« Le génocide rwandais : autopsie d’une tragédie humaine »

Alors que l’on déplore que l’Afrique soit la seule région du monde à laquelle Sciences-Po ne consacre pas un cycle d’études à part entière, la toute jeune Association Sciences-Po pour l’Afrique (ASPA) se propose de faire connaître les grandes problématiques concernant la région subsaharienne.

C’est dans ce cadre qu’elle a récemment organisé un cycle de quatre conférences intitulé « Le génocide rwandais : autopsie d’une tragédie humaine ». Trois conférences ont déjà eu lieu, et LaPeniche.net était là pour couvrir l’événement.

La première a traité des origines profondes du génocide rwandais, qui n’est pas seulement dû, comme certains occidentaux l’ont cru à l’époque, à l’assassinat du Président rwandais de l’époque, Habyarimana. Les autorités coloniales belges ont joué un grand rôle car elles ont mis en place et institutionnalisé une différence ethnique entre Hutus et Tutsis afin de mieux contrôler le pays (la Belgique se servait des Tutsis comme intermédiaires et les a placé à la tête de l’Etat, considérant que les Hutus n’étaient que bons à travailler dans les champs). C’est après l’indépendance en 1959 que les Hutus se sont révoltés contre les Tutsis, les poussant à l’exil pour beaucoup, dans un contexte de Guerre Froide qui a accentué les tensions dans la région.

La deuxième conférence a porté sur les violences qui ont eu lieu entre 1990 et 1994 et notamment lors du génocide, l’organisation des massacres et la politique d’assassinats systématiques à l’aide d’un maillage du pays très sophistiqué. Les intervenants ont bien montré la complexité du génocide, qui a aussi touché les Hutus eux-mêmes. La deuxième partie a traité de l’implication de la communauté internationale, et notamment de la France, durant cette période. Effectivement, l’Etat français a non seulement apporté son soutien matériel et humain aux autorités génocidaires, mais il a même ignoré les massacres dont il avait pourtant connaissance.

La troisième conférence a abordé trois principaux points. Elle a montré quelles ont été les répercussions du génocide et de l’exil Tutsis dans les autres pays de la région des Grands Lacs, notamment au Congo, et comment on est ainsi arrivé à ce qu’on a appelé la première ‘Guerre Mondiale Africaine’. La position de la France aujourd’hui par rapport à la reconnaissance du génocide est floue car une partie de l’armée en poste en Afrique à l’époque refuse de reconnaître ce qui s’est passé, et ceci de manière très violente. Enfin, on a vu comment le Rwanda essayait de se reconstruire aujourd’hui, et comment il tentait de ressouder la communauté nationale, en supprimant la différence officielle entre les deux ethnies, et aussi par la mise en place d’une mémoire commune du génocide via une juridiction spécifique appelée ‘tribunaux de Gaçaça’ qui permet non seulement de punir les génocidaires, mais aussi aux victimes de témoigner et voir leur souffrance reconnues, alors que les fonds manquent aujourd’hui pour leur permettre de reprendre une vie ‘normale’.

L’intérêt de ces conférences sont de nous renseigner sur une partie de l’histoire contemporaine souvent mal connue, et de comprendre une bonne part des relations internationales d’aujourd’hui en Afrique centrale à l’aide d’intervenants tous très calés et souvent pédagogiques, mais aussi de présenter un autre enjeu de mémoire qui est loin d’être fixé.

La prochaine et dernière conférence aura comme sujet le Darfour pour compléter et clôturer le cycle sur le Rwanda et la violence d’Etat. Vous pourrez très bien suivre celle-ci sans avoir vu les précédentes, alors tous à vos agendas et rendez-vous le 9 Mai à 18h en Amphi Sorel !

4 Comments

  • M

    Article très intéressant qui donne envie… Je vais sûrement aller à la dernière conférence, merci lapéniche !

  • matthieu

    je signale à la péniche quils sont un peu long à réagir, et que des changements ont eu lieu à la tete de sciences po !
    l’organigramme a totalement été refait… est ce dans l’attente du départ de richie ? lol