Le mandat Hollande est-il le signe de l’impossible social-démocratie en France ?

« Je n’accepterai jamais la division ». C’est par ces termes que Manuel Valls a clos l’Université d’été du PS de La Rochelle le 31 août 2014, rappelant l’importance de la cohésion pour la majorité afin de gouverner. En ce sens, dans une optique de légitimité, Manuel Valls sollicite la confiance des parlementaires par un vote de confiance aujourd’hui à partir de 15 heures.

Épreuve risquée puisque le groupe socialiste ne compte plus désormais que 289 membres, soit la majorité absolue des 577 députés ; cependant parmi les élus, les « frondeurs » ont annoncé une abstention collective de leur mouvement, obligeant Manuel Valls a compter sur les alliés du Parti socialiste, radicaux et écologistes. Ces frondeurs – au nombre inconstant – dénoncent en effet la ligne politique du gouvernement trop social-démocrate, voire social-libéral.

La social-démocratie moderne, comme revendiquée par François Hollande, pourrait se traduire comme une ligne réformiste du socialisme, mettant en avant la volonté de réformer la société de manière pragmatique : reconnaissance de l’économie de marché et renoncement idéologique au collectivisme ; c’est une théorie du compromis, opposée aux théories révolutionnaires de la lutte des classes. Cette idéologie là n’est pas forcément au goût du Parti Socialiste. Les clivages entre la « gauche de gauche » et la « gauche de droite » trahissent-t-ils une impossible social-démocratie en France ?

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Emmanuel Macron et François Hollande sur le parvis de l’Elysée

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La « méthode » sociale-démocrate du gouvernement 

par Manon Chonavel du PS SciencesPo

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Depuis la conférence de presse de François Hollande, le 14 janvier 2014, dans laquelle il se dit « social-démocrate », et plus encore depuis la nomination de Manuel Valls en tant que Premier Ministre, il semblerait que la presse n’ait qu’une question à la bouche : le gouvernement est-il social-démocrate ou social-libéral ?

La vacuité de ce débat sémantique se révèle rapidement fondée sur l’impossibilité pour les journalistes et intervenant.e.s interrogé.e.s de s’accorder sur les termes mêmes du débat. Surtout, les définition – très – diverses et souvent contradictoires de la social-démocratie et du social-libéralisme sont jugées uniquement à l’aune de la politique économique du gouvernement. Une telle focale détourne l’attention des méthodes employées et des politiques non économiques mises en place. Ainsi, qui a entendu parler de mesures de justice sociale comme le projet de loi sur l’adaptation au vieillissement présenté en ce moment même au Parlement ? Il est grand temps d’arrêter de généraliser les débats internes au Parti Socialiste sur les questions économiques à la majorité des lois votées sans difficulté à l’Assemblée. 

Alors non, la social-démocratie n’est pas un socialisme de l’offre – à l’inverse, peut-être, du social-libéralisme. Là où le social-libéralisme est une ligne politique, la social-démocratie est une méthode. Elle est pour moi une branche pleine et entière du socialisme et en partage donc les objectifs principaux ; à savoir, entre autres, la justice sociale, la protection de l’environnement, l’égalité, etc. La particularité de la social-démocratie ou plutôt sa philosophie, est de promouvoir le dialogue social, de croire en la capacité des partenaires sociaux à parvenir à un consensus au sein d’un cadre politique mis en place par l’Etat. Cet encadrement gouvernemental est absolument indispensable pour s’assurer que syndicats et patronats peuvent discuter sur un pied d’égalité, pour affranchir enfin le dialogue social de la rhétorique marxiste de la lutte des classes.

Cette méthode sociale-démocrate trouve sûrement sa meilleure expression dans l’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013 signé par une majorité de syndicats représentatifs et transcrit par le Parlement à travers la loi sur la sécurisation de l’emploi. Un tel accord est bien la preuve de la possibilité d’une social-démocratie à la française. Encadrement du temps partiel, création obligatoire d’une complémentaire santé par l’employeur, droits rechargeables à l’assurance chômage sont autant de mesures sociales qui ont été rendues possibles grâce à ce dialogue. Si certaines mesures, comme la possibilité pour l’entreprise d’avoir recours au chômage partiel pendant une durée limitée en cas de graves difficultés conjoncturelles, ont pu être contestées, peut-être est-il nécessaire de rappeler que cela n’est possible qu’en cas d’accord majoritaire avec les syndicats de l’établissement concerné : social-démocratie là encore. Rejeter l’ANI – ou tout autre accord signé par une majorité des syndicats représentatifs – au motif qu’il ne serait pas en accord avec les intérêts des salariés serait tout aussi illogique que de promouvoir la démocratie participative sans accepter d’écouter les conclusions des citoyen.ne.s.

En juin puis en août dernier, François Hollande a rassemblé à l’Elysée les dirigeant.e.s politiques et leaders de l’opposition sociale-démocrate en Europe. Une telle coalition prend tout son sens aujourd’hui : la social-démocratie à la française, parce qu’elle est d’abord socialiste, requiert des inflexions au niveau européen afin d’aboutir pleinement en France.

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3 Comments

  • paul

    Que signifie la deuxième question ? Imaginons une réponse « non », signifierait-elle que le mandat d’Hollande n’est pas celui de l’échec de la social-démocratie, car il est en fait social-démocrate (ou utiliserait la méthode de la social-démocratie), ou bien signifierait-elle que le mandat d’Hollande n’est pas celui de l’échec de la social-démocratie, car il n’a en fait jamais mis en place un début de socail-démocratie ?