Argent, gloire et beauté : comment devenir millionnaire à Sciences Po.

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Les sciences pistes sont-ils désintéressés ? Un beau sujet pour une dissertation de philosophie mais cet article ne traite ni de morale, ni d’ontologie métaphysique. Non, cet article traite d’argent et plus précisément, l’argent que vous, lecteurs, pourrez peut-être empocher avidement après avoir définitivement quitté le 27, votre diplôme en poche.

Sciences Po : la fabrique de millionnaires

Plus avare que Picsou, plus démonstratif que Coco et plus chanceux que Dev Patel dans Slumdog Millionaire : le science piste !  Le classement publié conjointement par Spear’s magazine et WealthInsight sur les universités ayant formé le plus grand nombre de millionnaires place Sciences Po Paris en dix-huitième position. Ainsi, il s’agit de la deuxième école française après l’INSEAD. Polytechnique, HEC ou encore Paris-Dauphine n’ont qu’à bien se tenir !

Pourquoi un tel rang ? Un membre de l’administration confie que « cette place est attendue et paradoxalement une surprise : certes Sciences Po est caractérisé par une grande polyvalence et des salaires moyens lors de l’insertion dans le marché du travail relativement élevés. Toutefois, une telle place parmi les vingt premiers, devançant d’autres écoles françaises tout à fait prestigieuses telles que Polytechnique ou HEC, c’est un succès inattendu. »

Des salaires moyens élevés ? C’est-à-dire ? Nous avons cherché à en savoir plus, pour justifier une telle place en haut du classement.

Mais avant tout, il faudrait répondre à une question qui peut tous nous tarauder : l’insertion est-elle aisée après la remise de mon diplôme « made in Sciences Po » ? Ne parlant pas du Bachelor dont l’utilité et le rendement sont marginaux, les masters se suffisent de plus en plus à eux-mêmes selon l’article du Monde en date du 8 janvier 2014 (« Un master d’IEP et mille métiers possibles »).

Deux arguments majeurs sont avancés. Tout d’abord, le schéma LMD ou licence-master-doctorat s’est imposé comme le format largement majoritaire dans les études supérieures. Sciences Po n’a pas cherché à s’y soustraire et ces diplômes professionnalisant avec des « écoles » dans l’école n’appellent pas à la poursuite d’une formation complémentaire et absolument nécessaire. La deuxième raison, c’est la fameuse 3A à l’étranger. A l’heure d’une mondialisation qui n’est plus à prouver, une année à l’international et une expérience quelconque dans un pays étranger sont particulièrement prisées par les employeurs.

Mais s’insérer pour quoi, pour quel salaire ?

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Devenir plus riche que Picsou ?
Devenir plus riche que Picsou ?

La fortune sourit aux droits écos

Selon une étude publiée par Sciences Po sur les salaires à la sortie de l’école, avec un revenu moyen de 58 800 euros un an après l’obtention du diplôme pour la promotion 2010, le master « Droit économique » domine le classement suivi par « Finance et stratégie » avec 50 200 euros. A l’inverse, les masters « Affaires européennes » et « Carrières judiciaires et juridiques » occupent la queue du peloton.  Voilà pour le classement. Élevons maintenant le débat à une question cruciale : dès lors, au regard de ces données, comment choisir son orientation ?

Si vous choisissez la voie de l’argent, vous le trouverez donc forcément dans des masters tels que « Droit économique » ou « Finance et stratégies ». Mais peut-on faire un master uniquement pour satisfaire sa cupidité insatiable ? « Attention ! Le master « Droit économique » fait partie intégrante de l’Ecole de droit et comporte donc évidemment une part très importante de droit. Il faut vraiment aimer le droit des affaires, sinon ces deux ans seront ennuyeux au possible. » prévient une étudiante en cinquième année de droit économique. Elle souligne également la grande difficulté et la masse de travail non négligeable en quatrième année. Passionné et travailleur être il te faudra, l’oisiveté de la fortune n’est pas facilement accessible.

Quant au master « Stratégie et finances », une source qui a souhaité conserver l’anonymat lui préfère HEC où « les perspectives en terme d’emploi et de salaire sont meilleures ». Or, ce diplôme couplant Sciences Po et HEC va avec un emploi du temps chargé et une dose de travail importante. Ainsi, gagner beaucoup certes, mais la simple envie de gagner de l’argent ne suffit pas, le travail et la passion pour le droit et l’économie sont incontournables. Work hard, play hard !

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« La gloire efface tout, excepté le crime », Lamartine

La gloire, vous pouvez l’acquérir dans les masters les plus demandés à Sciences Po : affaires internationales, affaires publiques, communication et journalisme. Que vous deveniez diplomate, directeur d’un cabinet ministériel ou grand reporter, vous gagnerez sensiblement moins d’argent que dans les formations précédentes mais les portes de la renommée vous seront ouvertes.

En effet, le salaire moyen des sciences pistes issus de PSIA – école spécialisée dans les affaires internationales à Sciences Po – s’établit à 43 000 euros par an. Pour l’école de communication, on descend à 36 000 puis 35 700 pour les affaires publiques et enfin, 32 600 pour l’école de journalisme. De quoi faire réfléchir les centaines de sciences pistes ayant déclaré à l’entrée de Sciences Po vouloir partir à l’aventure, une caméra sur l’épaule et un micro dans la main, ou travailler au Quai d’Orsay. Il faut cependant rappeler que le salaire moyen français en 2013 est de 25 560 euros, une perte d’argent relative donc.

Dans tous les cas, la gloire a un prix, quelques milliers d’euros en l’occurrence et une concurrence acharnée pour devenir le prochain diplomate mettant fin au conflit syrien. De toute façon, Etienne Wasmer l’a toujours prêché : « There is no free lunch »

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Pour la beauté du geste

Et voici le dernier parcours envisageable : le parcours de la « beauté ».

En premier lieu, il y a la beauté de l’artiste, celui qui conçoit et aménage. Pour ces De Vinci des temps modernes, les masters « Urbanisme » et « Stratégies territoriales et urbaines » semblent une route tout à fait adéquate mais les artistes ont des débuts souvent difficiles. Peut-on appeler un salaire moyen de 37 000 euros par an pour le master « Urbanisme » et 32 600 pour « Stratégies territoriales et urbaines » un début difficile ? La route sera en tout cas plus accidentée que celle du diplomate ou de l’ambassadeur aux Etats-Unis.

La beauté, c’est aussi celle de la ténacité et de la détermination, celle de ceux qui n’ont pas peur d’accumuler les années d’études et d’affronter la terrible épreuve de la thèse. Je parle bien évidemment des doctorants dont le salaire moyen s’établit à 40 760 euros, une somme tout à fait convenable tout en sachant qu’au final, le coût d’opportunité – années passées à s’insérer sur le marché du travail et premier emploi – dépasse largement les bénéfices moraux d’un doctorat. Mais les voies du doctorat sont impénétrables…

Enfin, pour terminer, la beauté de ceux qui continuent à croire, ceux qui gardent la foi en l’Union européenne, ceux qui veulent travailler à Bruxelles ou Strasbourg, ceux qui en d’autres termes font le master « Affaires européennes ». Le salaire moyen se fixe à 29 000 euros, une somme basse au regard de la quantité de travail à fournir mais la bataille pour l’idéal européen en vaut peut-être la peine.

Ainsi, vous qui déprimez alors que vous devez reprendre le chemin des amphis et des salles de conf, pensez à votre fortune, votre gloire ou la beauté de votre engagement à venir.

NB : tous les chiffres sont des salaires bruts annuels

9 Comments

  • bob

    Petite précision: il ne faut pas oublier qu’environ un tiers des étudiants en master (surtout en affaires internationales où l’on peut trouver un public aussi divers qu’un officier de west point, un économiste gabonais ou encore un juriste allemand), ne sont pas des Sciences Po « secs ».

    La moitié des Sciences Po- énarques sont en fait des normaliens (si possible agrégés), des centraliens, des supélecs, sup de co etc. qui maximisent leurs chances d’intégrer l’ena par un passage à Sciences Po.

    De même en droit éco, les plus grands cabinets sont bien souvent décrochés par des juristes à formation universitaire initiale (sorbonne, assas etc.) qui souhaitent bénéficier du « cachet » Sciences Po.

    La même chose s’applique pour finance et strat: les ingénieurs et les diplômés d’économie ont évidemment plus de chances de finir en banque d’investissement, dans les big four, ou encore chez McKinsey.

    Enfin, les statistiques de Sciences Po avenir parlent de salaires moyens et non de salaires médians (médiane: sépare une série de valeurs en deux parties égales: 50% des salaires sont plus élevés, 50% moins élevés). En clair; dans des promotions de masters entre 100 et 400 étudiants, les 10-25 étudiants qui décrochent BCG, JPMorgan, White & Case etc. font exploser les statistiques, et ce ne sont généralement pas les Sciences Po « secs ». Par exemple, le salaire médian de finance et strat tourne plutôt autour de 42 000 bruts (ça reste très bon. Voire la video « les métiers de la finance » de la semaine de l’orientation).

  • mise au point

    Pour information, la Belgique est le pays d’Europe où les ponctions directes sur les salaires sont les plus fortes, puisque l’impôt sur le revenu est prélevé à la source. Il s’agit donc d’un salaire « super net ».
    En outre, il est vrai qu’au niveau européen, les Sciences Po ne sont non pas en concurrence avec les écoles françaises, mais bien avec une multitude d’universités européennes prestigieuses.
    Ces deux points expliquent en partie une moyenne de salaire plus basse.

    J’ajouterai enfin qu’il me semble également dérangeant qu’un 1A rédige cet article, qui aurait eu beaucoup plus de valeur ajouté s’il eu été écrit par un étudiant en master.

  • Koko

    Ca me dérange un peu que l’auteur de cet article ne soit qu’en première année. Il y a forcément un gros manque de recul. On évolue énormément sur sa perception du marché entre sa 1ère année et sa 5ème année. Encore plus quand ça y est, on y est, il faut trouver un vrai job.

  • Eclairage douteux

    La raison principale de cette excellente place dans le classement peut sans doute s’expliquer pour deux raisons:
    – Sciences Po avant R.D RIP était principalement une formation d’appoint, de courte durée (3 ans), qui venait compléter une autre formation (ingénieur, commerce, juriste). Le grand nombre de millionnaires, malgré la petite taille des promotions à l’époque, pourrait donc plus s’expliquer par ces formations parallèles que par le dénominateur commun qu’il partage (Sciences Po).
    – Sciences Po était connu pour être un bastion de la bourgeoisie, une école très fils à papa, ce qui pourrait expliquer le grand nombre de millionnaires (héritiers?)

    Voili

  • josephine

    Ce n’est ni le LMD ni la 3A ni Sciences Po qui fait les millionnaires. C’est le fait que Sciences Po ne soit qu’une étape vers l’ENA dans le triplet célèbre HEC-SC Po-ENA ou X-Sc Po-ENA qui a été le tremplin de la majorité de l’élite française;

    • Olivier Feniet

      Une petite correction à ce que tu dis : l’article du « Monde » que je cite dans cet article ne cherche pas à expliquer le nombre de millionnaires formés à Sciences Po mais la bonne intégration des étudiants sciences pistes sur le marché du travail pour compléter cette analyse des salaires à la sortie de Sciences Po. Or, l’intégration sur le marché du travail s’appuie sur le respect du schéma LMD et la 3e année.

  • Arkhast

    Je tiens à préciser que les enquêtes de Sciences Po sur le salaire de ses élèves se font un an après leur sortie de l’école, il estdonc normal que le master Carrière Judiciaires et Juridiques soit aussi mal classé puisque la plupart des élèves de ce master intègrent ensuite une autre école (ENM, Commissaire de police, Officier de gendarmerie ou Services Pénitentiaires). Il reçoivent ensuite un vrai salaire après deux ans de formation. Je dis ça histoire de ne pas décourager ceux qui seraient tentés par cette voie 😉 Et pis en plus ils sont fonctionnaires, donc ils ont la sécurité de l’emploi :p