, se plaignant d’avoir subi des menaces alors qu’elle négociait avec Nadia Marik pour qu’elle n’envoie pas les CRS. Du côté de SUD, on déplore les dégradations, sans dramatiser la situation : « on a eu de la chance que ça se soit passé aussi bien, qu’il n’y ait pas eu de violences et de destructions », argue Ben. Adrien lui emboîte le pas : « Ca s’est très bien passé, ce qui est inacceptable c’est l’attitude de l’administration qui a proféré des menaces d’exclusion ». Si les responsables de ces menaces se sont excusés, les étudiants soupçonnent que la technique ait été bien réfléchie, et déplorent que la direction se soit servie des appariteurs « comme d’un fusible ».

Ces points clarifiés, un compte-rendu est fait sur la mobilisation des doctorants ; l’occasion de s’associer à la lettre ouverte à Richard Descoings, Philippe Weil et Bruno Latour (voir l’article Pourquoi se mobilisent-ils ?).

Le mouvement étudiant, lui, semble à première vue essoufflé. Samuel se désole : « là c’est complètement mort… », s’inquiétant de l’absence de direction claire tant au niveau national que local. Ses camarades sont là pour lui remonter le moral : pour Adrien, « On ne peut pas se dire sur la base de l’AG d’aujourd’hui que le mouvement est mort. On est fatigués dans la tête, fatigués moralement, mais il n’y a pas de baisse du mouvement à Sciences Po autant qu’on peut l’imaginer. C’est tout de même la semaine où on a fait le plus d’actions différentes et touché le plus de monde ! » Lucile continue sur cette note d’optimisme, mettant le doigt sur l’impact médiatique de l’occupation de mardi : « même Nice matin en a parlé ! »

Plusieurs pistes ont finalement été dégagées pour la semaine à venir. Outre un appel à la mobilisation « de la maternelle à l’université » du 2 avril, un retour à de l’information auprès des étudiants est au programme : rédaction d’un nouveau tract « de fond », kermesse, diffusion d’un film…

La mobilisation en est à sa cinquième semaine à Sciences Po.

Photo : Antoine Genel

9 Comments

  • Sandra (Martine)

    Je ne donne pas de leçon, je donne mon avis et je peux concevoir qu’on s’en foute de cet avis, mais la section commentaire existe juste pour ça, donc je profite, hein!
    Je vais pas plaindre la « brochette » d’individus, je ne vais pas non plus vous ériger en martyrs ou larmoyer en pensant à vous (cf. le moment Calimero « toujours reposer sur les mêmes les efforts de mobilisation »). Vous luttez pour vos idées, à votre manière. Je pense que cette manière est contreproductive, je le dis, voilà tout.
    Aussi, j’ai pas la prétention de donner des « leçons de morales » et je trouve que tu t’enflammes un peu vite, sans doute l’épuisement militant. Disons cela. Ou alors de la bonne rhétorique victimisatrice -remarque, ça marche bien.
    PS: « vous » c’était pour tous les supporters des blocages et autres gestes, symboliques, pour rester neutre.

  • bk

    @ Sandra (Sandra de l’ena ?)
    J’ai envie de dire, si tu veux convaincre les camarades, et contribuer de façon positive au mouvement, épargne nous ce ton donneur de leçons. Encore de la … « pé-da-go-gie » ? (comme on aime si bien à dire… dans la section ?)
    Que veut dire ce « vous » ? qu’il y a d’un côté ceux qui adhèrent, et de l’autre ceux à qui on sous-traite la mobilisation ?
    La « brochette d’individu » n’a pas choisi d’être une « brochette », et serait ravie que la mobilisation s’élargisse, ce qui faciliterait bien des choses, rendrait les militants plus confiants, et aurait peut-être évité ce qui s’est passé… Pourquoi sont-ils venus ? Peut-être parce que certains ne sont pas cru assez nombreux, assez forts pour faire le blocage eux-même… Des imbéciles, oui – mais il y en a partout. Mais si l’on ne faisait pas toujours reposer sur les mêmes les efforts de mobilisation, on en serait sûrement pas là.
    Alors on peut critiquer ce qui s’est passé, et pointer certaines responsabilités particulières, mais stp épargne aux mobilisés tous confondus ces grandes leçons moralisatrice, parce que les militants sont épuisés, et font le boulot que « vous » ne faites pas.
    (Au fait qui était au gouvernement quand le processus de Bologne a été lancé ?)

  • Sandra

    J’ai envie de dire, ça sent de plus en plus la guignolade tout ça… On dirait une brochette d’invididus utilisant un motif valable de mobilisation (car oui, j’adhère aux idées de ce mouvement) et qui essaie de jouer son propre mai 68 en gros… Revenez à l’idéologie et à l’argumentaire, au lieu de donner dans la comedia del arte, je pense que ça sera plus efficace et ça évitera de braquer une grande partie de vos camarades contre vos idées.

  • bk

    Le manque de mobilisation en AG est certainement due à l’occupation des militants par des actions très nombreuses cette semaine, et à l’absence de tractage massif, plutôt qu’au bilan de l’occupation.

    Cependant on ne peut nier que celui est négatif. Au delà des dégradations, certes peu nombreuses, et anecdotiques (R. Rémond s’en remettra) on ne peut tolérer la prise à partie des appariteurs aux portes du 13. Autant l’usage de la force et la transgression participent peut-être de façon inévitable du mouvement contestataire, autant la violence ne peut être excusée, surtout vis à vis des salariés. On n’est pas de gauche quand on s’en prend aux travailleurs. Et il y a eu véritablement violence, même si elle a pu être relativement contenue par la plupart des étudiants qui s’y sont opposés activement.

    Pour moi les remarques qui tendent à occulter cet aspect des faits ne représentent pas la position de sud, mais seulement de certains de ses militants. Les débordements ont été officiellement reconnus et condamnés par les deux syndicats. Cela fait consensus dans l’ensemble des organisations présentes dans la mobilisation. Il est dommage que certains militants continuent à occulter ces faits, à dire que « tout s’est bien passé ». Ils représentent une minorité du mouvement (qui ne clive pas les organisations mais les traverse), sur laquelle chacun désormais est averti.

    Cela ne doit pas empêcher la mobilisation de continuer et de reprendre un nouvel élan. Aux militants qui s’investissent et essayent vraiment de construire quelque chose : merci et gardez courage !

  • Baptiste

    Remarque pertinente, mais conclusion rapide : si l’AG était centrée sur des questions de stratégie, c’est parce que les étudiants présents, moins nombreux, étaient quasiment tous présents depuis le début du mouvement, et donc au courant des tenants et aboutissants des réformes en cours. Crois-tu vraiment que des étudiants seraient prêts à consacrer leur temps et leur motivation à cette mobilisation s’ils n’étaient pas conscients du sens du mouvement ? La volonté de revenir à un travail d’information auprès des étudiants prouve d’ailleurs le contraire.

  • Georges Abitbol

    Formidables contributions où il n’est question exclusivement de mobilisation, de motivation, d’AG, de légitimité, etc. C’est à croire que la question du sens de ce mouvement reste finalement très secondaire…

  • David

    On peut peut-être aussi ajouter que la baisse de fréquentation à la dernière AG est due en grande partie au fait qu’il n’y a pas eu de tractage massif pour prévenir du rendez-vous, comme cela a été le cas les semaines précédentes. La faute n’est pas à attribuer à la démotivation et à la démobilisation mais, bien au contraire à l’utilisation de nouveaux modes d’action (occupation, pièce de théâtre…) qui ont pas mal occupé les étudiants en lutte ces jours-ci, leur faisant peut-être quelque peu oublier l’essentiel travail d’information sur la logistique de base.

    Le bras de fer continue!