De la frustration qu’entraîne le travail en groupe

Vous êtes en train de vous arracher les cheveux sur vos derniers papers et autres mémoires? Vous êtes tombés sur LE groupe où il y a un mec qui a décidé de rien foutre, ou une analphabète dont vous avez dû reprendre le travail phrase par phrase pendant des heures? C’est toujours à vous de vous taper tout le travail? Eh bien rassurez-vous, ça arrive aussi ailleurs, et ça arrive aussi aux autres. Aujourd’hui, 3A en Péniche publie le coup de gueule d’un étudiant, renommé Simone pour l’occasion, qui nous raconte son expérience dans une université privée argentine.

Les travaux et exposés de groupe à Sciences Po sont un peu comme les œufs de Pâques de Kinder : de l’extérieur vous vous réjouissez à l’idée d’un chocolat garni de petites merdes délicieuses, mais sous l’emballage c’est juste une coque vide avec un casse tête géant.

Au début –naif que vous êtes !- vous croyez que le travail sera divisé par quatre, offrant trois fois plus de temps à dédier la pinte de 19h au Basile. Au final, vous vous rendez souvent compte que le taf est multiplié par autant d’heures qu’il y a de boulets dans le groupe. Le tout fois deux à cause dudit happy hour.

Et bien, à l’étranger, il faut ajouter au calcul une barrière de langue, et de formation.
Je pensais avoir essuyé le pire à Sciences Po en trois ans, avant de conclure que mes collègues d’exposés – qui ont pu introduire leurs parties sur la précarisation du troisième âge par « de tout temps sa a était un problème important » exploseraient ici les scores du QPUC local.

Car finalement, qu’est-ce qu’une faute de syntaxe par rapport à un désert de connerie?
Il vous faut être quasiment bilingue, prévoir de sauver le monde et avoir un projet professionnel étalé sur dix ans pour obtenir une place dans une université privée d’Argentine en 3e année en troisième année. Une fois sur place, en face de vous en cours d’histoire, les Hollandais ne répondent pas à la question « qui n’a pas compris ? »… justement parce qu’ils n’ont pas compris. Et les étudiants de 4e année de journalisme n’ont jamais entendu parler de Tian’anmen.

Que le reste du monde n’ait pas été formé au schéma problématique-deux parties-deux sous-parties est une chose. Que le Brésilien qui vous a été assigné pour le semestre, en plus de ne pas aligner deux mots d’espagnol, mette quatre verbes conjugués à des personnes, formes et temps différents pour expliquer que la construction d’une route en Bolivie est comparable à la violence de la colonisation des Amériques par la couronne espagnole en est une autre. Comme dirait l’autre « papillon… barbecue!».

On dépasse l’approximation pour verser au détour d’une phrase dans un racisme latent dont l’auteur ne soupçonne même pas l’existence « le Bolivien est un peuple qui aime manifester, il reçoit en retour les massacres et les oppressions, ce qui pose un problème politique » (traduction littérale).

Pas de méthodologie (citations Wikipédia et chiffres tirés du discours d’un chauffeur de bus), une syntaxe à faire pâlir d’envie Nabila, et le charisme d’une huitre à l’heure de la présentation orale.
Ne généralisons pas, dans mon groupe de travail, une étudiante a reconnu que la présence d’une introduction dans notre mémoire final pouvait être une bonne idée. Par ailleurs sur ma classe de 35 élèves en journalisme de 4ème année, deux personnes ont su reconnaître Nicolas Maduro en photo alors qu’il fait les unes depuis trois mois et qu’il vient d’être élu président du Venezuela. J’avoue, la Chine, c’est loin, mais le Venezuela…

Les étudiants de Sciences Po en Argentine s’avèrent pour la majorité être très bons, voire excellents comparés aux étudiants locaux. Loin de prouver que l’air germanopratin démultiplie les capacités intellectuelles des Sciences Pistes par rapport à la moyenne mondiale, cet écart de méthode et de résultat témoigne surtout d’un profond problème de formation, en Argentine d’abord, mais aussi dans d’autres pays latino-américains. Si la faculté publique est excellente, elle est considérée par beaucoup comme une voix trop incertaine d’obtenir un jour un diplôme, justement parce que « seuls les meilleurs restent ». Où vont les autres ? Dans les facultés privées.

Bien sur, il y a des élèves brillants, mais l’on comprend réellement ici ce qu’est payer pour obtenir un diplôme : le niveau d’exigence est très bas, la méthodologie absente, et les examens –dont on peut choisir la date sur une période de deux ans- offrent tous des rattrapages pour le moins faciles.
Sur un continent où le populisme est une façon de gouverner répandue et qui porte ses fruits, on peut s’inquiéter d’une société qui assume de former des journalistes partiels.

Simone

12 Comments

  • Julien

    On peut quand même accorder une présomption de véracité à l’auteur de l’article qui ne se serait sinon pas donnée la peine d’écrire si ça n’était pas un phénomène général. Et puis si Juan et Esteban ne sont pas contents, ils peuvent ne pas lire lapéniche/rentrer chez eux/apprendre le français/manger des tacos.

  • Johan

    @Alex. Objectivement tu as vu beaucoup d’Argentins se permettre de critiquer nos facs? Ils sont contents d’aller en échange chez nous, point barre et se permettent pas de critiquer ce qu’ils ne connaissent que superficiellement. Ce qui serait bien c’est faire un article plus modéré ou permettre une contreréponse

  • Nico

    C’est pas très factuel comme argumentation. Plutôt une suite d’anecdotes assez caricaturales, je comprends donc en partie la réaction d’Esteban et de Juan.

  • Alex

    @ Esteban

    Je ne vois pas en quoi le post est arrogant. C’est factuel. Soit c’est vrai (les universités privées argentines sont médiocres), soit c’est faux. Je ne vois pas en quoi dire la vérité est arrogant…

    On peut me dire que certaines facs publiques françaises sont nulles, je n’irait pas hurler à l’arrogance du méchant étranger qui me dit la vérité.

    Et Juan, arrête de troller, il faut pas se moquer des argentins comme ça.

  • Juan

    Si mais la critik de dos personne veut pa dire que sa est vrai!!! largentine a tres bon niveau ecole! chez nous on dis que vous francais parle mal espagnol avec for accent donc voila!

  • Marie

    Mais il faut pas prendre cet article au pied de la lettre, il a été écrit sur un coup de gueule ! Qui n’a jamais connu des choses pareilles en France, à Sciences Po? En plus, d’autres personnes parties en Argentine ont l’air de dire que c’est vrai là-bas, cf Martine. Certes, Simone est arrogante, mais c’est ce qui rend le truc drôle ! Si elle avait écrit sur un ton miséreux que « oh oui les pauvres, ils sont vraiment pas aidés, l’éducation là-bas c’est pas comme chez nous quand même », c’est là que ça aurait été choquant.

  • Nico

    Nan mais Esteban t’interpretes mal la critique l’article parle juste en general des mecs qui foutent rien dans les groupes d’expose que ce soit en france ou en amerique latine……

  • Martine

    Pour avoir fait ma 3ème année en Argentine, donc dans une université privée, je trouve que l’auteur de l’article montre une réalité que certains ont parfois du mal à croire. Le niveau est ridiculement bas, que ce soit à la Austral, UCA ou San Andres, la sélection ne s’effectue qu’au portefeuille des parents et le niveau demandé n’est pas loin de celui du Lycée. En revanche, les argentins qui étudient dans les facs publiques comme la UBA savent ce qu’est un livre et ont la plupart du temps déjà entendu parler de la théologie de la libération ou de Brejnev. Je me demande vraiment pourquoi la DAIE ne revoit pas sa politique de partenariat en Amsud (grèves, agitation politique?) en essayant au moins pour une année de faire un partenariat avec les universités publiques. Je ne pense pas que ce soit de l’arrogance, le niveau académique est juste franchement décevant, que ce soit pour un étudiant de sciences po ou n’importe quel étudiant un peu ouvert sur le monde.

  • Esteban

    Je trouve moi cela dommage que cette image de l’Amérique de Sud soit ici montrée. Sans vouloir attaquer Simone! ça montre que les gens de Sciences Po, les étudiants français en général se montrent arrogants par rapport au reste du monde. et particulièrement par rapport Amérique de Sud.
    Malgré qualité des cours qu’il m’est reçu à Sciences Po, cette tendance est retrouvée dans beaucoup de mes cours. C’est dommage! il faut que vous ouvriez au monde!